Monsieur le Directeur Général, vous venez à nouveau d’être porté à la tête de l’ANSD que vous connaissez bien. Pouvez-vous brièvement revenir sur les missions et le cadre d’intervention de l’ANSD ?
Oui. Au Sénégal l’activité de production de statistiques publiques est très bien organisée. La loi 2012-03 du 3 janvier 2012 modifiant et complétant la loi 2004-21 du 21 juillet 2004 portant organisation des activités statistiques définit le Système Statistique National (SSN) précise ses missions et son organisation. Le SSN peut être défini comme « l’ensemble des services et organismes publics et parapublics qui produisent et diffusent des données statistiques ».
Les composantes institutionnelles du SSN sont : le Conseil National de la Statistique(SNS), l’Agence Nationale de la Démographie et de la Statistique (ANSD) et les autres structures publiques du SSN.
Le Conseil National de la Statistique, présidé par le Premier Ministre est chargé de proposer au gouvernement les orientations générales de la politique statistique de la nation.
L’ANSD est une agence nationale d’exécution dotée d’une personnalité morale, d’une autonomie de gestion et d’une indépendance scientifique. Ses missions sont définies dans le décret n°2005-436 du 23 mai 2005 relatif à l’ANSD.
Plus spécifiquement le décret précité lui assigne les tâches suivantes :
Donc en résumé, on peut dire que l’Agence nationale de la statistique et de la démographique (ANSD) a deux missions fondamentales :
-. Une mission de coordination du système statistique national (CNS), qui est organisé autour du conseil national du statistique présidé par le Premier ministre. Le CNS est assisté par un comité technique des programmes statistiques qui est présidé par le directeur général de l'ANSD.
- Une mission de production de données statistiques sur les comptes nationaux, sur l’inflation, sur la démographie, sur les recensements, pour les besoins du gouvernement, pour les besoins des chercheurs, du secteur privé, des organisations non gouvernementales et d’une manière générale pour le public.
Le système statistique national est, faut-il le rappeler, décentralisé…. Cependant, tous les secteurs producteurs de statistiques publiques ont une obligation de remonter les données produites à l’ANSD qui centralise, s’assure du respect des normes, met en cohérence d’ensemble et diffuse pour répondre aux besoins de l’ensemble des utilisateurs.
Dans vos missions, il y a le suivi de la conjoncture et la prévision économique. Actuellement, quel est l’état de l’économie sénégalaise sous le prisme d’un contexte international instable ?
L’économie mondiale est secouée actuellement par des tensions géopolitiques depuis le début de l’année, notamment avec la crise russo-ukrainienne. Ce conflit a eu comme répercussion, le relèvement de l’inflation et l’assombrissement des perspectives de croissance de l‘économie mondiale. Globalement, les dernières prévisions du FMI du mois d’octobre 2022 tablent sur une croissance de l’activité économique mondiale de 3,2% cette année contre 6,0% en 2021, soit un repli de 2,8 points de pourcentage.
Au plan interne, le Sénégal subit les contrecoups de cette crise et les effets des sanctions de la CEDEAO vis-à-vis du Mali sur le premier semestre de 2022. Toutefois, à la faveur des efforts substantiels consentis par les autorités et des effets attendus des différentes mesures de soutien à l’économie nationale dans le cadre de la mise en œuvre du PAP2A, l’activité économique interne devrait se stabiliser. Une hausse de 4,8% est attendue en 2022 contre 6,1% en 2021. Ce ralentissement est à mettre en liaison avec la décélération de l’activité du secteur secondaire attendu à 1,1% en 2022 contre 10,9% en 2021.
S’agissant de l’inflation, elle a atteint des niveaux records justifiant la prise par les autorités de onze mesures pour endiguer les tensions inflationnistes. Sur les dix premiers mois de 2022, l’inflation mesurée par l’indice national harmonisé des prix à la consommation (INHPC) est ressortie à 8,9%. Ce relèvement du niveau général des prix s’explique essentiellement par le renchérissement des produits alimentaires (+14,1%), notamment, les produits céréaliers, la viande, le poisson, l’huile et beurre et les légumes.
En 2022, la gestion budgétaire est marquée par la poursuite de la relance économique, avec le renforcement des investissements et la progression des subventions, avec un déficit public attendu à 6,3% du PIB.
Pour ce qui concerne les échanges extérieurs, ils pourraient se traduire par une dégradation du déficit du compte courant de 612,5 milliards, passant de 2037,3 milliards à 2649,8 milliards. Quant au solde global de la balance des paiements qui était excédentaire de 142,3 milliards en 2021, il ressortirait en déficit de 88,5 milliards en 2022.
Un deuxième Recensement Général des Entreprises (RGE) entre dans le cadre de vos projets. A ce niveau pouvez-vous nous rappeler les caractéristiques et tendances du premier RGE?
Oui, je confirme que parmi les grands projets que nous entendons démarrer en 2023 figure le deuxième Recensement des Entreprises. Il faut remarquer que depuis l’indépendance de notre pays en 1960, c’est seulement en 2016 que le Sénégal a conduit son premier Recensement général des Entreprises. A la même date, le Sénégal avait déjà organisé avec succès quatre recensements généraux de la population. C’est une excellente chose et c’est aussi dire que le Sénégal connaît bien les dynamiques de sa population, ce qui lui a permis de bien gérer et maitriser des phénomènes comme la mortalité infantile et infanto-juvénile qui ont été réduites de façon significative grâce à la bonne connaissance issue des enquêtes et recensements. Cependant , la connaissance des tendances et trajectoires des entreprises sénégalaises reste le talon d’Achille du Système Statistique. Le Sénégal ne connaît pas fondamentalement les dynamiques de ses entreprises. Or l’entreprise est le lieu de production des richesses. C’est après l’effort de production que toute politique de redistribution, toute politique sociale prend son sens.
