Malheureusement, en raison de l’insuffisance des moyens méthodiques de cartographie et d’exploration géologique, la pleine mesure des ressources du continent demeure inconnue. Pour libérer ce potentiel, il est essentiel que les sociétés minières et les gouvernements africains adoptent les technologies de la quatrième révolution industrielle (4RI). Intelligence artificielle (IA), automatisation et big data peuvent permettre aux sociétés minières de limiter les dégâts sur l’environnement, d’améliorer les conditions de travail, de réduire les coûts d’exploitation, et d’accroître la productivité.
L’adoption de systèmes efficients d’énergies renouvelables permet d’ores et déjà au secteur minier de réduire son impact environnemental. Les technologies autonomes de la 4RI viennent compléter la transition écologique, en réduisant la consommation de carburant dans le cadre de processus tels que le chargement, le transport, le concassage et les forages. D’après certaines estimations, les technologies sans conducteur pourraient permettre une réduction de 10 à 15 % de la consommation de carburant sur les sites miniers.
Une meilleure utilisation des données et de l’analytique peut également contribuer à l’amélioration des performances minières. Bien que les sociétés minières génèrent d’immenses quantités de données dans le cadre de leurs opérations, rares sont celles qui les utilisent de manière à réellement produire de la valeur. Il y a là une formidable opportunité manquée, dans la mesure où l’analytique avancée peut permettre d’optimiser la planification minière, d’accroître les rendements, et de réduire les temps d’arrêt des équipements. En Afrique du Sud, une mine construite il y a 30 ans est parvenue à améliorer de 2 % son taux d’extraction de minerais en appliquant l’analytique avancée à ses principales étapes de traitement.
La mine de Syama, au Mali, constitue un autre exemple de site qui bénéficie de la numérisation. En 2015, Resolute Mining a pris le contrôle des opérations à Syama, et transformé l’entreprise pour en faire la première mine spécifiquement automatisée au monde. Ses employés utilisent un réseau de fibre optique connecté aux centres de contrôle en surface, pour gérer et surveiller toutes les activités, de la mise en place du point de forage à l’extraction, au chargement, et jusqu’au transport. Cet investissement, certes conséquent dans un premier temps, devrait permettre de réduire les coûts d’extraction de 30 %, et d’améliorer l’efficience globale. Les machines peuvent fonctionner 22 heures par jour, et les roulements permettent d’éviter tout temps d’arrêt.
Les technologies de la 4RI détermineront l’avenir du secteur minier. Mais si elles représentent de formidables opportunités d’accroissement de la productivité, d’amélioration de la sécurité, et de réduction de l’impact environnemental du secteur, elles soulèvent également certaines inquiétudes légitimes. Nombre des emplois créés par ces nouvelles technologies nécessitent des employés qualifiés, que le marché du travail n’est pas en mesure de fournir, ce qui signifie des opportunités d’emploi réduites, en l’absence de programmes d’enseignement et de formation susceptibles de reconvertir les travailleurs.
L’une des solutions pourrait consister pour les sociétés minières à tirer parti des bénéfices issus des marges plus élevées rendues possibles par l’introduction des nouvelles technologies, pour former les travailleurs concernés à l’IA et à l’apprentissage machine. De nouveaux programmes au sein des établissements d’enseignement pourraient inculquer les compétences technologiques dont la nouvelle génération aura besoin dans le cadre des emplois de la 4RI – y compris au sein des entreprises minières.
Une autre possibilité pourrait consister pour les entreprises du secteur minier à encourager le développement d’autres industries locales, afin de réduire la dépendance des communautés aux activités minières en matière d’emploi. En Mauritanie, plusieurs sociétés minières financent un certain nombre d’initiatives d’encouragement du développement économique local, parmi lesquelles une usine de production de bijoux, une installation de fabrication de briques, ainsi qu’une coopérative agricole.
Les leaders du secteur et les dirigeants politiques doivent travailler ensemble afin de capitaliser sur les opportunités qu’offre la numérisation. De nombreuses sociétés minières sont réticentes à investir dans de nouvelles opérations nécessitant un cadre réglementaire stable, car elles n’ont pas confiance en la capacité des gouvernements africains à faire respecter la conformité. La première étape doit par conséquent consister pour les gouvernements à faire évoluer cette conception. Les bienfaits économiques de la numérisation ont en effet vocation à s’étendre aux communautés locales comme aux États. À mesure que les mines gagneront en productivité – et en rentabilité – les gouvernements nationaux généreront davantage de recettes à investir dans les infrastructures de type réseaux routiers, écoles et hôpitaux.
Les sociétés minières qui adopteront la transformation numérique amélioreront leur production, et opéreront de manière plus efficiente, plus efficace, et plus durable sur le plan environnemental. Elles établiront de nouveaux standards pour la santé et la sécurité des travailleurs, et pourront contribuer à la reconversion via les programmes d’enseignement et de formation. En somme, elles créeront une rupture dans le secteur minier africain. Pour autant, à condition d’être exploitée correctement, la numérisation produira des avantages bien supérieurs aux risques.
