Ces qualités du marché se traduisent par le fait depuis 2010, que les primes dommages sont passées de 68 à plus de 131 milliards en 2020, doublant quasiment, tandis que les primes vie sont passées de 20 à près de 73 milliards, faisant plus que tripler en 10 ans ; un tel dynamisme explique peut-être l’attrait exercé sur les investisseurs étrangers et traduit, à l’échelle du secteur des assurances, la stratégie d’attraction des capitaux extérieurs.
L’assurance a, dans l’ensemble, bien résisté dans cet environnement dominé par le COVID en 2020 : on a en effet enregistré un léger tassement en IARD, de 5% en 2019 à 4% en 2020 et un recul plus marqué de la croissance en vie, qui est passé de 13% à 4%. Mais la croissance du marché s’est poursuivie en 2020, malgré le COVID, puisqu’on est passé de 193 milliards en 2019 à 204 milliards de FCFA en 2020. Mais n’eut été la prime exceptionnelle enregistrée dans le pétrole, on aurait eu une décroissance.
Cette résilience du marché des assurances face au COVID se retrouve également en Côte d’Ivoire, le plus grand marché de la CIMA, l’organisation commune des pays d'Afrique noire francophone partageant les mêmes normes d’assurances : les affaires y croissent de 391 à 415 Milliards de FCFA entre 2019 et 2020 (+6,1%) avec, comme au Sénégal, un dynamisme supérieur des souscriptions vie (+6,9%) par rapport aux primes dommages (+4%).
La même résilience ne se retrouve pas au Cameroun et est beaucoup moins marquée au Gabon, puisque, dans ces deux plus grands marchés d’Afrique Centrale au sein de la CIMA, les primes passent à 210 et 100 milliards de fcfa respectivement, en 2019 à 207 et 104 milliards de fcfa en 2020, soit une décroissance de -1,4% au Cameroun et une quasi-tassement de 4% au Gabon. Il est vrai que ces pays d’Afrique centrale subissaient depuis quelques années une conjoncture défavorable des prix de leurs produits d’exportation, conjoncture qui a bridé leurs ressources face au nouveau choc extérieur provoqué par le COVID.
Il est vrai aussi que, sur le plan régional les autorités de l’Union Economique et Monétaire de l’Afrique de l’Ouest (UEMOA), ainsi que celles de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) ont réagi rapidement, notamment en suspendant l’application des critères de convergence et en mettant de fortes liquidités à la disposition des Etats et des économies.
Sur le plan interne, pour éviter que l’effet du COVID se solde par une récession, le Sénégal a mis en place un Plan de Résilience Économique et Sociale (PRES) de 1000 Milliards de Fcfa, soit 25% du budget et 10% du PIB. Ce plan avait pour objet de soutenir les entreprises (84%), les ménages (9%), le système sanitaire (6%) et la diaspora (1%).
La riposte sanitaire, précoce vigoureuse et participative, a permis au Sénégal de contenir la manifestation de la pandémie et le système de veille mis en place a même été internationalement reconnu comme l’une des meilleures réponses à la pandémie. Cette réaction n’est pas sans rappeler la réponse très appréciée que le Sénégal avait apportée à l’apparition du sida.
Mais, dans la période allant de mars à juillet 2020, en freinant les échanges interrégionaux et en fermant les frontières et les établissements scolaires, ces politiques ont mis en veilleuse des pans entiers de l’économie, notamment l’hôtellerie et la restauration, les transports terrestres, aériens et touristiques, la pêche, le commerce, les services, l’industrie. Car, d’après certaines sources participant au mécanisme d’encadrement, une entreprise sur deux prévoyait une baisse de ses activités de plus de 75%.
De ce fait, la croissance de l'économie sénégalaise, supérieure à 5% depuis 6 ans, a été fortement réduite par la crise sanitaire. En 2020, elle est estimée par le FMI à -0,7%, affectant beaucoup le secteur informel mais selon le ministre de l’Economie , du Plan et de la Coopération Amadou Hott dans sa communication du 10 mars en conseil des ministres, le taux de croissance 2020 est arrêté à 1,5% contre -0,7% initialement prévu par le PAP2A, une performance, évitant à notre pays la récession constatée dans plusieurs pays. Toutefois, cette crise a freiné les projets pétroliers et gaziers en cours.
