Depuis qu’elle est mise en œuvre, elle a permis aux producteurs d’oignons de respirer. Ils ne sont plus obligés de déverser le fruit de leur dur labeur sur la route nationale pour protester contre le triste sort qui leur était réservé, ni de bazarder encore moins de laisser pourrir leur production. Ils sont au contraire devenus en l’espace de quelques années très riches. Le chiffre d’affaires dépasse maintenant les 30 milliards de francs par saison. Ce qui est en soi est une excellente chose pour eux et pour l’économie. Toutefois au fur et à mesure qu’on avance dans l’application de cette mesure, on constate des failles. C’est ce qui explique ces tensions ou pénuries sur le marché. L’explication est toute simple : les producteurs ne jouent pas le jeu. En réalité, il y a un prix au kilogramme qui est fixé par les autorités pour le kilogramme de l’oignon local, 250 francs que les acteurs de la filière ne veulent pas appliquer. Pour ne pas commercialiser à ce prix, les producteurs font durant la période de fermeture des frontières de la rétention de stock, entraînant du coup des tensions sur le marché qui ont pour effet une augmentation du prix du kilogramme d’oignon. Il passe facilement de 250 à 350 voire 400 francs CFA et pourrait atteindre 500 francs à la veille de la korité. Une situation difficile pour les consommateurs qui n’ont malheureusement pas le choix, en raison de l’application de la mesure de fermeture des frontières. Pourtant, cette mesure d’accompagnement de la production locale qui ne se justifie nullement selon la réglementation en matière de commerce international ne visait pas un tel objectif. L’objectif de la rationalisation était plutôt de faciliter l’émergence de grands producteurs locaux capables d’assurer, dans quelques années, au Sénégal l’autosuffisance pour tous les produits de grande consommation. Les producteurs d’oignons et tous les autres acteurs qui gravitent autour de cette filière faussent le jeu et font rater à l’Etat son objectif. La solution n’est donc pas d’autoriser en pleine période de gel des importations, l’entrée sur le marché de l’oignon importé mais de laisser libre court à la concurrence. C’est comme cela que les droits des consommateurs pourront être préservés. Parce qu’on ne peut pas au nom d’une politique à laquelle les principaux intéressés ne croient même pas, priver la majorité de la population du droit de disposer d’un produit essentiel dans la cuisine des Sénégalais et à un bon prix. Les autorités, si elles ne mettent pas un terme à cette politique de rationalisation doivent au moins prendre des mesures rigoureuses afin d’empêcher certains producteurs d’oignons de prendre en otage la population.
Omar Nourou
Omar Nourou