Grève dans les fast-foods : l'autre face de la reprise américaine ?

Vendredi 30 Août 2013

Au lendemain de la manifestation nationale des salariés des fast-foods, qui a touché une soixantaine de villes aux États-Unis, jeudi 29 août, il était difficile de faire un bilan de la mobilisation. Plusieurs milliers d'employés ont protesté tout au long de la journée, dans environ un millier de restaurants, pour réclamer un salaire minimum de 15 dollars par heure, le salaire minimum au niveau fédéral étant actuellement fixé à 7,25 dollars). Ils demandent en outre à pouvoir adhérer à un syndicat pour faire valoir leurs droits. La direction de McDonald's et de Wendy's, autre chaîne de burgers largement implantée sur le territoire, a affirmé, vendredi, que le mouvement avait de manière générale peu affecté l'activité dans les restaurants


Grève dans les fast-foods : l'autre face de la reprise américaine ?
Mais là n'est peut-être pas l'essentiel. Cette vague de protestation, qui fait suite à de précédentes manifestations au début de l'été et en novembre 2012, lève le voile sur un aspect de la reprise économique que les Etats-Unis sont en train de découvrir. Les salariés des services, à commencer  par les 2,5 millions employés de fast-foods, constituent le gros du bataillon des travailleurs qui réussissent à retrouver  un emploi après la crise, contribuant ainsi à faire  baisser  le taux de chômage, qui s'établissait en juillet à 7,4 % de la population  (le taux réel est certainement plus du double lorsqu'on intègre tous les sans-emploi, qui, pour des raisons diverses ont renoncé à chercher  un travail). Au cours des deux dernières années, les créations d'emploi dans les services (restauration, distribution, hôtellerie etc.) se sont élevées à 1,7 million, représentant 43 % du total des créations d'emploi. Mais à quel prix ? C'est la question que souhaitent poser  en filigrane les protestataires. "Les propriétaires des chaînes de fast-food voudraient nous faire  croire  que ces salariés sont essentiellement des 'teenagers'. Ce n'est pas le cas, affirme Latisha James, une conseillère municipale de la ville de New York chargée des affaires familiales, qui participait jeudi aux manifestations sur Union Square à Manhattan. Ce sont surtout des femmes, qui ont des enfants et qui se battent pour joindre  les deux bouts. C'est une question de justice  économique."
UN POUVOIR  D'ACHAT EN CHUTE LIBRE
Selon les statistiques fédérales, le salaire des employés de fast-food  est en moyenne de 8,74 dollars de l'heure. Il existe également une sous-catégorie de salariés, les "tipped workers", employés payés au pourboire, qui eux bénéficient d'un salaire minimum de 2,13 de l'heure, qui n'a pas été revalorisé depuis 1991."En terme de pouvoir  d'achat, le niveau du salaire minimum est 30 % en-dessous de ce qu'il était en 1968", dénonce le National Employment Law Project (NELP), une association de défense  des travailleurs pauvres. Cette situation tient beaucoup au lobbying efficace de la National Restaurant Association (NRA, à ne pas confondre  avec le puissant lobby des armes à feu, la National Rifle Association) qui, comme elle l'explique  sur son site Internet est parvenue à stopper  les hausses de salaires dans 27 des 29 Etats qui comptaient relever  les minima légaux. De la même façon, la NRA s'est opposée à l'instauration d'un congé maladie dans une douzaine d'Etats. L'argument avancé par la chaînes de restauration est toujours le même : une augmentation des salaires ou des avantages tuerait des emplois.
De son côté, la NELP fait remarquer  que, au cours de la reprise économique que connaît actuellement le pays, les emplois les moins bien payés ont augmenté 2,7 fois plus vite que ceux qui se situent dans le milieu de la fourchette et les emplois les mieux payés. "Cette grève est une illustration de la grande frustration qui monte depuis longtemps. Cela reflète le fait que les gens sont vraiment concernés par l'accroissement des inégalités, estime Arne Kalleberg, professeur de sociologie à l'université de Caroline du Nord, interrogé par le New York Times. Un porte-parole de l'enseigne Wendy's, interrogé vendredi par le Wall Street Journal, répondait  : "Nous sommes fiers que Wendy's permette à des gens possédant des parcours et des niveaux d'éducation différents d'entrer  dans le monde du travail". En tout cas, le gouvernement semble vouloir  s'emparer  du sujet. Le secrétaire au travail, Thomas E. Perez, a déclaré que ces grèves illustraient une évidence : les salaires doivent augmenter. De combien ? Le président, Barack Obama, a déjà déclaré qu'il était favorable à un salaire minimum de 9 dollars. Mais les Républicains sont de leur côté sur la même longueur d'onde que le lobby de la restauration : toute hausse de salaire aurait inévitablement des conséquences négatives sur l'emploi.
Lemonde.fr
 
Actu-Economie


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