Il est donc important qu’un focus soit mis sur les entreprises, pour connaître leurs dynamiques, tendances, potentiel, goulot d’étranglement, etc. De la même façon que l’ANSD fait un monitoring rapproché de la mortalité infantile et juvénile de la population, de la même façon, elle devrait de façon constante, déterminer et suivre les tendances de la mortalité des entreprises. Il est absolument indispensable de connaitre les dynamiques et déterminants de la mortalité des entreprises pour envisager les solutions à mettre en œuvre. De quels types d’entreprises dispose-t-on ? Comment sont–elles réparties spatialement sur le territoire national ? Quelles difficultés traversent-elles ? Quels sont leurs potentiels ? Qu’est-ce qui entrave le potentiel de leur développement ? Voilà des questions pour lesquelles nous nous sentons interpeller pour apporter des réponses précises.
L’ANSD, dans le cadre de recensements et enquêtes pourra répondre à ces questions précises. C’est dans ce cadre et pour anticiper sur la demande, que nous avons choisi parmi nos priorités de l’année 2023 de travailler sur un deuxième recensement général des entreprises, pour ajouter des points de référence et enrichir notre connaissance de l’entreprise.
Pour revenir à la deuxième partie de votre question, sur les enseignements tirés du premier Recensement Général des Entreprises (RGE) du Sénégal, notons que le RGE -2016 avait révélé que 97% des 400 000 entreprises recensées, étaient des entreprises du secteur informel.
Sur les 3% d’entreprises formelles recensées, 80% sont implantées à Dakar, 7,9% à Thiès et 3,3% à St-Louis ; ce qui fait que l’axe Dakar-Thiès-St-Louis polarise plus de 91% des entreprises formelles du pays.
On notera aussi que 99,8% des entreprises selon le RGE-2016 sont des Petites et Moyennes Entreprises. Cela veut dire que seules 0,2% des entreprises recensées sont des grandes entreprises ; c’est-à-dire qu’elles ont un chiffre d’affaires égal ou supérieur à deux milliards et tiennent une comptabilité selon le SYSCOA. Pour cette catégorie environ huit cent entreprises seulement sont concernées.
L’autre élément extrêmement important qui est ressorti de ce premier recensement, est constitué par les contraintes majeures rencontrées par les entreprises. De ce point de vue, les cinq plus grosses contraintes listées par les chefs d’entreprises interrogés tournent autour :
On sait que l’environnement des entreprises sénégalaises est marqué par une forte présence de petites et moyennes Entreprises à caractère informel. Quelles sont les principales mesures pour faciliter l’accompagnement de ce segment d’entreprises ?
Pour rester dans cadre de mes missions de coordonnateur du Système Statistique National et de producteur de statistiques publiques, j’éviterai de rentrer dans le Conseil en m’attardant et rappelant plutôt les leçons tirées du RGE 2016. Enormément de mesures pourraient en découler.
Le Recensement général des Entreprises (RGE) a permis de dénombrer 407 882 unités économiques réparties sur l'ensemble du pays.
Selon vous, vers quoi devrait -on s’orienter aujourd’hui en ce qui concerne l’accompagnement des acteurs ?
Je rappelle que lorsqu’on a interviewé quatre cent mille chefs d’entreprises lors du recensement de 2016, les cinq plus grosses contraintes qu’ils avaient listées tournaient autour de l’insuffisance de la demande, du manque de local adapté, des taxes et impôts élevés, des difficultés d’approvisionnement en matières premières et des difficultés d’accès au crédit.
Personnellement, je pense qu’il faut gagner en économie d’échelle en favorisant les regroupements des très petites entreprises. La fragmentation des offres affaiblit la productivité et fragilise la résilience des très petites entreprises qui dominent notre économie. Aller à l’échelle contribuerait aussi à résoudre les difficultés d’accès aux marchés d’approvisionnement en matières premières mais aussi faciliterait l’accès au crédit.
L’ANSD intervient dans le processus d’immatriculation et d’enregistrement des entreprises (Répertoire national des Entreprises et Associations, Répertoire du centre unique de Collecte de l’Information, gestion unique des entreprises). Pouvez-vous revenir sur le rôle joué par l’Agence ?
Pour améliorer la connaissance des unités économiques, d’une part, et faciliter la gestion et constituer une méthode efficace d'information et d'identification desdites unités d’autre part, il a été décidé, dans le cadre du schéma directeur informatique du Sénégal, d'instituer un système d'immatriculation unique (Numéro d’Identification National des Entreprises et Associations - NINEA) et un répertoire national (Répertoire National des Entreprises et Associations - RNEA) par décret n° 86-1014 du 19 août 1986, qui a été abrogé et remplacé par le décret n° 95-364 du 14 avril 1995. En raison des exigences de cohérence et de suivi qui restent toujours d'actualité, le décret n°95-364 a été à son tour abrogé et remplacé par le décret n° 2012-886 du 27 août 2012.
Sont concernées par cette immatriculation les entreprises exerçant une activité sur le territoire du Sénégal, les associations nationales ou étrangères régulièrement déclarées ou autorisées, les syndicats professionnels, les administrations publiques centrales, les établissements publics, les collectivités locales et les partis politiques.
La gestion du Numéro d’Identification National des Entreprises et Association (NINEA) a été confiée à l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) à travers son Centre National d’Identification (CNI).
Dans l’exercice de cette prérogative, l’ANSD est accompagnée par un Comité de Suivi en charge de la coordination des actions menées par les services et organismes associés à la gestion du RNEA.
Ce comité de suivi a pour tâche d’apprécier le fonctionnement dudit répertoire, de recommander les actions à mener en vue de son amélioration, et enfin, de veiller à la participation effective et à la collaboration efficace de tous les associés. Le Comité des Associés, constitué des structures utilisatrices ou contributrices au NINEA, est chargé de la gestion du RNEA.