La croissance paradoxale du secteur des assurances dans ce contexte s’explique d’abord par le fait que le renouvellement des contrats des entreprises formelles, s’opérant classiquement au 1er janvier, une bonne partie du portefeuille était déjà en place avant le 1er mars, date de signalement du 1er cas de COVID au Sénégal. Elle s’explique ensuite par le relâchement des barrières au courant du 2ème semestre autorisant des anticipations optimistes de 5,2% de reprise pour l’exercice 2021 ; elle s’explique enfin par le concours déterminant des influenceurs sociaux, l’adaptation de certains secteurs à la crise, et l’observation d’une sorte de patriotisme d’entreprise mobilisant positivement les énergies pour redoubler d’efficacité, dans le télétravail et dans la “distanciation”.
On peut relever que si, au Sénégal, en 2020, le secteur des assurances dans son ensemble a réagi à contre-courant de l’économie globale, cette réponse est à différencier selon les secteurs et les entreprises, leurs portefeuilles et les politiques commerciales.
Ce marché comprend 19 sociétés d’assurance non-vie dont 10 sénégalaises et 9 sociétés vie, dont 2 sénégalaises. Les sociétés étrangères, du point de vue de l’origine de leurs capitaux, pèsent ensemble, en termes de chiffres d’affaires, les 2/3 du marché 2020 : 64% des affaires dommages et 70% des affaires vie. Elles constituent donc la part la plus importante d’un marché qui reste dominé par l’assurance dommage, avec 63% des primes.
Outre les deux européennes présentes depuis de longues décennies et gardant leurs places de premier plan sur le marché, nous avons vu arriver une ou deux sociétés ivoiriennes, une luxembourgeoise, une camerounaise, une marocaine, une sud-africaine, en plus d’une neuvième société étrangère, originellement saoudienne. Et chacune des sociétés étrangères dommages dispose d’une filiale vie, sauf Salama et AXA, tandis qu’une seule la SONAM, société sénégalaise la plus ancienne, dispose au sein de son groupe de sociétés vie et non vie.
Répétons-le : le marché des assurances sénégalais a augmenté de près de 6%, pendant que l’économie se tassait de -O,7% en 2020 selon le FMI.
DES SOCIÉTÉS ÉTRANGÈRES PLUS PERFORMANTES EN IARD QU’EN VIE ...
En ce qui concerne les sociétés étrangères, leur chiffre d’affaires cumulé en dommages ressort à 84,2 milliards en 2020, contre 81,2 milliards en 2019, enregistrant une progression moyenne de 3,7%. En vie, leurs souscriptions passent de 45,9 milliards en 2018, à 51,6 milliards en 2019 et 50,7 milliards en 2020. Au total en 2020, les sociétés étrangères réalisent 134,9 milliards soit 66% des 204 milliards que totalise le marché. Cette performance est en progression de 1,6% sur les chiffres de 132,8 milliards obtenus en 2019.
L’exception la plus notable dans ce mouvement général de progression est Allianz, qui s’est replié en termes de chiffre d’affaires de près de 12% en dommages et de près de 14% en vie, perdant dans ces deux catégories 1,7 et 1 milliard de 2019 à 2020. Mais si la baisse de la vie semble plus liée à des fluctuations observées dans le portefeuille depuis 4 ans, la baisse des affaires dommage, provenant surtout des branches auto, maladie et risques techniques doit beaucoup aux conséquences du COVID.
L’autre société étrangère ayant mal performé en cette année de COVID, est la SAAR. Elle doit ses reculs aux contre-performances du réseau commercial dans le segment des affaires individuelles, comme dans celui des affaires prévoyance collective, ainsi qu’au poids de son ticket d’entrée sur le marché.
