On estime que le marché mondial des médicaments de qualité inférieure (ne répondant pas aux spécifications de qualité) ou falsifiés (dont la composition, l'identité ou la source délibérément faussée) représente jusqu'à 200 milliards de dollars , soit 10 à 15 % du marché pharmaceutique total. Mais il pourrait s'agir d'un phénomène bien plus important : selon l'Organisation mondiale de la santé, qui se fonde en grande partie sur les rapports bénévoles de professionnels de santé, nous ne sommes peut-être informés « que d'une petite fraction » de tous les cas.
Ce que nous savons, c'est que le problème est particulièrement sérieux en Afrique. En 2013-2017, 42 % des médicaments de qualité inférieure et falsifiés découverts étaient situés sur le continent. Cela mine les progrès durement gagnés de l'Afrique en matière de santé, notamment en érodant la confiance dans les systèmes de santé naissants.
Il va sans dire que l'utilisation de médicaments de qualité inférieure ou falsifiés – qui vont du simple médicament inefficace, à des substances toxiques – peut avoir des conséquences épouvantables, les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables étant les plus durement touchées. Après tout, ce sont ceux qui ont des fonds limités et un mauvais accès aux professionnels de santé et aux soins de santé de qualité qui sont les plus susceptibles d'acheter des médicaments à bas prix dans les rues, où il n'y a aucune garantie qu'ils soient authentiques - encore moins de haute qualité.
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En fin de compte, cela peut entraîner des coûts beaucoup plus élevés pour les victimes, qui doivent payer davantage pour traiter la maladie initiale une fois qu'elle a progressé, ainsi que pour tous les effets secondaires du faux médicament, s'ils ont la chance d'y survivre. Une étude de 2015 a estimé qu'en Afrique subsaharienne, 122 000 enfants de moins de cinq ans avaient perdu la vie en un an seulement, à la suite de médicaments antipaludiques de qualité inférieure ou falsifiés. De plus, étant donné que les gens ne savent pas ce qu'ils prennent, sans parler de la dose appropriée, les médicaments falsifiés et de qualité inférieure contribuent à l'augmentation de la résistance antimicrobienne – une tendance qui ne fait pas de différence entre riches et pauvres.
Pourtant rien n'est fait pour arrêter les trafiquants de faux médicaments. On estime que chaque fois que des trafiquants « investissent » 1 000 $ dans des médicaments contrefaits, cette somme peut produire jusqu'à 450 000 $ de bénéfices. Cette marge est 10 à 25 fois plus importante que celle dont jouissent les vendeurs de stupéfiants illicites. Ces récompenses massives ne sont pas contrebalancées par un risque important. Même lorsqu'ils sont pris, les trafiquants de faux médicaments évitent souvent des peines de prison. Ils paient une simple amende et reprennent leurs activités.
À l'instar du trafic de stupéfiants, il s'agit d'une entreprise qui dépend – et qui renforce – une activité criminelle plus vaste, en particulier celle des groupes terroristes. En fait, les faux médicaments font l'objet d'un trafic par le biais des mêmes réseaux de crime organisé que les drogues et les armes illicites. Ces réseaux déstabilisent les communautés et les pays, en particulier dans des régions déjà fragiles comme le Sahel.
Heureusement, sept pays africains – la Gambie, le Ghana, le Niger, la République du Congo, le Sénégal, le Togo et l'Ouganda – commencent à prendre des mesures pour lutter contre le fléau des faux médicaments. Ce mois-ci, la Fondation Brazzaville, dont je suis le directeur général, va réunir les chefs de ces États à Lomé au Togo, pour signer une déclaration politique et un accord juridiquement contraignant les engageant à introduire une législation à cette fin.
L'accord comprendra un calendrier clair et exigera de nouvelles sanctions pénales sévères. En outre, en reconnaissant l'importance cruciale d'une application rigoureuse, il comprendra des dispositions sur le renforcement des capacités, en particulier sur l'engagement communautaire et sur la coordination entre les organismes publics. À ce titre, il jettera les bases d'une campagne plus large visant à assurer à tous les citoyens l'accès à des soins de santé de qualité, notamment à des médicaments sûrs et efficaces.
L'Initiative de Lomé représente une occasion historique de renforcer la lutte contre le commerce des médicaments de qualité inférieure et falsifiés. Mais pour réprimer ce secteur d'activité meurtrier, qui ôte la vie à des centaines de milliers d'Africains chaque année, de plus en plus de dirigeants du continent doivent se joindre à cette lutte. Par ailleurs, la communauté internationale doit les soutenir.
Certains acteurs internationaux ont adopté cet impératif. Au-delà de l'OMS, le Conseil de l'Europe a créé la Convention MEDICRIME , le premier traité international contre les produits médicaux contrefaits et les crimes similaires impliquant des menaces envers la santé publique. L'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime a produit un guide sur les bonnes pratiques législatives pour lutter contre la criminalité liée aux produits médicaux falsifiés.
Mais il faut aller plus loin et l'Initiative de Lomé peut avoir de nombreux effets en ce sens. Pour minimiser les risques que posent les faux médicaments pour nous tous, le monde doit offrir son soutien.