Par ailleurs, l’ANSD, à travers le Centre Unique de Collecte de l’Information (CUCI), reçoit et traite les déclarations statistiques et fiscales (DSF) des entreprises du Sénégal. Ces informations sont utilisées à la fois pour :
Conformément aux recommandations des Nations Unies et comme l’exigent nos dispositions législatives sur la périodicité décennale des recensements de la population, notre pays prépare l’organisation de 5e Recensement général de la Population et de l’Habitat, prévu en mai-juin 2023, après celui de 2013. Cette cinquième expérience sera, pour la première fois de l’histoire du Sénégal, réalisée dans ses différentes phases avec des supports de collecte entièrement numériques. A cet égard, elle va nécessiter l’acquisition d’importants équipements informatiques (plus de 30000 tablettes), la mobilisation d’un important parc matériels roulants (plus de 700 véhicules et motos tout terrain) ainsi que le recrutement de 32500 agents de terrain. La prise en charge de l’ensemble de l’opération par le budget général de l’Etat du Sénégal exprime ainsi la volonté des autorités de renforcer l’efficacité de l’action publique, par la mise à disposition d’une information statistique pertinente et à jour.
Le Sénégal a organisé des recensements généraux de population en 1976 (4.997.885 habitants), 1988 (6.896.808 habitants), 2002 (9.858.482) et 2013 (13.508.715 habitants).
Un des objectifs principaux est de dénombrer les personnes qui vivent au Sénégal dans la période des 21 jours du recensement. Le recensement est l’opération la plus complète et exhaustive pour connaitre les caractéristiques socio démographiques d’un pays. En 2013, le RGPHAE avait permis de dénombrer une population de 13 508 715 personnes vivant au Sénégal ; l’âge médian était de 18 ans et 70% de la population avait moins de 30 ans. On décomptait aussi 1.618.363 ménages dont 755.532 ménages agricoles.
Le recensement permet entre autre de dresser la pyramide des âges ; de faire l’état des lieux en matière d’urbanisation, de nuptialité, de natalité, de migrations, d’habitat, de densité de population, d’occupation etc….
L’une des particularités du RGPH-5 est qu’il permettra d’identifier les ménages s’activant autour de l’agriculture, la pêche et l’élevage.
Le Visa statistique a été instauré et pourtant beaucoup de structures font des enquêtes sans le solliciter. Pouvez-vous revenir sur le visa statistique et quelle est la valeur légale de ces enquêtes sans ce visa ?
Tout d’abord, il faut savoir que le visa statistique est aune autorisation préalable, écrite, délivrée sur demande, par le Ministre en charge de la statistique à toute entité désireuse d’entreprendre une enquête statistique ou un recensement ayant une couverture nationale ou touchant au moins une région administrative du pays.
Cette opération statistique doit respecter les normes et méthodes reconnues au niveau international. Le requérant doit déposer un dossier prouvant le respect des normes et indiquant la méthodologie à utiliser.
Qu’est ce qui régit le visa statistique ?
Le Ministre de l’Economie, du Plan et de la Coopération, Ministre en charge de la statistique a signé le 04 mars 2020 l’Arrêté n°007426 du 04 mars 2020 relatif au visa statistique pour les recensements et enquêtes pris en application de l’article 11.-ter de la loi N°2004-2 du 21 juillet 2004 portant organisation des activités statistiques modifiée et complétée par la loi 2012-03 du 03 janvier 2012.
Pourquoi le Visa statistique ? Qu’est ce qui fait son importance ?
Le visa statistique est institué au Sénégal pour garantir la conformité tout en veillant sur la non duplication et le caractère d’intérêt général pour les recensements, enquêtes, études ou recherches entrepris sur le territoire national.
Une structure qui organise une enquête ou recensement sans la délivrance du visa statistique (récépissé), le SSN appose une réserve sur la base de données et tous les outils y relevant.
Toutefois, elle peut à tout moment faire une demande de régularisation auprès de la commission de délivrance du visa statistique.
Quels sont les projets phares de l’ANSD ?
La feuille de route 2023 sera articulée autour de cinq (5) projets phares. Le premier projet phare est bien entendu le 5e recensement général de la population et de l’habitat entièrement financé sur budget de l’Etat du Sénégal. La particularité est que ce recensement sera entièrement digital aussi bien dans sa partie cartographie censitaire que le dénombrement. Même la partie recrutement est cette fois-ci complètement dématérialisée contrairement à 2013 où le recrutement se faisait sur base papier. Il s’agit là d’une importante avancée.
Le deuxième grand projet est le REBASING, c’est-à-dire le changement de base des comptes nationaux dont l’agrégat phare est le Produit intérieur brut (PIB). Ce projet devra aboutir à l’adoption de l’année de base 2021, en remplacement de la base 2014, afin de refléter au mieux la structure actuelle de l’économie et le niveau du PIB ainsi que ses composantes.
Le Sénégal se rapproche ainsi des standards adoptés par les pays les plus avancés en matière de statistique qui mettent à jour leur année de base des comptes nationaux tous les cinq ans.
Il s’agit donc de revoir la structure de notre économie et de réévaluer les richesses produites par l’ensemble des unités résidantes de notre économie, après sept ans parce que la base sur laquelle nous calculons aujourd’hui le PIB date de 2014. La recommandation du système des Nations unies est que les pays opèrent un changement de base tous les cinq (5) ans. Les cinq années sont aujourd’hui dépassées. Il est important de changer la base de production des comptes nationaux pour donner un meilleur reflet de notre économie mais aussi la vraie valeur des agrégats macroéconomiques. Le Pib est l’agrégat sur lequel les comparaisons internationales sont faites pour tous les indicateurs macroéconomiques, mais aussi pour le suivi des normes et des besoins de surveillance et suivi-évaluation de nos performances.
Le troisième grand projet est le Recensement général des Entreprises. Comme je l’ai indiqué plus haut, ce recensement est extrêmement important pour actualiser l’état des difficultés que traversent les entreprises du Sénégal, et tirer les enseignements pour mieux les encadrer. L’Etat a pour rôle, dans l’économie, de créer les conditions favorables au développement des entreprises, lesquelles sont responsables de la création d’emplois dans le pays. L’Etat n’a pas la fonction de créer les emplois, mais il crée les conditions favorables au développement des entreprises. Celles-ci en retour créent les richesses et les emplois et paient les impôts.