Quant à Amsa, elle récolte les retombées d’une politique d’agressivité commerciale orientée vers l’externalisation des indemnités de fin de carrière des grandes entreprises ou l’accompagnement des nouveaux risques pétroliers : alors que ses performances restent stables en dommages, elle poursuit en vie sa progression forte depuis des années, avec une croissance de plus de 9% en 2020.
Les autres sociétés étrangères qui ont prospéré en 2020, affichant des performances largement supérieures à celles du marché, sont Salama, Wafa et AXA ; elles doivent leurs résultats à la poursuite des actions de redressement professionnel du nouveau management, à la bancassurance et à l’exploitation des retombées d’investissements réalisés par leurs partenaires.
Il convient toutefois de relever ici que WAFA vie qui, avec ses souscriptions uniquement de contrats individuels en bancassurance, avait eu une progression de 29% en 2019, n’a eu que 0,8% de croissance en 2020.
Entre ces deux groupes, SUNU, NSIA Sénégal et SAHAM devenu Sanlam aujourd’hui, qui tout en enregistrant des croissances supérieures en dommages à la moyenne (de 4 à environ 8%) sont en baisse par rapport au dynamisme affiché en 2019 et dans la branche vie : on pourrait en conclure qu’elles subissent fortement l’effet du COVID en vie où leurs souscriptions baissent, tandis qu’en dommages, elles arrivent à limiter les dégâts à un ralentissement de leur progression.
L’effet dépréciateur du COVID dans les sociétés est amplifié, quand le portefeuille repose beaucoup sur un réseau de vendeurs, car la distanciation tue le démarchage. Et ce sont les sociétés étrangères vie, hormis Amsa et WAFA, les 2 plus importantes en 2020, qui ont payé le plus lourd tribu sur ce chapitre : alors que ces 5 sociétés avaient produit 26,2 milliards en 2019, elles se retrouvent en 2020 avec seulement avec 23,9 milliards, soit une baisse de plus de 9%.
… DES SOCIÉTÉS SÉNÉGALAISES PLUS RÉSILIENTES EN VIE COMME EN DOMMAGE
La Sonam vie et Sen Assurance Vie, qui faisaient à peine plus du quart du marché en 2018, ont affiché 15,9 milliards, puis 18,2 milliards en 2019 et, 22,0 milliards en 2020, augmentant leur croissance en année de COVID. Pourtant, leurs réseaux commerciaux ont été stérilisés pendant près d’un semestre. La parade qui s’est révélée efficace est la diversification de portefeuille, avec une accentuation des affaires collectives.
Dans les branches Dommages, les sociétés nationales qui se sont distinguées par leur immunité face au COVID ont pu réaliser des croissance de 10 à 34% ; il s’agit de la Providence, d’Askia Assurances, de la Prévoyance Assurance et de la SONAC ; les raisons du dynamisme de ces sociétés en 2020 résident dans le dynamisme commercial y compris les relocalisations de clientèle dans une société nouvelle, l’arrivée d’un nouveau partenaire technique et financier, le développement et l’extension d’une grande entreprise partenaire, les retombées d’une spécialisation dans une ambiance de développement des investissements.
L’impact négatif de la réduction de l’assurance transport de marchandises, de l’assurance maladie, de l’assurance automobile des professionnels et de l’assurance individuelle accidents, qui aurait pu être ressenti dans ces portefeuilles, a été gommé par les performances réalisées par ailleurs.
Un second groupe de deux sociétés nationales, toutes deux spécialisées, la Caisse Nationale d'Assurances Agricoles du Sénégal (CNAAS) et la Mutuelle d’Assurances Agricoles du Sénégal (MAAS) performe au taux moyen du marché , gagnant 6% dans l’exercice : mais pour la CNAAS, ce taux positif est en régression par rapport aux 19% de l’exercice antérieur, ce qui laisse penser que la société a été entravée dans son développement ; quant à la MAAS, la doyenne des sociétés sénégalaises, née en 1956, avant les indépendances, elle cherche une seconde jeunesse, fluctuant dans ses souscriptions annuelles : sa croissance confirme qu’elle est certainement à l’abri du COVID.
