Des queues se sont formées devant les banques bulgares
La Bulgarie est-elle sous le coup d'une attaque économique téléguidée par une puissance étrangère ? C'est la thèse défendue ce vendredi par la Banque centrale bulgare, la BNB, dans un communiqué qui apparaît en gras sur son site Internet. Après avoir assuré que le secteur bancaire bulgare dispose « de bons indicateurs et d'un fonctionnement normal », le communiqué indique que le pays fait l'objet « au cours des derniers jours, d'une tentative de déstabilisation de l'Etat par le moyen d'une attaque organisée contre les banques bulgares, sans raisons. »
Mais il est miné par la poursuite de la protestation sociale dont l'explosion avait amené en février 2013 des élections anticipées, mais aussi par la corruption. Le 8 juin dernier, l'annonce de la suspension du projet de gazoduc South Stream a accéléré la dissolution de cette étrange majorité fondée uniquement par la mise en place de ce gazoduc. De nouvelles élections anticipées sont prévues pour le 5 octobre, a indiqué le gouvernement ce vendredi.
Mais qu'on ne s'y trompe pas : le secteur bancaire bulgare est fragilisé par une croissance faible et par des prêts peu performants. L'économie bulgare, engoncé dans la parité du lev avec l'euro, ne s'est jamais vraiment remise de la crise de 2009, et la tourmente politique n'aide guère au retour de la confiance. Pas besoin donc, en théorie, des Russes pour expliquer la méfiance vis-à-vis des banques bulgares. D'autant que l'histoire montre qu'une crise bancaire s'accélère par sa propre dynamique.
Latribune.fr
Une faillite évitée de justesse la semaine dernière
La semaine dernière, la BNB était intervenue pour sauver Corpbank, la quatrième banque du pays de la faillite et stopper les débuts de course vers les guichets. Cet établissement aurait été fragilisé par les malversations de son actionnaire Tsvetan Vassilev, lequel nie farouchement ces accusations. Quoi qu'il en soit, les autorités bulgares et la plupart des experts avaient insisté sur le caractère isolé de cette faillite et assuré que le reste du secteur bancaire bulgare était sûr.Panique bancaire
Mais, dans le pays, frappé en 1996-1997 par une grave crise bancaire où 14 établissements avaient fait faillite, le doute s'est installé. Mardi, des rumeurs ont commencé à apparaître. Le même jour, des députés ont évoqué d'autres faillites bancaires. Brusquement, la panique s'est emparée de toute la place financière de Sofia. Les actions des banques, particulièrement de la troisième banque du pays, la First Investment Bank (FIB), ont commencé à s'effondrer. A l'ouverture ce mercredi, le titre FIB perdait 23 % de sa valeur ! Dans de tels cas, évidemment, la panique alimente la panique. Les autres actions bancaires reculaient aussi et, vendredi, selon Reuters, des queues d'une cinquantaine de personnes commençaient à se former autour des agences bancaires de Sofia. Sur Twitter, des photos montraient également une filiale de la FIB fermant ses portes au nez et à la barbe de déposants inquiets.La BNB appelle à la sévérité
« Depuis mercredi, cette attaque a été lancé par des séries de rumeurs et de déclarations publiques malicieuses. De telles actions criminelles visent directement l'épargne de chaque citoyen bulgare et la stabilité financière qui est une clé de la sécurité nationale du pays », a indiqué la BNB qui, tranchant avec le discours généralement policé des banques centrales, en appelle à une application « pleine et entière » de la loi pour faire cesser ces attaques.Crise politique aiguë
Cette crise bancaire arrive au plus mauvais moment pour le gouvernement de Plamen Orecharski. Ce gouvernement de coalition qui regroupe le parti socialiste BSP et le parti de la minorité turque le DPS est depuis sa formation en mars 2013 très fragile. Il a survécu à quatre motions de censure grâce à l'appui du parti ultranationaliste Ataka.Mais il est miné par la poursuite de la protestation sociale dont l'explosion avait amené en février 2013 des élections anticipées, mais aussi par la corruption. Le 8 juin dernier, l'annonce de la suspension du projet de gazoduc South Stream a accéléré la dissolution de cette étrange majorité fondée uniquement par la mise en place de ce gazoduc. De nouvelles élections anticipées sont prévues pour le 5 octobre, a indiqué le gouvernement ce vendredi.
Main du Kremlin ?
C'est donc dans cette atmosphère politique très trouble, alors que la vie politique bulgare est de plus en plus atomisée et que le nouveau scrutin ne permette pas de dégager de majorité, qu'intervient cette crise. Inévitablement, certains évoquent déjà la main du Kremlin derrière cette crise pour se « venger » de l'arrêt de South Stream, un gazoduc qui doit permettre de contourner l'Ukraine pour livrer l'Europe occidentale en gaz russe. Le rapprochement avec la déstabilisation en cours du gouvernement polonais est tentant. Des révélations d'un journal polonais, Wprost, ont mis en lumière, entre autres, un "accord politique" entre la banque centrale et le gouvernement. Le ministère de Donald Tusk a été déstabilisé, même s'il n'a pas été renversé. Cette interprétation du "complot russe" est, du reste, a demi-mots, l'interprétation de la BNB.Mais qu'on ne s'y trompe pas : le secteur bancaire bulgare est fragilisé par une croissance faible et par des prêts peu performants. L'économie bulgare, engoncé dans la parité du lev avec l'euro, ne s'est jamais vraiment remise de la crise de 2009, et la tourmente politique n'aide guère au retour de la confiance. Pas besoin donc, en théorie, des Russes pour expliquer la méfiance vis-à-vis des banques bulgares. D'autant que l'histoire montre qu'une crise bancaire s'accélère par sa propre dynamique.
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