Par conséquent, si le SSN n’arrive pas à donner aux décideurs des données et une connaissance fine et précise des tendances, trajectoires des entreprises, il leur sera difficile de créer un environnement macroéconomique incitatif favorable à l’éclosion et l’épanouissement de ces entreprises. Il est donc important de faire ce RGE. Pour rappel lorsqu’on l’a fait pour la première fois en 2016, il avait contribué à la décision de son Excellence le Président de la République, Macky Sall de créer une institution aussi importante que la Délégation générale à l’entreprenariat rapide des femmes et des jeunes (Der/Fj).
Un autre projet, qui est aussi extrêmement important pour nous, est le Fonds de développement de la statistique. L’argent étant le nerf de la guerre, on ne peut pas aujourd’hui produire les données statistiques nécessaires au pilotage de l’économie sans les ressources adéquates à la mesure de nos ambitions déclinées dans le Plan Sénégal Emergent (PSE). On ne peut pas gérer une économie si on n’en connaît pas les tenants et les aboutissants. Il faut mesurer l’économie dans ses aspects ; avant la mise en œuvre des projets , au cours de leur déroulement et bien après pour en connaitre les vrais impacts. Aujourd’hui, le recensement général de la population va déployer plus de 32 mille 500 agents dans le pays avec tout ce qu’il y a comme logistique (véhicules, dossiers, plateformes informatiques à créer, la cartographie censitaire). C’est beaucoup d’argent. Rien que pour les 32 mille 500 agents ce ne sont pas moins de 5 milliards.
L’idéal serait de passer par un mécanisme de financement qui soit pérenne. Le Sénégal ayant adhéré à la Norme Spéciale des Diffusion de Donnée (NSDD) du FMI est tenu aujourd’hui de produire des données infra annuelles. C’est ainsi que depuis 2016 , le Sénégal produit des statistiques trimestrielles sur l’emploi. Il est aussi passé à une publication du PIB trimestriel. C’est pourquoi c’est un projet important.
Le cinquième (5) projet qui aurait pu être également listé comme priorité numéro c’est la transformation digitale. Il s’agit de mettre à contribution les avancées du numérique au service de la production statistique c’est-à-dire mettre le système de la statistique nationale à l’ère du numérique. Je viens de parler des considérations financières, la statistique coûte chère. La digitalisation peut aider à la réduction des coûts en utilisant les technologies de l’information et de la communication qui peuvent permettre les coûts de production. Mais on peut aussi travailler sur la réduction du coût en utilisant les technologies de l’information et de la communication, qui peuvent permettre de réduire les coûts de production. A titre illustratif, il a fallu six (6) ans pour produire les résultats du recensement de 2002 qui était entièrement fait sur papier quand le recensement était effectué. En revanche au dernier recensement de 2013, il n’a fallu que trois mois pour produire les résultats grâce à la digitalisation. On est passé de six (6) ans pour produire les résultats à trois (3) mois. Voilà pourquoi la digitalisation est un axe prioritaire, un projet phare pour mettre non seulement l’ANSD, mais aussi l’ensemble du système statistique national à l’ère du numérique, pour la réduction des coûts, les innovations, la célérité dans la collecte, le traitement des données mais aussi pour la fiabilité.
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Oui. Au Sénégal l’activité de production de statistiques publiques est très bien organisée. La loi 2012-03 du 3 janvier 2012 modifiant et complétant la loi 2004-21 du 21 juillet 2004 portant organisation des activités statistiques définit le Système Statistique National (SSN) précise ses missions et son organisation. Le SSN peut être défini comme « l’ensemble des services et organismes publics et parapublics qui produisent et diffusent des données statistiques ».
Les composantes institutionnelles du SSN sont : le Conseil National de la Statistique(SNS), l’Agence Nationale de la Démographie et de la Statistique (ANSD) et les autres structures publiques du SSN.
Le Conseil National de la Statistique, présidé par le Premier Ministre est chargé de proposer au gouvernement les orientations générales de la politique statistique de la nation.
L’ANSD est une agence nationale d’exécution dotée d’une personnalité morale, d’une autonomie de gestion et d’une indépendance scientifique. Ses missions sont définies dans le décret n°2005-436 du 23 mai 2005 relatif à l’ANSD.
Plus spécifiquement le décret précité lui assigne les tâches suivantes :
- Veiller à l’élaboration et à la mise en œuvre des programmes pluriannuels et annuels d’activités statistiques ;
- Assurer la mise en application des méthodes, concepts, définitions, normes, classifications et nomenclature approuvés par le Comité technique des programmes statistiques ;
- Préparer les dossiers à soumettre aux réunions du Conseil national de la statistique et du Comité technique des programmes statistiques ;
- Assurer le secrétariat et l’organisation des réunions du Conseil national de la statistique et du Comité technique des programmes statistiques ainsi que des sous-comités sectoriels ;
- Réaliser des enquêtes d’inventaires à couverture nationale, notamment les recensements généraux de la population et les recensements d’entreprises ;
- Produire les comptes de la nation ;
- Suivre la conjoncture et la prévision économiques, en rapport avec le service en charge de la prévision et de la conjoncture économique ;
- Elaborer et gérer les fichiers des entreprises et des localités ;
- Elaborer les indicateurs économiques, sociaux et démographiques ;
- Centraliser et diffuser les synthèses des données statistiques produites par l’ensemble du système statistique national ;
- Favoriser le développement des sciences statistiques et la recherche économique appliquée relevant de sa compétence ;
- Promouvoir la formation du personnel spécialisé pour le fonctionnement du système national d’information statistique par l’organisation des cycles de formation appropriés, notamment au sein d’une école à vocation régionale ou sous régionale intégrée à l’agence.