Quant au dernier quarteron de sociétés nationales, elles ont toutes enregistré des taux de croissance négatifs en 2020, allant de -0,8% (la quasi statu quo) pour la Sonam S. A. à -23% pour la Sonam Mutuelle. Le COVID est venu accentuer des situations spécifiques dans les sociétés nommées, mais aussi aux Assurances Sécurité Sénégalaise et à la CNART, plus spécialisées dans l’assurance transport public de voyageurs, qui a connu une pause de plus d’un trimestre.
Dans l’ensemble, le marché sénégalais s’est montré résilient du point de vue de sa production d’assurance : au lieu de connaître une régression comme l’économie, il s’est au contraire développé de 6% en 2020, passant de 193 milliards de primes à 204 milliards. Les sociétés ont présenté face au COVID des réponses différentes, en autant de manifestations qui désignent les parades et les acteurs efficaces.
Les risques des entreprises ont été moins sensibles aux effets du COVID : il s’agit des branches risques techniques, incendie et risques d’entreprises, aviation et corps de navire, crédit-caution, et des assurances collectives vie, qu’il s’agisse de prévoyance de retraite ou de produits mixtes.
A l’inverse, l’automobile professionnelle, la maladie, le transport de marchandises, les individuelles accident, les assurances individuelles ont reculé en 2020 ou très peu progressé, étant plus durement impactés.
Du point de vue des acteurs, il est curieux de relever que les sociétés nationales, qui ne représentent que le tiers du marché, face à des entreprises étrangères qui prédominent dans le secteur, se sont révélées plus résilientes en vie, comme en dommages, progressant paradoxalement de plus de 20% en vie, alors que les autres déclinent de 1%, progressant en dommages de 5%, là où les entreprises étrangères gagnent 3%.
Cette évolution à contre-courant reflète paradoxalement la faiblesse de la pénétration des assurances : beaucoup de nouveaux territoires restent à explorer, quand les niches traditionnelles deviennent, pour des raisons de COVID ou autres, inaccessibles. Dans le cas du marché sénégalais, ce sont les projections sur l’avenir, reflétées par les investissements et les risques d’entreprise, qui ont permis de subir sans trop de dégâts l’absence de certains risques à court terme.
Lejecos Magazine
L’assurance a, dans l’ensemble, bien résisté dans cet environnement dominé par le COVID en 2020 : on a en effet enregistré un léger tassement en IARD, de 5% en 2019 à 4% en 2020 et un recul plus marqué de la croissance en vie, qui est passé de 13% à 4%. Mais la croissance du marché s’est poursuivie en 2020, malgré le COVID, puisqu’on est passé de 193 milliards en 2019 à 204 milliards de FCFA en 2020. Mais n’eut été la prime exceptionnelle enregistrée dans le pétrole, on aurait eu une décroissance.
Cette résilience du marché des assurances face au COVID se retrouve également en Côte d’Ivoire, le plus grand marché de la CIMA, l’organisation commune des pays d'Afrique noire francophone partageant les mêmes normes d’assurances : les affaires y croissent de 391 à 415 Milliards de FCFA entre 2019 et 2020 (+6,1%) avec, comme au Sénégal, un dynamisme supérieur des souscriptions vie (+6,9%) par rapport aux primes dommages (+4%).
La même résilience ne se retrouve pas au Cameroun et est beaucoup moins marquée au Gabon, puisque, dans ces deux plus grands marchés d’Afrique Centrale au sein de la CIMA, les primes passent à 210 et 100 milliards de fcfa respectivement, en 2019 à 207 et 104 milliards de fcfa en 2020, soit une décroissance de -1,4% au Cameroun et une quasi-tassement de 4% au Gabon. Il est vrai que ces pays d’Afrique centrale subissaient depuis quelques années une conjoncture défavorable des prix de leurs produits d’exportation, conjoncture qui a bridé leurs ressources face au nouveau choc extérieur provoqué par le COVID.
