Senhuile-SenéthanolSA est le nom du consortium d'investisseurs qui a obtenu du gouvernement sénégalais quelque 20 000 hectares de terres fertiles dans la région de Saint-Louis, au nord-ouest du pays, pour y produire des agro carburants. Du coup, c'est la survie de quelque 9 000 personnes vivant dans une quarantaine de villages et de hameaux qui se retrouve directement menacée. Le développement de ce projet agro-industriel a déjà eu pour conséquence la destruction de sites sacrés et religieux, de cimetières et d'écoles ; et prive d'eau des villages entiers, dont les femmes sont désormais obligées à marcher 10 kilomètres pour aller en chercher.
Des paysans et des éleveurs de cette région viennent d'ailleurs d'achever une tournée en Europe pour informer sur le véritable calvaire qu'ils vivent désormais, et demander la fin d'une transaction foncière contre laquelle ils n'ont cessé se battre. C'est que Senhuile-Senéthanol SA est un concentré de tous les effets pervers que présente ce type de projet : des décisions prises en haut lieu sans consultation, ni consentement des populations qui vivent sur ces terres depuis des temps immémoriaux ; une entreprise étrangère, au montage financier incertain, prévoyant de produire pour l'export dans un pays qui connaît des problèmes alimentaires importants ; des petits paysans privés des ressources naturelles qui le font vivre, l'eau, la terre ; des éleveurs qui n'ont plus où aller pour faire paître et abreuver leur bétail, qui joue un rôle crucial dans l'économie rurale.
Tout cela est documenté par des ONG telles que Grain, ActionAid, ainsi que l'Oakland Institute, une ONG américaine qui vient de publier un rapport accablant sur ce projet, dont le montage financier est qualifié de douteux. Senhuile-Sénéthanol SA est un consortium d'intérêts privés avec des ramifications en Italie, aux Etats-Unis, au Brésil et au Panama. Si 51% du capital est bel et bien détenu par l'Italien Tampieri Financial Group SA, il ressort qu'Abe Italia, la maison mère de Sénéthanol, aurait été mise en liquidation en 2013, après que ses dirigeants aient été impliqués dans des scandales politiques, de blanchiment d'argent et d'évasion fiscale.
Dès lors, comment comprendre que le Sénégal « offre » 20 000 hectares à une entreprise dotée d'un montage financier aussi glauque ? Au-delà des suspicions de corruption des élites locales, le rapport de l'Oakland Institute insiste sur le rôle joué par la Banque mondiale et les bailleurs de fonds qui continuent à imposer aux dirigeants des pays africains des politiques économiques et agricoles ultra-libérales, misant sur l'agrobusiness, l'ouverture aux investissements étrangers, le retrait de l'Etat. « Et c'est bien là le cœur du problème, insiste Frédéric Mousseau de l'Oakland Institute. Car le continent reste largement peuplé de ruraux, agriculteurs et éleveurs, et ce n'est pas en les effaçant d'un trait de crayon qu'on pourra amener le développement ».
Un assaut sans précédent est actuellement donné aux terres africaines, chassant des millions de paysans de la terre de leurs ancêtres. Plusieurs initiatives internationales favorisent cet accaparement des terres par l'agrobusiness mondialisé, telle la Nouvelle Alliance pour la nutrition et la sécurité alimentaire, concoctée au Forum économique mondial de Davos, adoubée par les pays du G8, dont les entreprises se régalent face à autant de juteuses opportunités d'affaires. Les pirogues de Lampedusa ont encore de beaux jours devant elles.
Des paysans et des éleveurs de cette région viennent d'ailleurs d'achever une tournée en Europe pour informer sur le véritable calvaire qu'ils vivent désormais, et demander la fin d'une transaction foncière contre laquelle ils n'ont cessé se battre. C'est que Senhuile-Senéthanol SA est un concentré de tous les effets pervers que présente ce type de projet : des décisions prises en haut lieu sans consultation, ni consentement des populations qui vivent sur ces terres depuis des temps immémoriaux ; une entreprise étrangère, au montage financier incertain, prévoyant de produire pour l'export dans un pays qui connaît des problèmes alimentaires importants ; des petits paysans privés des ressources naturelles qui le font vivre, l'eau, la terre ; des éleveurs qui n'ont plus où aller pour faire paître et abreuver leur bétail, qui joue un rôle crucial dans l'économie rurale.
Tout cela est documenté par des ONG telles que Grain, ActionAid, ainsi que l'Oakland Institute, une ONG américaine qui vient de publier un rapport accablant sur ce projet, dont le montage financier est qualifié de douteux. Senhuile-Sénéthanol SA est un consortium d'intérêts privés avec des ramifications en Italie, aux Etats-Unis, au Brésil et au Panama. Si 51% du capital est bel et bien détenu par l'Italien Tampieri Financial Group SA, il ressort qu'Abe Italia, la maison mère de Sénéthanol, aurait été mise en liquidation en 2013, après que ses dirigeants aient été impliqués dans des scandales politiques, de blanchiment d'argent et d'évasion fiscale.
Dès lors, comment comprendre que le Sénégal « offre » 20 000 hectares à une entreprise dotée d'un montage financier aussi glauque ? Au-delà des suspicions de corruption des élites locales, le rapport de l'Oakland Institute insiste sur le rôle joué par la Banque mondiale et les bailleurs de fonds qui continuent à imposer aux dirigeants des pays africains des politiques économiques et agricoles ultra-libérales, misant sur l'agrobusiness, l'ouverture aux investissements étrangers, le retrait de l'Etat. « Et c'est bien là le cœur du problème, insiste Frédéric Mousseau de l'Oakland Institute. Car le continent reste largement peuplé de ruraux, agriculteurs et éleveurs, et ce n'est pas en les effaçant d'un trait de crayon qu'on pourra amener le développement ».
Un assaut sans précédent est actuellement donné aux terres africaines, chassant des millions de paysans de la terre de leurs ancêtres. Plusieurs initiatives internationales favorisent cet accaparement des terres par l'agrobusiness mondialisé, telle la Nouvelle Alliance pour la nutrition et la sécurité alimentaire, concoctée au Forum économique mondial de Davos, adoubée par les pays du G8, dont les entreprises se régalent face à autant de juteuses opportunités d'affaires. Les pirogues de Lampedusa ont encore de beaux jours devant elles.