Donc en résumé, on peut dire que l’Agence nationale de la statistique et de la démographique (ANSD) a deux missions fondamentales :
-. Une mission de coordination du système statistique national (CNS), qui est organisé autour du conseil national du statistique présidé par le Premier ministre. Le CNS est assisté par un comité technique des programmes statistiques qui est présidé par le directeur général de l'ANSD.
- Une mission de production de données statistiques sur les comptes nationaux, sur l’inflation, sur la démographie, sur les recensements, pour les besoins du gouvernement, pour les besoins des chercheurs, du secteur privé, des organisations non gouvernementales et d’une manière générale pour le public.
Le système statistique national est, faut-il le rappeler, décentralisé…. Cependant, tous les secteurs producteurs de statistiques publiques ont une obligation de remonter les données produites à l’ANSD qui centralise, s’assure du respect des normes, met en cohérence d’ensemble et diffuse pour répondre aux besoins de l’ensemble des utilisateurs.
Dans vos missions, il y a le suivi de la conjoncture et la prévision économique. Actuellement, quel est l’état de l’économie sénégalaise sous le prisme d’un contexte international instable ?
L’économie mondiale est secouée actuellement par des tensions géopolitiques depuis le début de l’année, notamment avec la crise russo-ukrainienne. Ce conflit a eu comme répercussion, le relèvement de l’inflation et l’assombrissement des perspectives de croissance de l‘économie mondiale. Globalement, les dernières prévisions du FMI du mois d’octobre 2022 tablent sur une croissance de l’activité économique mondiale de 3,2% cette année contre 6,0% en 2021, soit un repli de 2,8 points de pourcentage.
Au plan interne, le Sénégal subit les contrecoups de cette crise et les effets des sanctions de la CEDEAO vis-à-vis du Mali sur le premier semestre de 2022. Toutefois, à la faveur des efforts substantiels consentis par les autorités et des effets attendus des différentes mesures de soutien à l’économie nationale dans le cadre de la mise en œuvre du PAP2A, l’activité économique interne devrait se stabiliser. Une hausse de 4,8% est attendue en 2022 contre 6,1% en 2021. Ce ralentissement est à mettre en liaison avec la décélération de l’activité du secteur secondaire attendu à 1,1% en 2022 contre 10,9% en 2021.
S’agissant de l’inflation, elle a atteint des niveaux records justifiant la prise par les autorités de onze mesures pour endiguer les tensions inflationnistes. Sur les dix premiers mois de 2022, l’inflation mesurée par l’indice national harmonisé des prix à la consommation (INHPC) est ressortie à 8,9%. Ce relèvement du niveau général des prix s’explique essentiellement par le renchérissement des produits alimentaires (+14,1%), notamment, les produits céréaliers, la viande, le poisson, l’huile et beurre et les légumes.
En 2022, la gestion budgétaire est marquée par la poursuite de la relance économique, avec le renforcement des investissements et la progression des subventions, avec un déficit public attendu à 6,3% du PIB.
Pour ce qui concerne les échanges extérieurs, ils pourraient se traduire par une dégradation du déficit du compte courant de 612,5 milliards, passant de 2037,3 milliards à 2649,8 milliards. Quant au solde global de la balance des paiements qui était excédentaire de 142,3 milliards en 2021, il ressortirait en déficit de 88,5 milliards en 2022.
Un deuxième Recensement Général des Entreprises (RGE) entre dans le cadre de vos projets. A ce niveau pouvez-vous nous rappeler les caractéristiques et tendances du premier RGE?
Oui, je confirme que parmi les grands projets que nous entendons démarrer en 2023 figure le deuxième Recensement des Entreprises. Il faut remarquer que depuis l’indépendance de notre pays en 1960, c’est seulement en 2016 que le Sénégal a conduit son premier Recensement général des Entreprises. A la même date, le Sénégal avait déjà organisé avec succès quatre recensements généraux de la population. C’est une excellente chose et c’est aussi dire que le Sénégal connaît bien les dynamiques de sa population, ce qui lui a permis de bien gérer et maitriser des phénomènes comme la mortalité infantile et infanto-juvénile qui ont été réduites de façon significative grâce à la bonne connaissance issue des enquêtes et recensements. Cependant , la connaissance des tendances et trajectoires des entreprises sénégalaises reste le talon d’Achille du Système Statistique. Le Sénégal ne connaît pas fondamentalement les dynamiques de ses entreprises. Or l’entreprise est le lieu de production des richesses. C’est après l’effort de production que toute politique de redistribution, toute politique sociale prend son sens.
Il est donc important qu’un focus soit mis sur les entreprises, pour connaître leurs dynamiques, tendances, potentiel, goulot d’étranglement, etc. De la même façon que l’ANSD fait un monitoring rapproché de la mortalité infantile et juvénile de la population, de la même façon, elle devrait de façon constante, déterminer et suivre les tendances de la mortalité des entreprises. Il est absolument indispensable de connaitre les dynamiques et déterminants de la mortalité des entreprises pour envisager les solutions à mettre en œuvre. De quels types d’entreprises dispose-t-on ? Comment sont–elles réparties spatialement sur le territoire national ? Quelles difficultés traversent-elles ? Quels sont leurs potentiels ? Qu’est-ce qui entrave le potentiel de leur développement ? Voilà des questions pour lesquelles nous nous sentons interpeller pour apporter des réponses précises.
L’ANSD, dans le cadre de recensements et enquêtes pourra répondre à ces questions précises. C’est dans ce cadre et pour anticiper sur la demande, que nous avons choisi parmi nos priorités de l’année 2023 de travailler sur un deuxième recensement général des entreprises, pour ajouter des points de référence et enrichir notre connaissance de l’entreprise.
Pour revenir à la deuxième partie de votre question, sur les enseignements tirés du premier Recensement Général des Entreprises (RGE) du Sénégal, notons que le RGE -2016 avait révélé que 97% des 400 000 entreprises recensées, étaient des entreprises du secteur informel.
Sur les 3% d’entreprises formelles recensées, 80% sont implantées à Dakar, 7,9% à Thiès et 3,3% à St-Louis ; ce qui fait que l’axe Dakar-Thiès-St-Louis polarise plus de 91% des entreprises formelles du pays.
