- Dans le cadre du programme d’émission des Etats de la zone UEMOA au titre de l’année 2021, un accent particulier a été mis sur l’objectif de rallongement de la dette levée sur le Marché des Titres Publics (MTP). Qu’est ce qui justifie cette décision ?
La pandémie de la COVID-19 a il est vrai, mis à rude épreuve les économies des Etats de l’UEMOA, et cela s’est manifesté par une accentuation des déficits publics. A cet effet, les États de l’Union ont élaboré des stratégies de relance afin de redynamiser leurs économies. La mise en œuvre de ces plans de relance requiert d’importantes ressources financières sur le moyen et long terme. C’est dans cette optique que les Etats de l’Union ont décidé d’émettre des Obligations de Relance (OdR) portant sur des maturités longues pour financer la nécessaire relance des économies. Mieux, cette volonté des Etats d’émettre sur les maturités longues, a été concrétisée par UMOA-Titres, avec l’inauguration par six (6) Etats sur huit (8), d’un nouveau point sur la courbe des taux (le 10 ans in fine). C’est bien entendu le lieu de rappeler les mesures d’accompagnement de la BCEAO avec la mise en place du guichet spécial dit « guichet de la Relance » sur lequel les banques peuvent se refinancer au taux minimum de soumission de la Banque Centrale (actuellement 2%) pour une durée de six (6) mois renouvelable et ceci, sur toute la durée de vie des OdR.
- Monsieur le Directeur, quel bilan faites-vous des émissions de titres publics des Etats membres de l’UEMOA au titre du 1er trimestre 2021 ?
Pour l’année 2021, les résultats sur le premier trimestre restent en adéquation avec nos attentes. En effet, avec l’appui de UMOA-Titres, les Etats membres ont mis en place un programme d’émission sous la forme d’Obligations de Relance (OdR) pour accompagner la relance de leurs économies. Cette activité a été fortement soutenue par la BCEAO, qui a mis en place un guichet spécial pour refinancer les Obligations Assimilables du Trésor (OAT) émises pour cette année.
L’exécution de ce programme a ainsi permis aux Etats membres de mobiliser 1 577,10 milliards de FCFA dont près de 64% sur les OAT. Cette enveloppe est en hausse d’environ 19% par rapport au niveau enregistré en glissement annuel à fin mars 2020 (1 330 milliards de FCFA).
Tableau récapitulatif du volume levé par émetteur au 1er Trimestre 2021 Emetteur | Montant total mobilisé (en milliards de FCFA) |
Bénin | 82,50 |
Burkina | 164,98 |
Côte d'Ivoire | 477,72 |
Guinée-Bissau | 28,60 |
Mali | 258,30 |
Niger | 121 |
Sénégal | 244,51 |
Togo | 199,50 |
UMOA | 1 577,10 |
Source : UMOA-Titres - Pouvons-nous en déduire que la pandémie n’a-pas affecté le Marché des Titres Publics (MTP) ?
Avec la mise en place des mesures d’accompagnement de la BCEAO à travers les guichets pour les Bons Social COVID-19 et les OdR, UMOA-Titres a organisé des rencontres avec les investisseurs du MTP pour les mobiliser sur les émissions de titres publics. Celles de 2020 sont ressorties avec un taux de couverture globale de 227% et celles de 2021, avec un taux de couverture de 232% à fin mars. Nous pouvons donc affirmer que le Marché des Titres Publics semble plutôt bien résister aux chocs liés à la pandémie. Cette résilience du MTP face à cette crise, peut s’expliquer en outre, par l’appétit des investisseurs en période de crise pour les titres d’Etat qui représentent une valeur refuge.
- La dynamisation du marché secondaire a toujours été l’une de vos préoccupations majeures, où en êtes-vous aujourd’hui ? Et qu’en est-il de l’élargissement de la base des investisseurs qui vous tient à cœur ?