David Richmond, directeur général de la Fondation Brazzaville, organisme de bienfaisance indépendant basé à Londres qui se concentre sur les questions africaines.
© Project Syndicate 1995–2020
Ce que nous savons, c'est que le problème est particulièrement sérieux en Afrique. En 2013-2017, 42 % des médicaments de qualité inférieure et falsifiés découverts étaient situés sur le continent. Cela mine les progrès durement gagnés de l'Afrique en matière de santé, notamment en érodant la confiance dans les systèmes de santé naissants.
Il va sans dire que l'utilisation de médicaments de qualité inférieure ou falsifiés – qui vont du simple médicament inefficace, à des substances toxiques – peut avoir des conséquences épouvantables, les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables étant les plus durement touchées. Après tout, ce sont ceux qui ont des fonds limités et un mauvais accès aux professionnels de santé et aux soins de santé de qualité qui sont les plus susceptibles d'acheter des médicaments à bas prix dans les rues, où il n'y a aucune garantie qu'ils soient authentiques - encore moins de haute qualité.
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En fin de compte, cela peut entraîner des coûts beaucoup plus élevés pour les victimes, qui doivent payer davantage pour traiter la maladie initiale une fois qu'elle a progressé, ainsi que pour tous les effets secondaires du faux médicament, s'ils ont la chance d'y survivre. Une étude de 2015 a estimé qu'en Afrique subsaharienne, 122 000 enfants de moins de cinq ans avaient perdu la vie en un an seulement, à la suite de médicaments antipaludiques de qualité inférieure ou falsifiés. De plus, étant donné que les gens ne savent pas ce qu'ils prennent, sans parler de la dose appropriée, les médicaments falsifiés et de qualité inférieure contribuent à l'augmentation de la résistance antimicrobienne – une tendance qui ne fait pas de différence entre riches et pauvres.
Pourtant rien n'est fait pour arrêter les trafiquants de faux médicaments. On estime que chaque fois que des trafiquants « investissent » 1 000 $ dans des médicaments contrefaits, cette somme peut produire jusqu'à 450 000 $ de bénéfices. Cette marge est 10 à 25 fois plus importante que celle dont jouissent les vendeurs de stupéfiants illicites. Ces récompenses massives ne sont pas contrebalancées par un risque important. Même lorsqu'ils sont pris, les trafiquants de faux médicaments évitent souvent des peines de prison. Ils paient une simple amende et reprennent leurs activités.
À l'instar du trafic de stupéfiants, il s'agit d'une entreprise qui dépend – et qui renforce – une activité criminelle plus vaste, en particulier celle des groupes terroristes. En fait, les faux médicaments font l'objet d'un trafic par le biais des mêmes réseaux de crime organisé que les drogues et les armes illicites. Ces réseaux déstabilisent les communautés et les pays, en particulier dans des régions déjà fragiles comme le Sahel.
Heureusement, sept pays africains – la Gambie, le Ghana, le Niger, la République du Congo, le Sénégal, le Togo et l'Ouganda – commencent à prendre des mesures pour lutter contre le fléau des faux médicaments. Ce mois-ci, la Fondation Brazzaville, dont je suis le directeur général, va réunir les chefs de ces États à Lomé au Togo, pour signer une déclaration politique et un accord juridiquement contraignant les engageant à introduire une législation à cette fin.
L'accord comprendra un calendrier clair et exigera de nouvelles sanctions pénales sévères. En outre, en reconnaissant l'importance cruciale d'une application rigoureuse, il comprendra des dispositions sur le renforcement des capacités, en particulier sur l'engagement communautaire et sur la coordination entre les organismes publics. À ce titre, il jettera les bases d'une campagne plus large visant à assurer à tous les citoyens l'accès à des soins de santé de qualité, notamment à des médicaments sûrs et efficaces.
L'Initiative de Lomé représente une occasion historique de renforcer la lutte contre le commerce des médicaments de qualité inférieure et falsifiés. Mais pour réprimer ce secteur d'activité meurtrier, qui ôte la vie à des centaines de milliers d'Africains chaque année, de plus en plus de dirigeants du continent doivent se joindre à cette lutte. Par ailleurs, la communauté internationale doit les soutenir.
Certains acteurs internationaux ont adopté cet impératif. Au-delà de l'OMS, le Conseil de l'Europe a créé la Convention MEDICRIME , le premier traité international contre les produits médicaux contrefaits et les crimes similaires impliquant des menaces envers la santé publique. L'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime a produit un guide sur les bonnes pratiques législatives pour lutter contre la criminalité liée aux produits médicaux falsifiés.
Mais il faut aller plus loin et l'Initiative de Lomé peut avoir de nombreux effets en ce sens. Pour minimiser les risques que posent les faux médicaments pour nous tous, le monde doit offrir son soutien.
David Richmond, directeur général de la Fondation Brazzaville, organisme de bienfaisance indépendant basé à Londres qui se concentre sur les questions africaines.
© Project Syndicate 1995–2020