MICRO FINANCE ET GESTION DES RISQUES DE VULNÉRABILITÉ PAR LES MÉNAGES RURAUX AU SÉNÉGAL

Jeudi 25 Juin 2015

Le développement de la micro finance a permis à des millions d’acteurs à travers le monde, qui n’avaient pas accès aux systèmes de financement classique, d’accéder au financement de leurs activités de production et/ou de consommation. Au Sénégal, les activités des Systèmes Financiers Décentralisés (SFD), a connu une croissance dynamique, depuis près de trois décennies, en termes de nombre de clients servis, de montants octroyés, d’emplois créés, etc.


Au Sénégal, la nouvelle approche prônée par le secteur de la micro finance, a permis une plus grande diversification de l’offre et une ouverture au monde rural, mais surtout un accroissement de la portée globale du secteur financier, qui se situe aux environs de 20%, portée essentiellement par les SFD. Le développement des services financiers au niveau des zones rurales devrait se traduire par une meilleure prise en compte des besoins des acteurs, en particulier les ménages, en termes de spécificités et de montants adéquats et à temps opportun.

Ces derniers sont souvent confrontés à des risques covariants, qui les rendent vulnérables aux chocs endogènes et exogènes, dont la gestion nécessite, souvent, l’utilisation des outils appropriés. Ce travail a consisté à analyser, de façon approfondie, comment les ménages ruraux utilisent les services offerts par les SFD afin de faire face aux risques de vulnérabilité auxquels ils sont confrontés. La notion de vulnérabilité renvoie à la capacité ou l’incapacité des acteurs à pouvoir prévenir les chocs, les gérer et pouvoir s’en sortir en cas de survenance de ceux-ci. Elle est une notion dynamique qui prend en compte les stratégies d’adaptation et de changements socio-économiques du bien être des populations et est mieux définie relativement à un certain repère de mal-être, dont la vulnérabilité à la pauvreté monétaire, la vulnérabilité à la pauvreté des conditions de vie et la vulnérabilité à la pauvreté de potentialité ou de capacités.

• Globalement, il ressort des résultats un faible degré d’utilisation des services financiers par les ménages, lié essentiellement aux lenteurs dans le traitement des dossiers de crédit, la mauvaise qualité du service, les conditions du crédit non appropriées aux besoins des clients, etc. 

• Les tests empiriques, menés dans la zone des Niayes, relèvent une différence d’indicateurs en faveur du groupe bénéficiaire du crédit, par rapport au groupe non bénéficiaire. Globalement, l’effet des services offerts par les SFD sur les capacités des ménages à améliorer sensiblement le niveau de leurs revenus monétaires semble faible dans le cadre d’une offre limitée uniquement aux seuls services financiers. Cependant, la combinaison avec les services non financiers semble mieux contribuer à l’accroissement des revenus monétaires des ménages, comme l’indiquent les résultats trouvés dans l’évaluation des actions menées par l’ONG INTERVIDA dans la banlieue de Dakar et à Joal Fadiouth. 

• Suivant les résultats, près de la moitié des ménages enquêtés affichent une perception assez positive des services offerts par les SFD. Les résultats empiriques indiquent un effet positif sur les capacités des ménages à gérer les risques liés aux conditions de vie, prouvant ainsi qu’une bonne partie du crédit est souvent allouée aux besoins sociaux, même si l’objet déclaré est souvent l’investissement dans des activités productives. L’offre de services des SFD semble avoir un effet moyen sur l’amélioration des conditions de vie des populations, mesurées à travers les dépenses de consommation et d’éducation. Les résultats des tests empiriques, menés dans la zone des Niayes, indiquent un effet relativement moyen du financement sur le niveau des dépenses de consommation et d’éducation. 

• De même, les données empiriques semblent indiquer un effet moyen, des services offerts par les SFD, sur le niveau de la production et des rendements agricoles des ménages ruraux. Il ressort aussi des contraintes telles que les retards dans la mise en place du crédit, l’inadéquation de l’offre par rapport aux besoins, etc. Au regard des résultats et eu égard aux contraintes soulignées, nous pouvons conclure à un très faible effet du niveau des services financiers sur le niveau de la production et celui des rendements agricoles. Ainsi, les services offerts par les SFD semblent afficher un faible effet sur l’aptitude des ménages à pouvoir procéder aux ajustements nécessaires, surtout en ce qui concerne l’accès aux intrants agricoles dans la zone des Niayes.

Abdoulaye Biaye- Economiste
 
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