Comment réformer le FMI à présent ?

Jeudi 23 Avril 2015

WASHINGTON, DC – Plus de quatre ans ont passé depuis qu'une majorité écrasante des membres du Fonds Monétaire International a convenu d'un train de réformes permettant de doubler les ressources de l'organisation et de réorganiser sa structure de gouvernance en faveur des pays en développement. Mais l'adoption des réformes doit être approuvée par les pays membres du FMI. Et bien que les États-Unis aient été parmi ceux qui ont voté en faveur de cette mesure, le Président Barack Obama a été incapable d'obtenir l'approbation du Congrès. Le moment est venu d'envisager des méthodes alternatives pour faire avancer les réformes.


Le retard pris par les États-Unis représente un énorme revers pour le FMI. Il fait obstacle à une restructuration de son processus décisionnel censé mieux représenter l'importance croissante et le dynamisme des pays en développement. En outre, comme les réformes sont en suspens, le FMI a été contraint de dépendre en grande partie de prêts auprès de ses membres, plutôt que des ressources permanentes demandées par les nouvelles mesures. Ces prêts, conçus comme un pont provisoire avant l'entrée en vigueur des réformes, doivent être confirmés tous les six mois.
À notre avis, la meilleure méthode à suivre consiste à découpler le cadre des réformes qui exige la ratification par le Congrès américain, du reste du train de mesures. Un seul élément majeur (la décision d'aller vers un Conseil d'administration entièrement élu), nécessite un amendement aux statuts du FMI ainsi que l'approbation du Congrès.
L'autre élément majeur de la réforme est une augmentation et un rééquilibrage des quotas qui déterminent le droit de vote et l'obligation financière de chaque pays. Ce changement pourrait doubler les ressources du FMI et fournir un plus fort droit de vote aux pays en développement. Le Congrès doit encore ratifier la mesure avant d'augmenter le quota des États-Unis, mais son approbation ne sera pas nécessaire pour que cette partie du train de réformes entre en vigueur pour les autres pays.
La connexion entre les deux parties des réformes a toujours été inutile : les mesures sont indépendantes, elles nécessitent des processus d'approbation différents et peuvent être proposées séparément. Supprimer le lien entre elles va nécessiter le soutien de l'administration américaine, mais pas la ratification par le Congrès.
Cette séparation pourrait être mise en œuvre en douceur. Une majorité simple du Conseil d'administration du FMI peut la recommander au Conseil des Gouverneurs : dans ce cas, une résolution qui distingue les réformes en deux parties exigerait 85% des voix. En 2010, le train de réformes a été adopté avec plus de 95% des voix.
Les modifications des quotas pourraient alors rapidement être mises en œuvre. Les quotas de chaque pays membre ont déjà été promis, il serait donc inutile de poursuivre des négociations complexes et fastidieuses. Les pays qui sont capables de payer leurs augmentations de quotas pourraient donner leur aval, augmenter les ressources du FMI et renforcer leur droit de vote dans ce domaine.
Le principal obstacle à cette proposition est l'exigence de l'approbation du Congrès pour augmenter la part du quota américain. Cela ouvre la possibilité que le droit de vote des États-Unis puisse tomber temporairement sous le seuil des 15% nécessaires pour exercer son droit de veto contre les décisions nécessitant la prise en charge de 85% des votes des membres du FMI.
Afin de s'assurer du soutien des États-Unis, le Conseil des Gouverneurs risque de s'engager à ne pas à examiner tout projet de décision exigeant 85% des voix sans le consentement des États-Unis. Cette garantie peut être incluse dans la résolution divisant le train de réformes en deux parties. Il pourrait rester valable jusqu'à ce que les États-Unis soient en mesure d'augmenter leur quota et récupèrent leur part de droit de vote. Le Conseil d'administration risque d'approuver un engagement analogue et de demander à la Directrice générale du FMI de s'abstenir de soumettre tout projet de décision nécessitant une majorité de 85% sans obtenir au préalable le soutien des États-Unis.
L'administration américaine pourrait bien prêter le flanc à la critique du Congrès, qui lui reproche d'accepter une mesure qui va diminuer temporairement la part de droit de vote du pays en s'appuyant sur un accord politique pour préserver son droit de veto. Mais l'accord pourrait aussi agir comme un stimulant pour ratifier les réformes. Le pouvoir de rétablir le droit de veto formel des États-Unis risque de reposer entièrement entre les mains du Congrès : ce qui rend peu probable le fait que cette affaire soit définitivement réglée avant quatre ans.
Paulo Nogueira Batista, Jr., Directeur Général du FMI. Hector R. Torres, ancien Directeur Général suppléant du FMI.
 
 
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