Depuis 2010, dans la foulée de la crise des subprimes, plusieurs localités telles San Bernardino et Stockton en Californie, ou encore Jefferson County en Alabama, ont été placées sous chapitre 9. Mais jamais une de la taille de Detroit – plus de 700 000 habitants –, même si New York ou Philadelphie ont, par le passé, elles aussi frôlé la catastrophe. Face à ses difficultés financières, Detroit avait déjà été mise sous tutelle dès mars, avec la nomination par les autorités de l'Etat du Michigan d'un administrateur, Kevyn Orr, un avocat qui avait déjà planché sur la faillite du constructeur automobile Chrysler, ancien fleuron de la région. General Motors, l'autre pilier de cette ville qu'on surnommait, du temps de sa splendeur, "Motor city", avait par ailleurs fait au début du premier mandat d'Obama l'objet d'un sauvetage inédit, avec nationalisation par le gouvernement. Plombée par le déclin de ses industries, Detroit n'a pas pu supporter les retombées de la crise de 2008 : plusieurs responsables de la ville blâment directement le système de foreclosure lié aux prêts immobiliers "pourris", qui a entraîné l'expulsion de centaines de milliers d'habitants de la ville, détruisant autant d'emplois et réduisant à peau de chagrin la base fiscale de la municipalité. L'obligation pour la mairie de s'endetter toujours plus et de tailler dans les services publics a grevé les finances et précipité le départ des résidents, qui ne supportent plus les rues sans lampadaires, les écoles sans enseignants et un centre-ville laissé à l'abandon.
DES CONDITIONS DE CANDIDATURE STRICTES
A sa prise de fonctions, en mars, Kevyn Orr doit gérer une dette de 18 milliards de dollars (dont 14 milliards de dette de long terme). Son plan d'actions , dans lequel il prévient d'ores et déjà que la ville se retrouvera à court de liquidités dans l'année, est sans surprise : privatisations, coupes dans les dépenses de santé, etc. L'administrateur y laisse déjà entendre qu'une banqueroute n'est pas à exclure. Ce plan est immédiatement jugé de mauvais augure par l'agence de notation Moody's, qui menace d'une nouvelle dégradation de la note de la ville (celle-ci est passée de A au début des années 2000 à CCC aujourd'hui, en catégorie hautement spéculative). Kevyn Orr se donne alors six semaines pour voir comment ses propositions vont être reçues et les suites à envisager. En juin, la ville suspend tous ses paiements aux banques, laissant pressentir le pire. Detroit n'échappera finalement pas à la faillite. Pour être placée sous chapitre 9 – qui est l'équivalent du chapitre 11 sur les faillites des entreprises, mais à destination spécifique des municipalités (ce peut être une ville, un comté, un système de santé local ou encore une académie scolaire) – la ville doit remplir plusieurs critères et doit :
AUCUNE ALTERNATIVE POUR LES CRÉANCIERS
La municipalité débitrice doit inclure dans son dossier un plan de remboursement (extension de la maturité des titres, réduction des taux, contraction de nouveaux prêts, etc.) que les créanciers n'ont que le choix d'accepter, à condition bien évidemment qu'il ait été rédigé en bonne et due forme. Les créanciers ne peuvent proposer aucune alternative, en revanche, un comité spécial désigne des avocats, comptables, etc., pour veiller à ce que les intérêts des prêteurs soient respectés. Le plan n'est accepté par la cour et appliqué que s'il répond aux "meilleurs intérêts des créanciers", c'est-à-dire s'il est jugé plus avantageux que toutes les alternatives étudiées auparavant. Contrairement au chapitre 11, la spécificité du chapitre 9 est de laisser à la municipalité une très large marge de manœuvre. Par exemple, même sous chapitre 9, une municipalité a le droit d'emprunter, notamment pour couvrir ses dépenses administratives de base. La cour qui gère la banqueroute n'a par ailleurs pas le droit d'interférer dans les prises de décisions de la mairie. La procédure est généralement longue et coûteuse : la mise sous chapitre 9 du comté d'Orange (Californie), dans les années 1990, a duré 18 mois, la ville de Vallejo (Californie) a vu son plan de remboursement approuvé au bout de trois ans de procédure, et a dépensé, selon une estimation de Bank of America, 10 millions de dollars en frais légaux. Néanmoins, le dispositif peut s'avérer payant : neuf ans après avoir fait faillite, Orange County avait retrouvé sa note "triple A".