Depuis 2018, le marché secondaire est dans une bonne dynamique avec des volumes échangés de 801,74 milliards de F CFA en 2018 à près de 2 507 milliards de F CFA en 2020 soit une évolution de 213%. Par ailleurs, il faut souligner que nous travaillons sur la mise en place d’une plateforme de cotation du Marché des Titres Publics, afin de faciliter, mais surtout d’ accroitre les transactions sur le marché secondaire. Mieux, pour remédier à l’asymétrie d’information, une synthèse hebdomadaire des activités sur le marché secondaire à l’endroit de tous les acteurs a également été mise en place. Elle est diffusée à fréquence régulière sur le site web de UMOA-Titres (www.umoatitres.org).
La concentration de la détention des titres publics du MTP au niveau des banques de l’Union est une préoccupation majeure. À ce titre, l’élargissement de la base des investisseurs, est important pour le développement de ce marché. L’une des avancées majeures dans ce domaine, est la mise en place du projet de connectivité des Société de Gestion et d’Intermédiation (SGI) à la plateforme SAGETIL-UEMOA. A ce jour, une SGI participe d’ores et déjà aux opérations d’adjudications. Il faut ajouter à cela que plusieurs démarches et rencontres ont été entreprises avec les institutionnels de l’Union notamment les Caisses de Dépôt et de Consignation, les Caisses de retraite, les compagnies d’assurances et SGI afin de booster leurs participations aux adjudications.
- Outre votre rôle d’animateur du MTP, vous accompagnez les Etats de l’Union depuis l’élaboration de leurs stratégies d’endettement aux opérations de levée de fonds. Ne craignez-vous pas une concurrence avec le secteur financier privé ?
Les missions de UMOA-Titres ont été clairement définies notamment celle d’accompagner les huit (8) Etats membres de la zone UEMOA, qui aujourd’hui est parfaitement réglementée. Ainsi, le positionnement de UMOA-Titres en tant qu’Institution assurant l’impulsion nécessaire pour le fonctionnement optimal du Marché régional des Titres Publics (MTP), au service du développement des Etats membres de l’UMOA, ne lui permet pas de se faire concurrencer ni de faire de l’ombre au secteur financier privé. Ce dernier composé de diverses institutions financières, est un partenaire avec qui UMOA-Titres travaille pour l’atteinte des objectifs de financement des Etats de l’Union et de développement du MTP.
- Monsieur le Directeur, le digital est un levier important pour accroitre l’inclusion financière. Comment rendre plus accessible l’accès au Marché des Titres Publics par ce canal ? Comment UMOA-Titres compte y parvenir ?
Il est important de rappeler que l’une des principales missions de UMOA-Titres (UT) est d’organiser les émissions de levée de la dette pour les Etats membres de la zone UEMOA. A ce titre, UT met en œuvre tout son dispositif pour faciliter la participation des intermédiaires de marché habilités (banques et SGI) aux adjudications. Pour cela, avec l’appui de la BCEAO, nous avons une plateforme dématérialisée qui permet les soumissions des acteurs à travers le logiciel SAGETIL-UMOA. Il s’y ajoute que les divers documents nécessaires aux adjudications (Avis d’appels d’offre, note de pré-émission, compte rendu, etc.) sont dématérialisés et diffusés auprès des acteurs du marché par mailing et sur le site web de UMOA-Titres.
Quant à votre deuxième question qui se rapporte à l’inclusion financière et à la participation d’autres acteurs hormis les intermédiaires de marché habilités, cela est avant tout du ressort des intermédiaires de marché, d’offrir les meilleures conditions d’accès à leurs clientèles (personnes physiques et morales, compagnies d’assurance, caisse de retraite, etc.). A ce niveau, nous les exhortons à développer toutes les synergies possibles avec les opérateurs de monnaie électronique, pour offrir un niveau élevé de qualité de service aux clients. Bien entendu, UMOA-Titres ne ménagera aucun effort pour accompagner cette transition nécessaire vers le digital.
- Les perspectives du MTP pour le prochain semestre 2021 ?
Il s’agira d’abord, d’œuvrer à satisfaire les besoins des Etats sur le MTP. Ensuite, poursuivre les efforts d’élargissement et de diversification de la base des investisseurs. Enfin, mener les projets visant à renforcer la transparence et la qualité de l’information, de même que la dynamisation du marché secondaire, sans oublier les actions de renforcement de capacités des acteurs du marché.
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