Afrique: « Malgré un taux de mortalité très élevé, l'Ébola tue moins de gens que la rougeole, la malnutrition ou le paludisme »

Mercredi 29 Octobre 2014

COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Le Dr Orsola Sironi n'avait jamais envisagé intégrer une équipe de traitement de l'Ebola. « J'avais dit à mes amis que jamais je n'accepterais un poste lié à cette maladie », confie-t-elle. Et pourtant, elle fait aujourd'hui partie du personnel mobilisé contre l'épidémie dans la province de l'Équateur, en République démocratique du Congo (RDC).


Il y a trois mois, le Dr Orsola Sironi participait à la mission exploratoire initiale dans cette zone reculée d'Afrique. Elle est actuellement coordinatrice médicale du centre de traitement de l'Ebola de Lokolia, une des deux unités installées par MSF dans la région.
L'épidémie qui frappe aujourd'hui la province de l'Equateur, en RDC, n'a aucun lien avec celle qui sévit en Afrique de l'Ouest. Celle ci a démarré fin août et MSF a depuis envoyé près de 70 personnes pour aider les autorités à contrôler la situation. Depuis le 19 octobre, 62 malades ont été hospitalisés dans les centres spécialisés de Lokolia et de Boende, parmi lesquels 25 cas seulement ont été confirmés positifs à l'Ebola : 13 ont été guéris et 12 sont décédés.
Comment l'intervention a-t-elle démarré ?
J'ai intégré le groupe d'intervention contre l'Ebola alors qu'on ne savait pas encore de quel type fièvre il s'agissait. Je faisais partie de l'équipe de recherche chargée d'identifier la maladie. Il s'est avéré que c'était l'Ebola.
Ce qui me faisait un peu peur au début, c'était le faible niveau d'acceptation de la population dont parlaient les médias et la déshumanisation des personnels obligés de travailler vêtus comme des cosmonautes.
Quels sont les principaux défis que pose cette épidémie ?
Je pense qu'un des aspects les plus compliqués de l'intervention est que chaque patient hospitalisé dans notre centre de traitement a été en contact avec de nombreuses personnes de sa communauté. L'hospitalisation et le traitement symptomatique des cas sont un des aspects d'une stratégie de réponse beaucoup plus vaste. La veille sanitaire et la sensibilisation des populations sont des facteurs tout aussi importants pour contenir l'épidémie.
La logistique représente un autre défi majeur. Nous travaillons dans une région très isolée et nos équipes logistiques ont réalisé un véritable tour de force : nous avons réussi à installer en un temps record un centre de traitement complet au beau milieu de la jungle équatoriale. Il nous arrive même d'oublier parfois que nous sommes dans un environnement où il n'y a ni route ni moyens de communication et où il est donc difficile de recevoir du matériel et d'avoir accès à la population.
Pour autant, il ne faut pas perdre de vue les autres maladies et crises qui touchent cet immense pays. Nous devons être capables de faire face aux autres besoins urgents de la population. Malgré son taux de mortalité très élevé et son fort potentiel de transmission, l'Ebola tue moins de gens que la rougeole, la malnutrition ou le paludisme. Nous devons traiter également ces autres maladies.
Comment gères-tu la situation ?
Le contexte de l'Ebola est particulièrement émotionnel. Vous avez face à vous des patients qui ont perdu parfois tous les membres de leur famille. Vous voyez mourir une mère, puis son enfant quelques jours plus tard. En même temps, c'est très gratifiant de voir des patients gagner la bataille contre le virus et guérir. La plupart d'entre eux expriment leur gratitude en sensibilisant leurs communautés et en travaillant comme accompagnateurs de patients dans le centre de traitement. Par exemple, notre premier patient guéri s'occupe actuellement des enfants d'une personne qui vient d'être hospitalisée. C'est ce qui nous permet de tenir le coup en dépit des difficultés que nous rencontrons chaque jour dans notre travail.
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