- Fondamentalement, qu’est-ce qui différencie la notation en monnaie locale de celle en devises et quelle est la pertinence d’une telle option ?
La notation en devises évalue la capacité d’un pays à faire face à ses obligations, mais quand vous êtes un pays pauvre, en général nous avons des pays rentiers qui vendent leurs matières premières, ils collectent ainsi des devises mais les utilisent pour acheter des produits finis, qui coûtent plus cher que les matières premières dont ils sont issus.
Ils ont donc besoin de devises faibles, alors que la capacité de payer à l’extérieur va dépendre de leur niveau de réserves en devises. Par ailleurs, les gens ont tendance à mal comprendre l’arrimage du CFA à l’Euro. Cet arrimage a l’avantage d’éviter les risques de change, mais le CFA n’en est pas pour autant l’Euro. Pour rembourser en Euro, il faut avoir des Euros. Donc plus votre réserve de devises est faible, plus vous réduisez votre capacité à rembourser en devises étrangères. C’est pourquoi nous encourageons les pays africains à emprunter dans leur propre monnaie car en monnaie locale, vous n’avez pas ces contraintes. Vous empruntez en CFA vous remboursez en CFA, pas besoin de niveau de réserves, pas de livit. D’autant plus qu’en devises étrangères, il y a ce que l’on appelle un plafond souverain. C’est la note de la Banque centrale qui gère les réserves et la politique de transfert des devises. La limite c’est donc la note de la Banque Centrale, alors qu’en monnaie locale vous n’avez pas ce plafond. Le pays peut être ‘A’ alors qu’une entité dans le pays est ‘AAA’ ‘AA’. On a là une vraie discrimination de la qualité de crédit des entités dans un espace économique et monétaire sans qu’il y ait un cap conditionné par des réserves, entre autres.
Qu’est-ce qui garantit la fiabilité de la notation des agences quand on sait que, celles-ci seraient par exemple à l’origine de la crise des subprimes aux USA pour avoir bien noté des actifs qui se sont révélés toxiques ?
En réalité dans cet exemple, les agences n’ont pas noté des actifs toxiques. Il y a eu ce qu’on appelle dans notre jargon l’effet « granulaire ». Vous avez un véhicule dans lequel il y a plusieurs actifs qui combinent actifs sains et actifs malsains et en fonction de la situation du marché, les actifs malsains sont susceptibles d’ « empoisonner » les actifs sains. J’ai souvent donné l’exemple d’un tsunami qui survient et rase un hôtel qui, auparavant, était noté ‘AAA’ et qui voit ainsi son outil de production disparaître. A partir de ce moment, il est évident qu’il ne peut plus faire face à ses obligations financières, mais ce n’est pas pour autant que sa note va être dégradée, d’autant que la notation de l’agence est tout à fait correcte. C’est cela qui s’est passé. Cependant, je rejoins la critique vis-à-vis des agences de notation au niveau de l’évolution des véhicules, qui sont de plus en plus sophistiqués, alors qu’à un moment donné, les agences étaient plus ou moins larguées et ont quand même conservé leur système de notation. C’est ce que nous, nous voulons éviter car aujourd’hui, les agences internationales de notation sont devenues tellement frileuses qu’elles sont susceptibles de faire des dégradations « émotives », dès qu’il y a, par exemple, un coup d’Etat , on dégrade.
Ils ont donc besoin de devises faibles, alors que la capacité de payer à l’extérieur va dépendre de leur niveau de réserves en devises. Par ailleurs, les gens ont tendance à mal comprendre l’arrimage du CFA à l’Euro. Cet arrimage a l’avantage d’éviter les risques de change, mais le CFA n’en est pas pour autant l’Euro. Pour rembourser en Euro, il faut avoir des Euros. Donc plus votre réserve de devises est faible, plus vous réduisez votre capacité à rembourser en devises étrangères. C’est pourquoi nous encourageons les pays africains à emprunter dans leur propre monnaie car en monnaie locale, vous n’avez pas ces contraintes. Vous empruntez en CFA vous remboursez en CFA, pas besoin de niveau de réserves, pas de livit. D’autant plus qu’en devises étrangères, il y a ce que l’on appelle un plafond souverain. C’est la note de la Banque centrale qui gère les réserves et la politique de transfert des devises. La limite c’est donc la note de la Banque Centrale, alors qu’en monnaie locale vous n’avez pas ce plafond. Le pays peut être ‘A’ alors qu’une entité dans le pays est ‘AAA’ ‘AA’. On a là une vraie discrimination de la qualité de crédit des entités dans un espace économique et monétaire sans qu’il y ait un cap conditionné par des réserves, entre autres.