Lemonde.fr
DES CONDITIONS DE CANDIDATURE STRICTES
A sa prise de fonctions, en mars, Kevyn Orr doit gérer une dette de 18 milliards de dollars (dont 14 milliards de dette de long terme). Son plan d'actions , dans lequel il prévient d'ores et déjà que la ville se retrouvera à court de liquidités dans l'année, est sans surprise : privatisations, coupes dans les dépenses de santé, etc. L'administrateur y laisse déjà entendre qu'une banqueroute n'est pas à exclure. Ce plan est immédiatement jugé de mauvais augure par l'agence de notation Moody's, qui menace d'une nouvelle dégradation de la note de la ville (celle-ci est passée de A au début des années 2000 à CCC aujourd'hui, en catégorie hautement spéculative). Kevyn Orr se donne alors six semaines pour voir comment ses propositions vont être reçues et les suites à envisager. En juin, la ville suspend tous ses paiements aux banques, laissant pressentir le pire. Detroit n'échappera finalement pas à la faillite. Pour être placée sous chapitre 9 – qui est l'équivalent du chapitre 11 sur les faillites des entreprises, mais à destination spécifique des municipalités (ce peut être une ville, un comté, un système de santé local ou encore une académie scolaire) – la ville doit remplir plusieurs critères et doit :
- y être autorisée par l'Etat ;
- être insolvable ;
- être prête à mettre en œuvre un plan de restructuration de sa dette ;
- soit obtenir l'accord de ses créanciers majoritaires, soit avoir échoué à négocier un rééchelonnement de gré à gré avec ces mêmes créanciers, soit estimer ne pas être en mesure de négocier, ou suspecter un créancier de vouloir obtenir une préférence sur les autres.
AUCUNE ALTERNATIVE POUR LES CRÉANCIERS
La municipalité débitrice doit inclure dans son dossier un plan de remboursement (extension de la maturité des titres, réduction des taux, contraction de nouveaux prêts, etc.) que les créanciers n'ont que le choix d'accepter, à condition bien évidemment qu'il ait été rédigé en bonne et due forme. Les créanciers ne peuvent proposer aucune alternative, en revanche, un comité spécial désigne des avocats, comptables, etc., pour veiller à ce que les intérêts des prêteurs soient respectés. Le plan n'est accepté par la cour et appliqué que s'il répond aux "meilleurs intérêts des créanciers", c'est-à-dire s'il est jugé plus avantageux que toutes les alternatives étudiées auparavant. Contrairement au chapitre 11, la spécificité du chapitre 9 est de laisser à la municipalité une très large marge de manœuvre. Par exemple, même sous chapitre 9, une municipalité a le droit d'emprunter, notamment pour couvrir ses dépenses administratives de base. La cour qui gère la banqueroute n'a par ailleurs pas le droit d'interférer dans les prises de décisions de la mairie. La procédure est généralement longue et coûteuse : la mise sous chapitre 9 du comté d'Orange (Californie), dans les années 1990, a duré 18 mois, la ville de Vallejo (Californie) a vu son plan de remboursement approuvé au bout de trois ans de procédure, et a dépensé, selon une estimation de Bank of America, 10 millions de dollars en frais légaux. Néanmoins, le dispositif peut s'avérer payant : neuf ans après avoir fait faillite, Orange County avait retrouvé sa note "triple A".
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