Cette annonce, quoique intervenant dans un contexte de tension entre les pays de la zone du Liptako Gourma et certains de leurs voisins, semble être un pied de nez à l'offensive discrète, certes, qui est en train d'être menée par le nouveau Président du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye, « sous la bénédiction » de ses pairs, en faveur d'un dégel.
Ses récentes visites en Côte d'ivoire, au Nigéria et au Ghana semblent attester d'une volonté des tenants de l'aile dure de la CEDEAO, qui avaient imposé les sanctions aux trois régimes militaires (Burkina Faso, Mali, Niger), d'ouvrir des portes à un retour au sein de l'instance communautaire, à travers un des leurs, qui semble être « exempt » des reproches que font les militaires aux autres.
Le hic est que les « putschistes », semblent s'inscrire dans une nouvelle phase, en posant cet acte, à travers la déclaration de leurs ministres des affaires étrangères à Niamey. Illégalité pour illégalité, ils ont choisi de passer outre le délai de préavis d'un An pour officialiser leur départ, en se fondant aussi sur ce qu'ils considèrent comme une autre illégalité. A leurs yeux la fermeture des frontières infligée au Mali en Janvier 2022, n'est pas prévue par les textes de la Cedeao. Mieux, ils estiment que ces sanctions ont été prises en violation des dispositions de la convention sur le droit de la mer de Montego Bay (en Jamaïque) de 1982, qui accorde des droits aux pays sans littoral, lesquels ont été violés par la Cedeao.
Si on ajoute à cela, la menace qui avait été brandie pour user de la force armée de la part de la CEDEAO (certains pays du moins), le point de radicalité a été hissé à son sommet.
Il reste entendu que les conséquences d'un retrait brutal de la CEDEAO, risque de produire les effets collatéraux comme ceux du « Brexit » en grande Bretagne sur ces 3 pays. J'exagère un peu sur la comparaison, tant il est vrai que les niveaux de résilience économique sont loin d'être comparables entre les deux. En revanche, rien que sur les effets que vont produire le fractionnement du territoire douanier de la CEDEAO, notamment sur la libre circulation des personnes et des bien, le prix à payer dans un premier temps sera très lourd pour les pays de l'AES. Ces trois pays devront également retirer leurs ressortissants qui siègent à différents niveaux dans les institutions communautaires, sans oublier les programmes communautaires en cours qui devront certainement être suspendus ou arrêtés...
Tout cela peut-il peser sur la balance en faveur d'un rapprochement ? Oui, si les frustrations et les orgueils sont mis de côté au profit de l'intérêt des 15 pays de la CEDEAO qui, avec leur marché, ont intégré la ZLECAF. La solidité de la Cedeao naguère chantée sur le continent, avait même suscité de la part du Maroc un désir d'avoir un statut d'observateur au saint de l'organe communautaire.
Qui prendra, aujourd'hui la responsabilité d'une nouvelle balkanisation du continent au regard des enjeux multiples qui se dressent devant l'Afrique ? Il encore temps de bien faire, car les mêmes peuples, de part et d'autre des frontières seront les seuls à pâtir d'une éventuelle scission au sein de la CEDEAO.