On notera aussi que 99,8% des entreprises selon le RGE-2016 sont des Petites et Moyennes Entreprises. Cela veut dire que seules 0,2% des entreprises recensées sont des grandes entreprises ; c’est-à-dire qu’elles ont un chiffre d’affaires égal ou supérieur à deux milliards et tiennent une comptabilité selon le SYSCOA. Pour cette catégorie environ huit cent entreprises seulement sont concernées.
L’autre élément extrêmement important qui est ressorti de ce premier recensement, est constitué par les contraintes majeures rencontrées par les entreprises. De ce point de vue, les cinq plus grosses contraintes listées par les chefs d’entreprises interrogés tournent autour :
- de l’insuffisance de la demande (24%),
- du manque de local adapté (15%) ;
- des taxes et impôts élevés (13%)
- des difficultés d’approvisionnement en matières premières (10%)
- des difficultés d’accès au crédit (8%).
On sait que l’environnement des entreprises sénégalaises est marqué par une forte présence de petites et moyennes Entreprises à caractère informel. Quelles sont les principales mesures pour faciliter l’accompagnement de ce segment d’entreprises ?
Pour rester dans cadre de mes missions de coordonnateur du Système Statistique National et de producteur de statistiques publiques, j’éviterai de rentrer dans le Conseil en m’attardant et rappelant plutôt les leçons tirées du RGE 2016. Enormément de mesures pourraient en découler.
Le Recensement général des Entreprises (RGE) a permis de dénombrer 407 882 unités économiques réparties sur l'ensemble du pays.
- Cependant, la plupart de ces unités se situent dans les régions de Dakar (39,5%), de Thiès (11,5%), Diourbel (9,4%) et Kaolack (5,9%). Les entreprises individuelles (82,3%) sont les plus représentées et elles évoluent majoritairement dans le secteur informel. S'agissant des personnes morales, les Groupements d'Intérêts économiques (GIE) et les Sociétés à Responsabilité limitée (SARL) dominent avec des proportions respectives de 53,7% et 20,3%.
- Par ailleurs, l'environnement des entreprises sénégalaises est marqué par une forte présence de petites et moyennes Entreprises (99,8%), dont 81,8% sont des entreprenants.
- Concernant la mise en place des entreprises, la plupart sont des créations initiales, les cas d’absorption et de fusion ne représentent que 0,5%.
- Le RGE a dénombré par ailleurs, une part négligeable d'entreprises en arrêt momentané de leurs activités pendant la collecte (0,07%) du fait du manque de fonds (48,8%), de baisse de la vente (16,9%), de l’indisponibilité du personnel (10,2%), du manque de matériels (8,5%)et de l'indisponibilité de local adapté pour exercer leurs activités (5,8%).
- Relativement à la tenue de comptabilité, il ressort une proportion de 15,2% d’entreprises seulement dont 80,3% d’entre elles utilisent des carnets, indiquant la forte présence des unités informelles (97,0%).
- Pour l’actionnariat, les Sénégalais sont largement majoritaires (94,8%). En outre, les entrepreneurs sont relativement jeunes (46 ans en moyenne) et généralement instruits (71,2%). De plus, les hommes sont plus nombreux que les femmes dans l'entreprenariat (68,7% et 31,3% respectivement). En revanche, les femmes entreprennent plus dans les services de restauration (72,8%) et de coiffure et dans le secteur du commerce (38,9%).
- Les résultats font ressortir aussi que les banques financent une faible part d’entreprises, tandis que la famille ou les tontines appuient principalement les entrepreneurs. L’effectif du personnel des unités recensées s’établit à 844 268 travailleurs dont 72,4% de permanents et 66,7% d’hommes.
- La région de Dakar concentre à elle seule 51,7% des employés, alors que partout ailleurs, le niveau de l’emploi est inférieur à 11% du total. La région de Kédougou dispose du plus faible niveau de personnes employées 0,7% relativement aux autres régions. Dans chacune des régions, le nombre d’employés du secteur informel dépasse largement celui du formel.
- Dans l’essentiel des régions, près de 70% du personnel en activité exercent dans l’informel. Pour Dakar et Saint Louis où l’emploi informel est moins représenté, la proportion est respectivement de 48,1% et 77,6%. Ainsi, une faible proportion des travailleurs bénéficie de la protection sociale, 2,6% des unités économiques sont inscrites à l’Institution de Prévoyance Retraite du Sénégal (IPRES) et 2,4% à la Caisse de Sécurité sociale (CSS).
- Les entreprises sénégalaises font face à des difficultés dans l'exercice de leurs activités, en l’occurrence les impôts et taxes élevés et les lourdeurs des procédures et formalités administratives, c’est aussi apparu dans les résultats du recensement.
- Il reste aussi que , les dispositifs d'appui aux entreprises mis en place par les Autorités ne sont pas bien connus par les entrepreneurs. Les plus fréquents sont les Chambres de commerce (17,5%), les Chambres de métiers (11,2%) et le Guichet unique de l'APIX (8,2%).
Selon vous, vers quoi devrait -on s’orienter aujourd’hui en ce qui concerne l’accompagnement des acteurs ?
Je rappelle que lorsqu’on a interviewé quatre cent mille chefs d’entreprises lors du recensement de 2016, les cinq plus grosses contraintes qu’ils avaient listées tournaient autour de l’insuffisance de la demande, du manque de local adapté, des taxes et impôts élevés, des difficultés d’approvisionnement en matières premières et des difficultés d’accès au crédit.
Personnellement, je pense qu’il faut gagner en économie d’échelle en favorisant les regroupements des très petites entreprises. La fragmentation des offres affaiblit la productivité et fragilise la résilience des très petites entreprises qui dominent notre économie. Aller à l’échelle contribuerait aussi à résoudre les difficultés d’accès aux marchés d’approvisionnement en matières premières mais aussi faciliterait l’accès au crédit.
