L'AFRIQUE ET LE FINANCEMENT DU CLIMAT : Appel à l'action

Vendredi 21 Mars 2025

L'Afrique étant particulièrement exposée aux effets du changement climatique, la problématique du financement a fait, hier jeudi 20 mars, l'objet d'une Masterclass internationale en ligne, organisée en collaboration entre le COFEB, le Centre de formation et de recherche de la Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO) et HEC Paris.


L'AFRIQUE ET LE FINANCEMENT DU CLIMAT : Appel à l'action
" Le meilleur moment pour planter un arbre c'était il y a vingt-ans, mais le deuxième meilleur moment c'est maintenant" ! C'est cette conclusion parabolique de Madame Anne Frisch, Professeure associée à HEC Paris, experte en finance, stratégie et contrôle de gestion, qui a mis un point d'orgue à la Masterclass inaugurale portant sur la problématique du financement face au changement climatique.

Organisée en ligne, hier jeudi 20 mars , par le COFEB, le Centre de formation et de recherche de la Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO), en collaboration avec HEC Paris, à l'occasion du lancement officiel des Parcours certifiants 2025 à l'intention des dirigeants des banques et cadres des secteurs bancaire et financier, la Masterclass a débuté avec une présentation de la Stratégie climat, par M. Mahaman Tahir HAMANI, Directeur général du Cofeb pour qui , ce programme a permis à plusieurs responsables du système financier de bénéficier d’une formation de haute qualité adaptée aux enjeux contemporains.
 
Parlant du thème de cette masterclass, le directeur général du Cofeb a souligné que le changement climatique est désormais reconnu comme l’un des défis les plus urgents et complexes auxquels notre planète est confrontée et qu’il affecte tous les secteurs et particulièrement celui de la finance. Face à cette situation M. HAMANI a confié qu’il apparait impératif que les professionnels de la finance prennent des mesures concrètes pour intégrer les risques climatiques dans leurs stratégies et leurs décisions.
 
A sa suite, l'intervention de Madame Frisch, introduite par M. Balamine Diane, adjoint au Directeur des Enseignements et des formations, a porté sur les défis et opportunités du changement climatique en Afrique.
 
En posant d'emblée la dimension scientifique du climat, elle en rappelle les risques et l'évolution notamment de la concentration de CO2 (gaz à effet de serre) dans l'atmosphère, mesurée depuis 1958 dans un observatoire situé à Hawaï et dont la courbe de "Killing" (du nom du scientifique qui a effectué les mesures) dévoile une progression moyenne annuelle de 319 PPM (Particules Par Million) en 1958 à 425 PPM en 2024. En soi et dans l'absolu, le gaz à effet de serre reste dans une certaine mesure une nécessité, "sauf qu'à un certain niveau, nous entrons dans un déséquilibre du climat qui au demeurant n'est qu'un aspect des 9 processus naturels qui sont impactés", indique Mme Frisch.
 
En d'autres termes, les phénomènes d'érosion de la biodiversité, l'introduction de substances nouvelles, ou encore l'insécurité alimentaire sont entre autres conséquences du déséquilibre climatique causé par l'action humaine.
 
Plus victime que coupable

Une fois posées les bases des données scientifiques de la problématique au niveau planétaire, le continent africain apparaît comme la principale victime dans la distribution des températures dégradées, autrement appelées "réchauffement climatique" auquel l'Afrique contribue le moins. Avec 1,4 degré de plus de la température moyenne depuis la période industrielle, le continent enregistre une hausse de 0,3 degré, compte non tenu des variations zonales. Le continent africain est ainsi plus exposé aux effets néfastes du changement climatique. Ainsi, le thème principal de la Masterclass « Finance et Climat : un appel à l’action pour l’Afrique », signale l'urgence d'actions d'atténuation et d'adaptation au changement climatique, avec son corollaire de baisse des précipitations, perte du couvert forestier, insécurité alimentaire à laquelle plusieurs pays africains sont déjà en proie. Toutes choses de nature à impacter la croissance économique du continent.
 
Le couple rendement-risque

L'action climatique a un coût dont le financement dépasse largement les capacités des pays en développement et en particulier africains. Or, comme le rappelle Mme Frisch, "les financiers s'intéressent toujours au couple rendement-risques" notamment le risque climat, catégorisé en deux rubriques : les risques physiques ( inondations, sécheresse, etc...) qui pèsent sur la valeur des actifs ; et les risques de transition (liés aux changements technologiques, ou à la règlementation) avec des changements potentiels sur les casch flow futurs. L'exemple donné par Mme Frisch sur les risques technologiques et de règlementation est relatif à l'interdiction en Europe de la vente de véhicules thermiques à partir de 2035 ; à cette date, les constructeurs automobiles qui n'auront pas basculé dans la transition n'auront tout bonnement plus de marché et se retrouveront à la casse des "actifs échoués". Dans ce lot, on retrouvera les centrales à charbon, les usines vétustes, les véhicules à essence, les engrais, entre autres.

Il apparaît cependant que les enjeux du changement climatique, comme le rappelle Mme Frisch, se définissent aussi en opportunités à travers le crédit carbone, le reboisement, les énergies renouvelables, l'amélioration des pratiques productives, le recyclage des déchets, l'économie circulaire, entre autres.  
 
Une réalité européenne, un cauchemar africain

En terme d'actions à mener en vue d'atténuer et de s'adapter aux effets du changement, la responsabilité des financiers est engagée notamment à l'article 2 de l'Accord de Paris sur le climat, conclu en 2015 et qui stipule que " Les flux financiers doivent être compatibles avec une trajectoire vers de faibles émissions de gaz à effet de serre, et un développement résilient au changement climatique".

Cet accord signé par 196 pays (dont tous les pays africains) a donné lieu au développement de la finance climat qui a reçu des flux financiers évalués à 1,27 trillions de dollars (1300 milliards de dollars) en 2022. Mme Frisch de faire remarquer que la majeure partie de ces flux qui proviennent des secteurs publics et privés, est consacrée à l'atténuation (mitigation) soit 1150 milliards de dollars, le reste étant consacré à l'adaptation et à l'usage double.

Une grande partie de ces flux va au secteur énergétique (515 milliards de dollars) ; suivi de celui des transports ( 336 milliards de dollars). Sauf qu'en termes de répartition géographique, c'est l'Europe de l'Ouest qui capte le plus de flux (325 milliards de dollars dont un peu plus de la moitié provient du privé), l'Afrique Subsaharienne se contentant de la part congrue de 30 milliards de dollars provenant du public. Le continent qui regroupe 18% de la population mondiale, ne recueille que 3% du financement climat, alors que les perspectives économiques en Afrique prévoient un besoin de financement d’environ 2700 milliards de dollars d’ici à 2030 — soit environ 400 milliards de dollars par an — pour lutter efficacement contre le changement climatique. C'est bien là le problème qui appelle une grande action.
Malick NDAW
 
 
Finances & Banques


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