Qu’est-ce qui garantit la fiabilité de la notation des agences quand on sait que, celles-ci seraient par exemple à l’origine de la crise des subprimes aux USA pour avoir bien noté des actifs qui se sont révélés toxiques ?
En réalité dans cet exemple, les agences n’ont pas noté des actifs toxiques. Il y a eu ce qu’on appelle dans notre jargon l’effet « granulaire ». Vous avez un véhicule dans lequel il y a plusieurs actifs qui combinent actifs sains et actifs malsains et en fonction de la situation du marché, les actifs malsains sont susceptibles d’ « empoisonner » les actifs sains. J’ai souvent donné l’exemple d’un tsunami qui survient et rase un hôtel qui, auparavant, était noté ‘AAA’ et qui voit ainsi son outil de production disparaître. A partir de ce moment, il est évident qu’il ne peut plus faire face à ses obligations financières, mais ce n’est pas pour autant que sa note va être dégradée, d’autant que la notation de l’agence est tout à fait correcte. C’est cela qui s’est passé. Cependant, je rejoins la critique vis-à-vis des agences de notation au niveau de l’évolution des véhicules, qui sont de plus en plus sophistiqués, alors qu’à un moment donné, les agences étaient plus ou moins larguées et ont quand même conservé leur système de notation. C’est ce que nous, nous voulons éviter car aujourd’hui, les agences internationales de notation sont devenues tellement frileuses qu’elles sont susceptibles de faire des dégradations « émotives », dès qu’il y a, par exemple, un coup d’Etat , on dégrade.
- Parlons du cas du Sénégal dont la notation a été dégradée, quel est votre avis ?
Aujourd’hui, nous, nous sommes en train de réévaluer la situation du Sénégal et nous n’avons pas dégradé, du moins pour l’instant car nous attendons ce que j’appellerais les « bons chiffres » conformément aux déclarations du Premier ministre sénégalais. La notation de Bloomfield a donc été suspendue en attendant d’y voir plus clair…
- L'agence Moody's, par exemple, a abaissé la note du Sénégal…
Oui, chaque agence prend ses responsabilités et eux se sont peut-être basés sur la situation qui ressemblait à un cafouillage pour abaisser la note, en se disant que pour l’instant, il n’y a encore aucune preuve que les chiffres ne sont pas bons.
- Est-il vrai qu’en matière de titrisation, les agences de notation titrise des crédits tout en étant partie prenante et donc en situation de conflit d’intérêt ?
Non, les agences de notation financière ne sont pas partie prenante dans une opération de titrisation.
En réalité, ce qui se passe dans une titrisation, le processus de notation est différent du processus classique où on évalue les paramètres quantitatifs et qualitatifs pour sortir une note. Dans le cas d’une titrisation, le gérant du véhicule peut solliciter la plus forte note sur celui-ci. L’agence peut alors lui faire une évaluation en stand alone (qualifie la valeur d’une action analysée comme une simple opportunité d’investissement parmi d’autres), et lui présente les sécurités et garanties à mettre en place pour obtenir une note supérieure.
Lejecos Magazine
En réalité, ce qui se passe dans une titrisation, le processus de notation est différent du processus classique où on évalue les paramètres quantitatifs et qualitatifs pour sortir une note. Dans le cas d’une titrisation, le gérant du véhicule peut solliciter la plus forte note sur celui-ci. L’agence peut alors lui faire une évaluation en stand alone (qualifie la valeur d’une action analysée comme une simple opportunité d’investissement parmi d’autres), et lui présente les sécurités et garanties à mettre en place pour obtenir une note supérieure.
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