Comme souvent au Sénégal pour ne pas dire toujours, c'est l'application stricte des textes et autres lois qui posent problème. Or, à quoi servent les textes s'ils sont royalement foulés au pied ? Si la question s'adresse bien sûr aux autorités sénégalaises chargées de faire appliquer les textes ainsi qu'à toute la chaîne de décisions, la réponse elle, est donnée par les acteurs sur le terrain notamment ceux-là mêmes auxquels s'appliquent les textes. Et pour le cas d'espèce, des traders en complicité avec des intermédiaires qui collectent et continuent d'exporter frauduleusement des quantités importantes de ferraille et autres rebuts ferreux, malgré le décret N°2013-587 du 02 mai 2013 portant suspension pour une année renouvelable de l'exportation de la ferraille et des sous produits ferreux collectés au Sénégal.
Qu'à cela ne tienne, au-delà des effets pervers de ces expéditions à forte dominance d'informel qui dépassent la fraude et l'évasion fiscale ou encore le vol et la détérioration des biens publics, il y a surtout le fait que l'option ferme du gouvernement de création de valeur ajoutée dans cette filière, qui sous-tend cette mesure d'interdiction, est en passe d'être une chimère, avec le risque de faire tout bonnement disparaître l'industrie de transformation locale. La principale industrie, la Société métallurgique d'Afrique (Someta) qui emploie plus de 500 sénégalais dans son activité, subit à nouveau les contrecoups de ces exportations frauduleuses.
C'est pourtant à cause des mêmes pratiques et pour les mêmes raisons de création de valeur ajoutée que l'Etat sénégalais avait été amené à décréter la suspension pour une année renouvelable de l'exportation de la matière première, avant de signer une convention avec les opérateurs de ferraille et ladite Someta qui s'était engagée à acheter aux prix fixes de 85 000 (pour le fer léger et fonte) à 125 000 FCfa (pour la ferraille lourde) la tonne, toute la ferraille que ces derniers lui proposeraient. Mais voilà que depuis quelques mois, le produit n'arrive plus dans les fourneaux de ladite société qui a investi quelque 18 milliards de francs CFA et qui vient à manquer de matière première. Ce qui risque d'impacter sa production et mettre un coup d'arrêt à son activité. Et pour cause.
La matière première prendrait d'autres destinations hors de nos frontières, par les bons soins de traders identifiés comme des Indiens en complicité avec des intermédiaires sénégalais collecteurs. Pour avoir effectué les constats d'huissier nécessaires par procès-verbal en date du 17 décembre 2013, les services de ladite Someta auraient pu identifier que le principal acteur de cette violation du décret ne serait autre qu'un Indien qui répondrait au nom de Abdel Karim.
Ainsi à plusieurs endroits de la ville, les constats d'huissier ont-ils pu identifier des entrepôts de ferraille détenus par des Indiens. Il en est ainsi du dépôt à Colobane détenu par deux d'entre eux ; de même que deux dépôts à Hann plage desquels ils auraient chassé l'huissier ; d'un dépôt à Yarakh toujours géré par un des leurs ; d'un grand dépôt à Thiaroye Azur ; entre autres.
Aussi, sur la base de ces éléments, une plainte de la part de la société Someta serait actuellement sur la table du Procureur de la République et une autre sur celui du ministre de la Justice Garde des sceaux.
Quel que soit le prix
Durant les trois dernières années avant le décret, quelque 379 221 Tonnes en moyenne ont été exportées par an. Il suffit d'imaginer que les milliers de tonnes de ferraille et autres matériaux ferreux partent en Chine ou en Inde pour être retransformés en fil d'acier ou autres fers à béton et réimportées au Sénégal.
