Banques européennes : les créanciers devront mettre la main à la poche en cas de faillite

Jeudi 11 Juillet 2013

La Commission européenne prend l'initiative et change les règles de sauvetage des banques en difficulté. L'exécutif européen a présenté mercredi 10 juillet, à l'initiative de Michel Barnier, un nouveau dispositif de restructuration des établissements en déroute, dispositif dans lequel il prévoit de jouer un rôle de premier plan. "Nous mettons sur la table les moyens et les outils d'une réparation organisée", a expliqué le commissaire européen aux services financiers. Pour lui, la pratique actuelle consistant à verser une aide publique aux banques avant tout plan de restructuration a abouti à retarder considérablement leur remise à flot.


Banques européennes : les créanciers devront mettre la main à la poche en cas de faillite
Dès le 1er août, les règles vont changer : avant qu'elles ne puissent solliciter un financement public, les banques devront présenter un plan de restructuration détaillé qui assure sa viabilité. M. Barnier a ajouté que toute banque aidée par l'Etat doit encadrer strictement les rémunérations de ses dirigeants. De plus, les actionnaires et les créanciers subordonnés devront contribuer en premier ressort. A terme, le contribuable devrait échapper, à de rares exception près, au sauvetage des banques. Selon M. Barnier, si l'union bancaire avait été en place avant la crise, l'argent public n'aurait été nécessaire que dans un cas parmi les dizaines de banques secourues en Europe : le sauvetage de l'Anglo Irish Bank.
METTRE LES BANQUES SUR UN PIED D'ÉGALITÉ
En outre, ces nouvelles règles "mettront sur un pied d'égalité des banques de taille similaire situées dans différents Etats membres et réduiront la fragmentation du marché financier", a expliqué le commissaire européen à la Concurrence JoaquinAlmunia. Dans la situation actuelle, un établissement en difficulté dans un pays peut recevoir un soutien rapide de l'Etat, protégeant ainsi ses actionnaires et créanciers, alors qu'un autre situé ailleurs ne recevra qu'une assistance marginale. Les Européens ont déjà dessiné fin 2012 les grandes lignes d'un superviseur bancaire unique de la zone euro, placé sous l'égide de la Banque centrale européenne (BCE). Et, fin juin, un accord était intervenu sur un ensemble de règles communes aux 28 qui définissent l'ordre dans lequel les créanciers des banques seront sollicités en cas de sauvetage ou de faillite d'une banque. La proposition présentée mercredi consiste en un mécanisme qui permettra d'appliquer ces règles de manière unique dans la zone euro. Il comprendra un conseil de résolution ainsi qu'un fonds. Concrètement, si une banque de la zone euro se trouve dans de graves difficultés financières, la BCE, en tant que superviseur, tirera la sonnette d'alarme. A ce stade, le conseil de résolution, une nouvelle entité composée de représentants de la BCE, de la Commission européenne et des autorités nationales de résolution, fera des recommandations à la Commission. Ce conseil sera formé de 300 personnes au départ, selon M. Barnier. C'est la Commission qui "appuiera sur le bouton". Autrement dit, c'est elle qui prendra la décision de mettre en œuvre un plan de résolution, laissé ensuite à la charge des autorités nationales compétentes.
EN ATTENDANT L'UNION BANCAIRE...
Un fonds alimenté par les banques elles-mêmes sera mis en place pour participer au sauvetage des établissements financiers, permettant ainsi d'éviter progressivement le recours à l'argent public, au fur et à mesure de sa montée en puissance. En une décennie environ, il devrait atteindre une capacité de 60 à 70 milliards d'euros. Avant même d'être finalisé, le mécanisme a soulevé des objections de la part du gouvernement allemand, pour lequel il n'est pas compatible avec les traités européens. Le ministre des finances, Wolfgang Schäuble, a encore dit mardi que son pays était "prêt à un changement de traité" pour remédier à cette situation. Problème : une telle démarche prendra du temps. Sur le fond, l'Allemagne n'est pas favorable à un fonds de résolution commun, qui contraindrait les banques allemandes à financer les faillites ou les sauvetages de celles d'autres pays. Elle est opposée également au fait de donner à la Commission le pouvoir de décider si l'argent du contribuable allemand sera utilisé dans le sauvetage de banques d'autres pays. Car si le but de l'union bancaire est bien d'éviter que les contribuables mettent la main à la poche, "personne ne peut exclure (...) qu'il y ait quand même besoin d'argent public, notamment dans la période de transition", a reconnu M. Barnier. Cette période de transition durera plusieurs années : l'entrée en vigueur du mécanisme de résolution est prévue pour 2015, mais les règles qu'il est censé appliquer et qui établissent l'ordre des créanciers dans le renflouement des banques ne seront opérationnelles qu'en 2018. Quant au fonds de résolution, il mettra plusieurs années avant d'être suffisamment abondé.
Le Monde.fr
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