Il est vrai aussi que, sur le plan régional les autorités de l’Union Economique et Monétaire de l’Afrique de l’Ouest (UEMOA), ainsi que celles de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) ont réagi rapidement, notamment en suspendant l’application des critères de convergence et en mettant de fortes liquidités à la disposition des Etats et des économies.
Sur le plan interne, pour éviter que l’effet du COVID se solde par une récession, le Sénégal a mis en place un Plan de Résilience Économique et Sociale (PRES) de 1000 Milliards de Fcfa, soit 25% du budget et 10% du PIB. Ce plan avait pour objet de soutenir les entreprises (84%), les ménages (9%), le système sanitaire (6%) et la diaspora (1%).
La riposte sanitaire, précoce vigoureuse et participative, a permis au Sénégal de contenir la manifestation de la pandémie et le système de veille mis en place a même été internationalement reconnu comme l’une des meilleures réponses à la pandémie. Cette réaction n’est pas sans rappeler la réponse très appréciée que le Sénégal avait apportée à l’apparition du sida.
Mais, dans la période allant de mars à juillet 2020, en freinant les échanges interrégionaux et en fermant les frontières et les établissements scolaires, ces politiques ont mis en veilleuse des pans entiers de l’économie, notamment l’hôtellerie et la restauration, les transports terrestres, aériens et touristiques, la pêche, le commerce, les services, l’industrie. Car, d’après certaines sources participant au mécanisme d’encadrement, une entreprise sur deux prévoyait une baisse de ses activités de plus de 75%.
De ce fait, la croissance de l'économie sénégalaise, supérieure à 5% depuis 6 ans, a été fortement réduite par la crise sanitaire. En 2020, elle est estimée par le FMI à -0,7%, affectant beaucoup le secteur informel mais selon le ministre de l’Economie , du Plan et de la Coopération Amadou Hott dans sa communication du 10 mars en conseil des ministres, le taux de croissance 2020 est arrêté à 1,5% contre -0,7% initialement prévu par le PAP2A, une performance, évitant à notre pays la récession constatée dans plusieurs pays. Toutefois, cette crise a freiné les projets pétroliers et gaziers en cours.
La croissance paradoxale du secteur des assurances dans ce contexte s’explique d’abord par le fait que le renouvellement des contrats des entreprises formelles, s’opérant classiquement au 1er janvier, une bonne partie du portefeuille était déjà en place avant le 1er mars, date de signalement du 1er cas de COVID au Sénégal. Elle s’explique ensuite par le relâchement des barrières au courant du 2ème semestre autorisant des anticipations optimistes de 5,2% de reprise pour l’exercice 2021 ; elle s’explique enfin par le concours déterminant des influenceurs sociaux, l’adaptation de certains secteurs à la crise, et l’observation d’une sorte de patriotisme d’entreprise mobilisant positivement les énergies pour redoubler d’efficacité, dans le télétravail et dans la “distanciation”.
On peut relever que si, au Sénégal, en 2020, le secteur des assurances dans son ensemble a réagi à contre-courant de l’économie globale, cette réponse est à différencier selon les secteurs et les entreprises, leurs portefeuilles et les politiques commerciales.
Ce marché comprend 19 sociétés d’assurance non-vie dont 10 sénégalaises et 9 sociétés vie, dont 2 sénégalaises. Les sociétés étrangères, du point de vue de l’origine de leurs capitaux, pèsent ensemble, en termes de chiffres d’affaires, les 2/3 du marché 2020 : 64% des affaires dommages et 70% des affaires vie. Elles constituent donc la part la plus importante d’un marché qui reste dominé par l’assurance dommage, avec 63% des primes.
Outre les deux européennes présentes depuis de longues décennies et gardant leurs places de premier plan sur le marché, nous avons vu arriver une ou deux sociétés ivoiriennes, une luxembourgeoise, une camerounaise, une marocaine, une sud-africaine, en plus d’une neuvième société étrangère, originellement saoudienne. Et chacune des sociétés étrangères dommages dispose d’une filiale vie, sauf Salama et AXA, tandis qu’une seule la SONAM, société sénégalaise la plus ancienne, dispose au sein de son groupe de sociétés vie et non vie.