Au Maroc où, entre fonte des regards de voiries, cuivre des câbles électriques et téléphoniques (ONCF, ONE et Maroc Telecom), contrepoids de tension (ONCF)... tout passe dans le circuit d'exportations des déchets métalliques, une étude réalisée par la Fimme(Fédération des industries métallurgiques, mécaniques, électriques et électroniques), avec le soutien de la Commission européenne, en a évalué les conséquences. A commencer d'abord par le manque à gagner en termes de valorisation, de création d'emplois et d'effets induits sur les secteurs du bâtiment et de l'artisanat. Ces derniers souffrent cruellement d'un sous-approvisionnement en matière première et notamment en vieux métaux.
Au Cameroun, en Côte d'ivoire, au Ghana où le syndicat des travailleurs de l'industrie et du commerce (ICU) soutient totalement une proposition du gouvernement de faire de l'exportation de ferraille un délit afin de protéger les industries locales ; Depuis le 9 novembre 2011, le gouvernement congolais a interdit sur toute l'étendue du territoire d'exporter la ferraille ; En Mauritanie, c'est une société indienne, HIND METAL, qui exportait massivement et librement des métaux ferreux. Une activité désormais soumise à autorisation. Même des pays développés comme la France, ont opté pour des restrictions draconiennes de leurs exportations de métaux de récupération dès les années 1970. Tout récemment, de nombreux pays émergents leur ont emboîté le pas, soit pour sauvegarder l'industrie locale soit pour juguler la flambée des prix. C'est le cas de l'Egypte, des pays du Golfe, de la Chine, de la Russie, de la Corée du Sud et de la Thaïlande.
Pour tous ces pays, la situation s'était avérée intenable et les autorités ont du réagir. Soit les exportations sont interdites carrément, soit elles sont soumises à des quotas avec, en prime, des taxes assez élevées. Au Maroc par exemple, la loi de finances de 2009 avait interdit aux exportateurs des déchets ferreux et non ferreux la récupération de la TVA sur les marchandises achetées localement. Des mesures qui ont porté un coup dur aux entreprises spécialisées dans l'export de la ferraille.
Le drame c'est que le business des rebuts ferreux est d'autant plus lucratif que le marché à l'étranger est prêt à casser la tirelire pour acquérir la matière première. Aussi, quel que peut être le prix proposé par l'industrie locale pour absorber l'existant, il ne sera jamais assez rémunérateur pour les collecteurs locaux. Dès lors, la seule alternative pour sauvegarder les industries locales de transformation consiste en une décision politique ferme matérialisée par une application concrète et rigoureuse.
Sud Quotidien
Qu'à cela ne tienne, au-delà des effets pervers de ces expéditions à forte dominance d'informel qui dépassent la fraude et l'évasion fiscale ou encore le vol et la détérioration des biens publics, il y a surtout le fait que l'option ferme du gouvernement de création de valeur ajoutée dans cette filière, qui sous-tend cette mesure d'interdiction, est en passe d'être une chimère, avec le risque de faire tout bonnement disparaître l'industrie de transformation locale. La principale industrie, la Société métallurgique d'Afrique (Someta) qui emploie plus de 500 sénégalais dans son activité, subit à nouveau les contrecoups de ces exportations frauduleuses.
C'est pourtant à cause des mêmes pratiques et pour les mêmes raisons de création de valeur ajoutée que l'Etat sénégalais avait été amené à décréter la suspension pour une année renouvelable de l'exportation de la matière première, avant de signer une convention avec les opérateurs de ferraille et ladite Someta qui s'était engagée à acheter aux prix fixes de 85 000 (pour le fer léger et fonte) à 125 000 FCfa (pour la ferraille lourde) la tonne, toute la ferraille que ces derniers lui proposeraient. Mais voilà que depuis quelques mois, le produit n'arrive plus dans les fourneaux de ladite société qui a investi quelque 18 milliards de francs CFA et qui vient à manquer de matière première. Ce qui risque d'impacter sa production et mettre un coup d'arrêt à son activité. Et pour cause.