L’ANSD intervient dans le processus d’immatriculation et d’enregistrement des entreprises (Répertoire national des Entreprises et Associations, Répertoire du centre unique de Collecte de l’Information, gestion unique des entreprises). Pouvez-vous revenir sur le rôle joué par l’Agence ?
Pour améliorer la connaissance des unités économiques, d’une part, et faciliter la gestion et constituer une méthode efficace d'information et d'identification desdites unités d’autre part, il a été décidé, dans le cadre du schéma directeur informatique du Sénégal, d'instituer un système d'immatriculation unique (Numéro d’Identification National des Entreprises et Associations - NINEA) et un répertoire national (Répertoire National des Entreprises et Associations - RNEA) par décret n° 86-1014 du 19 août 1986, qui a été abrogé et remplacé par le décret n° 95-364 du 14 avril 1995. En raison des exigences de cohérence et de suivi qui restent toujours d'actualité, le décret n°95-364 a été à son tour abrogé et remplacé par le décret n° 2012-886 du 27 août 2012.
Sont concernées par cette immatriculation les entreprises exerçant une activité sur le territoire du Sénégal, les associations nationales ou étrangères régulièrement déclarées ou autorisées, les syndicats professionnels, les administrations publiques centrales, les établissements publics, les collectivités locales et les partis politiques.
La gestion du Numéro d’Identification National des Entreprises et Association (NINEA) a été confiée à l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) à travers son Centre National d’Identification (CNI).
Dans l’exercice de cette prérogative, l’ANSD est accompagnée par un Comité de Suivi en charge de la coordination des actions menées par les services et organismes associés à la gestion du RNEA.
Ce comité de suivi a pour tâche d’apprécier le fonctionnement dudit répertoire, de recommander les actions à mener en vue de son amélioration, et enfin, de veiller à la participation effective et à la collaboration efficace de tous les associés. Le Comité des Associés, constitué des structures utilisatrices ou contributrices au NINEA, est chargé de la gestion du RNEA.
Par ailleurs, l’ANSD, à travers le Centre Unique de Collecte de l’Information (CUCI), reçoit et traite les déclarations statistiques et fiscales (DSF) des entreprises du Sénégal. Ces informations sont utilisées à la fois pour :
- la comptabilité nationale (calcul des indicateurs macroéconomiques, séquence des comptes des sociétés et quasi-sociétés non financières) ;
- la centralisation des états financiers des entreprises en informations comptables et financières pertinentes et sûres ;
- production de la Banque de Données Economiques et Financières (BDEF) ;
- l'information des entreprises elles-mêmes et de leurs partenaires économiques et sociaux ;
Conformément aux recommandations des Nations Unies et comme l’exigent nos dispositions législatives sur la périodicité décennale des recensements de la population, notre pays prépare l’organisation de 5e Recensement général de la Population et de l’Habitat, prévu en mai-juin 2023, après celui de 2013. Cette cinquième expérience sera, pour la première fois de l’histoire du Sénégal, réalisée dans ses différentes phases avec des supports de collecte entièrement numériques. A cet égard, elle va nécessiter l’acquisition d’importants équipements informatiques (plus de 30000 tablettes), la mobilisation d’un important parc matériels roulants (plus de 700 véhicules et motos tout terrain) ainsi que le recrutement de 32500 agents de terrain. La prise en charge de l’ensemble de l’opération par le budget général de l’Etat du Sénégal exprime ainsi la volonté des autorités de renforcer l’efficacité de l’action publique, par la mise à disposition d’une information statistique pertinente et à jour.
Le Sénégal a organisé des recensements généraux de population en 1976 (4.997.885 habitants), 1988 (6.896.808 habitants), 2002 (9.858.482) et 2013 (13.508.715 habitants).
Un des objectifs principaux est de dénombrer les personnes qui vivent au Sénégal dans la période des 21 jours du recensement. Le recensement est l’opération la plus complète et exhaustive pour connaitre les caractéristiques socio démographiques d’un pays. En 2013, le RGPHAE avait permis de dénombrer une population de 13 508 715 personnes vivant au Sénégal ; l’âge médian était de 18 ans et 70% de la population avait moins de 30 ans. On décomptait aussi 1.618.363 ménages dont 755.532 ménages agricoles.
Le recensement permet entre autre de dresser la pyramide des âges ; de faire l’état des lieux en matière d’urbanisation, de nuptialité, de natalité, de migrations, d’habitat, de densité de population, d’occupation etc….
L’une des particularités du RGPH-5 est qu’il permettra d’identifier les ménages s’activant autour de l’agriculture, la pêche et l’élevage.
Le Visa statistique a été instauré et pourtant beaucoup de structures font des enquêtes sans le solliciter. Pouvez-vous revenir sur le visa statistique et quelle est la valeur légale de ces enquêtes sans ce visa ?
Tout d’abord, il faut savoir que le visa statistique est aune autorisation préalable, écrite, délivrée sur demande, par le Ministre en charge de la statistique à toute entité désireuse d’entreprendre une enquête statistique ou un recensement ayant une couverture nationale ou touchant au moins une région administrative du pays.
Cette opération statistique doit respecter les normes et méthodes reconnues au niveau international. Le requérant doit déposer un dossier prouvant le respect des normes et indiquant la méthodologie à utiliser.
Qu’est ce qui régit le visa statistique ?
Le Ministre de l’Economie, du Plan et de la Coopération, Ministre en charge de la statistique a signé le 04 mars 2020 l’Arrêté n°007426 du 04 mars 2020 relatif au visa statistique pour les recensements et enquêtes pris en application de l’article 11.-ter de la loi N°2004-2 du 21 juillet 2004 portant organisation des activités statistiques modifiée et complétée par la loi 2012-03 du 03 janvier 2012.
Pourquoi le Visa statistique ? Qu’est ce qui fait son importance ?
Le visa statistique est institué au Sénégal pour garantir la conformité tout en veillant sur la non duplication et le caractère d’intérêt général pour les recensements, enquêtes, études ou recherches entrepris sur le territoire national.