Répétons-le : le marché des assurances sénégalais a augmenté de près de 6%, pendant que l’économie se tassait de -O,7% en 2020 selon le FMI.
DES SOCIÉTÉS ÉTRANGÈRES PLUS PERFORMANTES EN IARD QU’EN VIE ...
En ce qui concerne les sociétés étrangères, leur chiffre d’affaires cumulé en dommages ressort à 84,2 milliards en 2020, contre 81,2 milliards en 2019, enregistrant une progression moyenne de 3,7%. En vie, leurs souscriptions passent de 45,9 milliards en 2018, à 51,6 milliards en 2019 et 50,7 milliards en 2020. Au total en 2020, les sociétés étrangères réalisent 134,9 milliards soit 66% des 204 milliards que totalise le marché. Cette performance est en progression de 1,6% sur les chiffres de 132,8 milliards obtenus en 2019.
L’exception la plus notable dans ce mouvement général de progression est Allianz, qui s’est replié en termes de chiffre d’affaires de près de 12% en dommages et de près de 14% en vie, perdant dans ces deux catégories 1,7 et 1 milliard de 2019 à 2020. Mais si la baisse de la vie semble plus liée à des fluctuations observées dans le portefeuille depuis 4 ans, la baisse des affaires dommage, provenant surtout des branches auto, maladie et risques techniques doit beaucoup aux conséquences du COVID.
L’autre société étrangère ayant mal performé en cette année de COVID, est la SAAR. Elle doit ses reculs aux contre-performances du réseau commercial dans le segment des affaires individuelles, comme dans celui des affaires prévoyance collective, ainsi qu’au poids de son ticket d’entrée sur le marché.
Quant à Amsa, elle récolte les retombées d’une politique d’agressivité commerciale orientée vers l’externalisation des indemnités de fin de carrière des grandes entreprises ou l’accompagnement des nouveaux risques pétroliers : alors que ses performances restent stables en dommages, elle poursuit en vie sa progression forte depuis des années, avec une croissance de plus de 9% en 2020.
Les autres sociétés étrangères qui ont prospéré en 2020, affichant des performances largement supérieures à celles du marché, sont Salama, Wafa et AXA ; elles doivent leurs résultats à la poursuite des actions de redressement professionnel du nouveau management, à la bancassurance et à l’exploitation des retombées d’investissements réalisés par leurs partenaires.
Il convient toutefois de relever ici que WAFA vie qui, avec ses souscriptions uniquement de contrats individuels en bancassurance, avait eu une progression de 29% en 2019, n’a eu que 0,8% de croissance en 2020.
Entre ces deux groupes, SUNU, NSIA Sénégal et SAHAM devenu Sanlam aujourd’hui, qui tout en enregistrant des croissances supérieures en dommages à la moyenne (de 4 à environ 8%) sont en baisse par rapport au dynamisme affiché en 2019 et dans la branche vie : on pourrait en conclure qu’elles subissent fortement l’effet du COVID en vie où leurs souscriptions baissent, tandis qu’en dommages, elles arrivent à limiter les dégâts à un ralentissement de leur progression.
L’effet dépréciateur du COVID dans les sociétés est amplifié, quand le portefeuille repose beaucoup sur un réseau de vendeurs, car la distanciation tue le démarchage. Et ce sont les sociétés étrangères vie, hormis Amsa et WAFA, les 2 plus importantes en 2020, qui ont payé le plus lourd tribu sur ce chapitre : alors que ces 5 sociétés avaient produit 26,2 milliards en 2019, elles se retrouvent en 2020 avec seulement avec 23,9 milliards, soit une baisse de plus de 9%.
… DES SOCIÉTÉS SÉNÉGALAISES PLUS RÉSILIENTES EN VIE COMME EN DOMMAGE
La Sonam vie et Sen Assurance Vie, qui faisaient à peine plus du quart du marché en 2018, ont affiché 15,9 milliards, puis 18,2 milliards en 2019 et, 22,0 milliards en 2020, augmentant leur croissance en année de COVID. Pourtant, leurs réseaux commerciaux ont été stérilisés pendant près d’un semestre. La parade qui s’est révélée efficace est la diversification de portefeuille, avec une accentuation des affaires collectives.