La matière première prendrait d'autres destinations hors de nos frontières, par les bons soins de traders identifiés comme des Indiens en complicité avec des intermédiaires sénégalais collecteurs. Pour avoir effectué les constats d'huissier nécessaires par procès-verbal en date du 17 décembre 2013, les services de ladite Someta auraient pu identifier que le principal acteur de cette violation du décret ne serait autre qu'un Indien qui répondrait au nom de Abdel Karim.
Ainsi à plusieurs endroits de la ville, les constats d'huissier ont-ils pu identifier des entrepôts de ferraille détenus par des Indiens. Il en est ainsi du dépôt à Colobane détenu par deux d'entre eux ; de même que deux dépôts à Hann plage desquels ils auraient chassé l'huissier ; d'un dépôt à Yarakh toujours géré par un des leurs ; d'un grand dépôt à Thiaroye Azur ; entre autres.
Aussi, sur la base de ces éléments, une plainte de la part de la société Someta serait actuellement sur la table du Procureur de la République et une autre sur celui du ministre de la Justice Garde des sceaux.
Quel que soit le prix
Durant les trois dernières années avant le décret, quelque 379 221 Tonnes en moyenne ont été exportées par an. Il suffit d'imaginer que les milliers de tonnes de ferraille et autres matériaux ferreux partent en Chine ou en Inde pour être retransformés en fil d'acier ou autres fers à béton et réimportées au Sénégal.
Au Maroc où, entre fonte des regards de voiries, cuivre des câbles électriques et téléphoniques (ONCF, ONE et Maroc Telecom), contrepoids de tension (ONCF)... tout passe dans le circuit d'exportations des déchets métalliques, une étude réalisée par la Fimme(Fédération des industries métallurgiques, mécaniques, électriques et électroniques), avec le soutien de la Commission européenne, en a évalué les conséquences. A commencer d'abord par le manque à gagner en termes de valorisation, de création d'emplois et d'effets induits sur les secteurs du bâtiment et de l'artisanat. Ces derniers souffrent cruellement d'un sous-approvisionnement en matière première et notamment en vieux métaux.
Au Cameroun, en Côte d'ivoire, au Ghana où le syndicat des travailleurs de l'industrie et du commerce (ICU) soutient totalement une proposition du gouvernement de faire de l'exportation de ferraille un délit afin de protéger les industries locales ; Depuis le 9 novembre 2011, le gouvernement congolais a interdit sur toute l'étendue du territoire d'exporter la ferraille ; En Mauritanie, c'est une société indienne, HIND METAL, qui exportait massivement et librement des métaux ferreux. Une activité désormais soumise à autorisation. Même des pays développés comme la France, ont opté pour des restrictions draconiennes de leurs exportations de métaux de récupération dès les années 1970. Tout récemment, de nombreux pays émergents leur ont emboîté le pas, soit pour sauvegarder l'industrie locale soit pour juguler la flambée des prix. C'est le cas de l'Egypte, des pays du Golfe, de la Chine, de la Russie, de la Corée du Sud et de la Thaïlande.
Pour tous ces pays, la situation s'était avérée intenable et les autorités ont du réagir. Soit les exportations sont interdites carrément, soit elles sont soumises à des quotas avec, en prime, des taxes assez élevées. Au Maroc par exemple, la loi de finances de 2009 avait interdit aux exportateurs des déchets ferreux et non ferreux la récupération de la TVA sur les marchandises achetées localement. Des mesures qui ont porté un coup dur aux entreprises spécialisées dans l'export de la ferraille.
Le drame c'est que le business des rebuts ferreux est d'autant plus lucratif que le marché à l'étranger est prêt à casser la tirelire pour acquérir la matière première. Aussi, quel que peut être le prix proposé par l'industrie locale pour absorber l'existant, il ne sera jamais assez rémunérateur pour les collecteurs locaux. Dès lors, la seule alternative pour sauvegarder les industries locales de transformation consiste en une décision politique ferme matérialisée par une application concrète et rigoureuse.
Sud Quotidien