Traduit de l’anglais par Martin Morel
Landry Signé, professeur et directeur général au sein de la Thunderbird School of Global Management de l’Arizona State University de Washington DC, est membre principal de la Brookings Institution, lauréat Young Global Leader du Forum économique mondial, et auteur d’un récent ouvrage intitulé Unlocking Africa’s Business Potential.
© Project Syndicate 1995–2022
L’adoption de systèmes efficients d’énergies renouvelables permet d’ores et déjà au secteur minier de réduire son impact environnemental. Les technologies autonomes de la 4RI viennent compléter la transition écologique, en réduisant la consommation de carburant dans le cadre de processus tels que le chargement, le transport, le concassage et les forages. D’après certaines estimations, les technologies sans conducteur pourraient permettre une réduction de 10 à 15 % de la consommation de carburant sur les sites miniers.
Une meilleure utilisation des données et de l’analytique peut également contribuer à l’amélioration des performances minières. Bien que les sociétés minières génèrent d’immenses quantités de données dans le cadre de leurs opérations, rares sont celles qui les utilisent de manière à réellement produire de la valeur. Il y a là une formidable opportunité manquée, dans la mesure où l’analytique avancée peut permettre d’optimiser la planification minière, d’accroître les rendements, et de réduire les temps d’arrêt des équipements. En Afrique du Sud, une mine construite il y a 30 ans est parvenue à améliorer de 2 % son taux d’extraction de minerais en appliquant l’analytique avancée à ses principales étapes de traitement.
La mine de Syama, au Mali, constitue un autre exemple de site qui bénéficie de la numérisation. En 2015, Resolute Mining a pris le contrôle des opérations à Syama, et transformé l’entreprise pour en faire la première mine spécifiquement automatisée au monde. Ses employés utilisent un réseau de fibre optique connecté aux centres de contrôle en surface, pour gérer et surveiller toutes les activités, de la mise en place du point de forage à l’extraction, au chargement, et jusqu’au transport. Cet investissement, certes conséquent dans un premier temps, devrait permettre de réduire les coûts d’extraction de 30 %, et d’améliorer l’efficience globale. Les machines peuvent fonctionner 22 heures par jour, et les roulements permettent d’éviter tout temps d’arrêt.
Les technologies de la 4RI détermineront l’avenir du secteur minier. Mais si elles représentent de formidables opportunités d’accroissement de la productivité, d’amélioration de la sécurité, et de réduction de l’impact environnemental du secteur, elles soulèvent également certaines inquiétudes légitimes. Nombre des emplois créés par ces nouvelles technologies nécessitent des employés qualifiés, que le marché du travail n’est pas en mesure de fournir, ce qui signifie des opportunités d’emploi réduites, en l’absence de programmes d’enseignement et de formation susceptibles de reconvertir les travailleurs.
L’une des solutions pourrait consister pour les sociétés minières à tirer parti des bénéfices issus des marges plus élevées rendues possibles par l’introduction des nouvelles technologies, pour former les travailleurs concernés à l’IA et à l’apprentissage machine. De nouveaux programmes au sein des établissements d’enseignement pourraient inculquer les compétences technologiques dont la nouvelle génération aura besoin dans le cadre des emplois de la 4RI – y compris au sein des entreprises minières.
Une autre possibilité pourrait consister pour les entreprises du secteur minier à encourager le développement d’autres industries locales, afin de réduire la dépendance des communautés aux activités minières en matière d’emploi. En Mauritanie, plusieurs sociétés minières financent un certain nombre d’initiatives d’encouragement du développement économique local, parmi lesquelles une usine de production de bijoux, une installation de fabrication de briques, ainsi qu’une coopérative agricole.
Les leaders du secteur et les dirigeants politiques doivent travailler ensemble afin de capitaliser sur les opportunités qu’offre la numérisation. De nombreuses sociétés minières sont réticentes à investir dans de nouvelles opérations nécessitant un cadre réglementaire stable, car elles n’ont pas confiance en la capacité des gouvernements africains à faire respecter la conformité. La première étape doit par conséquent consister pour les gouvernements à faire évoluer cette conception. Les bienfaits économiques de la numérisation ont en effet vocation à s’étendre aux communautés locales comme aux États. À mesure que les mines gagneront en productivité – et en rentabilité – les gouvernements nationaux généreront davantage de recettes à investir dans les infrastructures de type réseaux routiers, écoles et hôpitaux.
Les sociétés minières qui adopteront la transformation numérique amélioreront leur production, et opéreront de manière plus efficiente, plus efficace, et plus durable sur le plan environnemental. Elles établiront de nouveaux standards pour la santé et la sécurité des travailleurs, et pourront contribuer à la reconversion via les programmes d’enseignement et de formation. En somme, elles créeront une rupture dans le secteur minier africain. Pour autant, à condition d’être exploitée correctement, la numérisation produira des avantages bien supérieurs aux risques.
Traduit de l’anglais par Martin Morel
Landry Signé, professeur et directeur général au sein de la Thunderbird School of Global Management de l’Arizona State University de Washington DC, est membre principal de la Brookings Institution, lauréat Young Global Leader du Forum économique mondial, et auteur d’un récent ouvrage intitulé Unlocking Africa’s Business Potential.
© Project Syndicate 1995–2022