Une structure qui organise une enquête ou recensement sans la délivrance du visa statistique (récépissé), le SSN appose une réserve sur la base de données et tous les outils y relevant.
Toutefois, elle peut à tout moment faire une demande de régularisation auprès de la commission de délivrance du visa statistique.
Quels sont les projets phares de l’ANSD ?
La feuille de route 2023 sera articulée autour de cinq (5) projets phares. Le premier projet phare est bien entendu le 5e recensement général de la population et de l’habitat entièrement financé sur budget de l’Etat du Sénégal. La particularité est que ce recensement sera entièrement digital aussi bien dans sa partie cartographie censitaire que le dénombrement. Même la partie recrutement est cette fois-ci complètement dématérialisée contrairement à 2013 où le recrutement se faisait sur base papier. Il s’agit là d’une importante avancée.
Le deuxième grand projet est le REBASING, c’est-à-dire le changement de base des comptes nationaux dont l’agrégat phare est le Produit intérieur brut (PIB). Ce projet devra aboutir à l’adoption de l’année de base 2021, en remplacement de la base 2014, afin de refléter au mieux la structure actuelle de l’économie et le niveau du PIB ainsi que ses composantes.
Le Sénégal se rapproche ainsi des standards adoptés par les pays les plus avancés en matière de statistique qui mettent à jour leur année de base des comptes nationaux tous les cinq ans.
Il s’agit donc de revoir la structure de notre économie et de réévaluer les richesses produites par l’ensemble des unités résidantes de notre économie, après sept ans parce que la base sur laquelle nous calculons aujourd’hui le PIB date de 2014. La recommandation du système des Nations unies est que les pays opèrent un changement de base tous les cinq (5) ans. Les cinq années sont aujourd’hui dépassées. Il est important de changer la base de production des comptes nationaux pour donner un meilleur reflet de notre économie mais aussi la vraie valeur des agrégats macroéconomiques. Le Pib est l’agrégat sur lequel les comparaisons internationales sont faites pour tous les indicateurs macroéconomiques, mais aussi pour le suivi des normes et des besoins de surveillance et suivi-évaluation de nos performances.
Le troisième grand projet est le Recensement général des Entreprises. Comme je l’ai indiqué plus haut, ce recensement est extrêmement important pour actualiser l’état des difficultés que traversent les entreprises du Sénégal, et tirer les enseignements pour mieux les encadrer. L’Etat a pour rôle, dans l’économie, de créer les conditions favorables au développement des entreprises, lesquelles sont responsables de la création d’emplois dans le pays. L’Etat n’a pas la fonction de créer les emplois, mais il crée les conditions favorables au développement des entreprises. Celles-ci en retour créent les richesses et les emplois et paient les impôts.
Par conséquent, si le SSN n’arrive pas à donner aux décideurs des données et une connaissance fine et précise des tendances, trajectoires des entreprises, il leur sera difficile de créer un environnement macroéconomique incitatif favorable à l’éclosion et l’épanouissement de ces entreprises. Il est donc important de faire ce RGE. Pour rappel lorsqu’on l’a fait pour la première fois en 2016, il avait contribué à la décision de son Excellence le Président de la République, Macky Sall de créer une institution aussi importante que la Délégation générale à l’entreprenariat rapide des femmes et des jeunes (Der/Fj).
Un autre projet, qui est aussi extrêmement important pour nous, est le Fonds de développement de la statistique. L’argent étant le nerf de la guerre, on ne peut pas aujourd’hui produire les données statistiques nécessaires au pilotage de l’économie sans les ressources adéquates à la mesure de nos ambitions déclinées dans le Plan Sénégal Emergent (PSE). On ne peut pas gérer une économie si on n’en connaît pas les tenants et les aboutissants. Il faut mesurer l’économie dans ses aspects ; avant la mise en œuvre des projets , au cours de leur déroulement et bien après pour en connaitre les vrais impacts. Aujourd’hui, le recensement général de la population va déployer plus de 32 mille 500 agents dans le pays avec tout ce qu’il y a comme logistique (véhicules, dossiers, plateformes informatiques à créer, la cartographie censitaire). C’est beaucoup d’argent. Rien que pour les 32 mille 500 agents ce ne sont pas moins de 5 milliards.
L’idéal serait de passer par un mécanisme de financement qui soit pérenne. Le Sénégal ayant adhéré à la Norme Spéciale des Diffusion de Donnée (NSDD) du FMI est tenu aujourd’hui de produire des données infra annuelles. C’est ainsi que depuis 2016 , le Sénégal produit des statistiques trimestrielles sur l’emploi. Il est aussi passé à une publication du PIB trimestriel. C’est pourquoi c’est un projet important.
Le cinquième (5) projet qui aurait pu être également listé comme priorité numéro c’est la transformation digitale. Il s’agit de mettre à contribution les avancées du numérique au service de la production statistique c’est-à-dire mettre le système de la statistique nationale à l’ère du numérique. Je viens de parler des considérations financières, la statistique coûte chère. La digitalisation peut aider à la réduction des coûts en utilisant les technologies de l’information et de la communication qui peuvent permettre les coûts de production. Mais on peut aussi travailler sur la réduction du coût en utilisant les technologies de l’information et de la communication, qui peuvent permettre de réduire les coûts de production. A titre illustratif, il a fallu six (6) ans pour produire les résultats du recensement de 2002 qui était entièrement fait sur papier quand le recensement était effectué. En revanche au dernier recensement de 2013, il n’a fallu que trois mois pour produire les résultats grâce à la digitalisation. On est passé de six (6) ans pour produire les résultats à trois (3) mois. Voilà pourquoi la digitalisation est un axe prioritaire, un projet phare pour mettre non seulement l’ANSD, mais aussi l’ensemble du système statistique national à l’ère du numérique, pour la réduction des coûts, les innovations, la célérité dans la collecte, le traitement des données mais aussi pour la fiabilité.
Lejecos Magazine