Dans les branches Dommages, les sociétés nationales qui se sont distinguées par leur immunité face au COVID ont pu réaliser des croissance de 10 à 34% ; il s’agit de la Providence, d’Askia Assurances, de la Prévoyance Assurance et de la SONAC ; les raisons du dynamisme de ces sociétés en 2020 résident dans le dynamisme commercial y compris les relocalisations de clientèle dans une société nouvelle, l’arrivée d’un nouveau partenaire technique et financier, le développement et l’extension d’une grande entreprise partenaire, les retombées d’une spécialisation dans une ambiance de développement des investissements.
L’impact négatif de la réduction de l’assurance transport de marchandises, de l’assurance maladie, de l’assurance automobile des professionnels et de l’assurance individuelle accidents, qui aurait pu être ressenti dans ces portefeuilles, a été gommé par les performances réalisées par ailleurs.
Un second groupe de deux sociétés nationales, toutes deux spécialisées, la Caisse Nationale d'Assurances Agricoles du Sénégal (CNAAS) et la Mutuelle d’Assurances Agricoles du Sénégal (MAAS) performe au taux moyen du marché , gagnant 6% dans l’exercice : mais pour la CNAAS, ce taux positif est en régression par rapport aux 19% de l’exercice antérieur, ce qui laisse penser que la société a été entravée dans son développement ; quant à la MAAS, la doyenne des sociétés sénégalaises, née en 1956, avant les indépendances, elle cherche une seconde jeunesse, fluctuant dans ses souscriptions annuelles : sa croissance confirme qu’elle est certainement à l’abri du COVID.
Quant au dernier quarteron de sociétés nationales, elles ont toutes enregistré des taux de croissance négatifs en 2020, allant de -0,8% (la quasi statu quo) pour la Sonam S. A. à -23% pour la Sonam Mutuelle. Le COVID est venu accentuer des situations spécifiques dans les sociétés nommées, mais aussi aux Assurances Sécurité Sénégalaise et à la CNART, plus spécialisées dans l’assurance transport public de voyageurs, qui a connu une pause de plus d’un trimestre.
Dans l’ensemble, le marché sénégalais s’est montré résilient du point de vue de sa production d’assurance : au lieu de connaître une régression comme l’économie, il s’est au contraire développé de 6% en 2020, passant de 193 milliards de primes à 204 milliards. Les sociétés ont présenté face au COVID des réponses différentes, en autant de manifestations qui désignent les parades et les acteurs efficaces.
Les risques des entreprises ont été moins sensibles aux effets du COVID : il s’agit des branches risques techniques, incendie et risques d’entreprises, aviation et corps de navire, crédit-caution, et des assurances collectives vie, qu’il s’agisse de prévoyance de retraite ou de produits mixtes.
A l’inverse, l’automobile professionnelle, la maladie, le transport de marchandises, les individuelles accident, les assurances individuelles ont reculé en 2020 ou très peu progressé, étant plus durement impactés.
Du point de vue des acteurs, il est curieux de relever que les sociétés nationales, qui ne représentent que le tiers du marché, face à des entreprises étrangères qui prédominent dans le secteur, se sont révélées plus résilientes en vie, comme en dommages, progressant paradoxalement de plus de 20% en vie, alors que les autres déclinent de 1%, progressant en dommages de 5%, là où les entreprises étrangères gagnent 3%.
Cette évolution à contre-courant reflète paradoxalement la faiblesse de la pénétration des assurances : beaucoup de nouveaux territoires restent à explorer, quand les niches traditionnelles deviennent, pour des raisons de COVID ou autres, inaccessibles. Dans le cas du marché sénégalais, ce sont les projections sur l’avenir, reflétées par les investissements et les risques d’entreprise, qui ont permis de subir sans trop de dégâts l’absence de certains risques à court terme.
Lejecos Magazine