Jim O’Neill, ancien président de Goldman Sachs Asset Management, ancien Secrétaire commercial du Trésor du Royaume-Uni
Pourtant certains observateurs (et pas seulement les pessimistes chroniques), ont établi que les preuves restent anecdotiques et qu'il est impossible de prédire la durée du moment économique actuel. En effet, durant la reprise qui a suivi la crise de 2008, il y a eu d'autres périodes de relance de la croissance, qui ont fini par s'essouffler rapidement et par redevenir calmes.
Pour soutenir la croissance économique à long terme, les investissements des entreprises vont devoir augmenter. Malheureusement cela est plus facile à dire qu'à faire. Dans les pays occidentaux en particulier, les investissements en capital fixe dans le secteur non résidentiel ont été précisément le facteur manquant dans les précédents cycles d'accélération de courte durée.
Personne ne peut dire avec certitude pourquoi les investissements non résidentiels n'ont pas réussi leur relance au cours des dernières années. Mais je soupçonne que sur cette question, la croyance populaire se trompe.
L'argumentation de cette croyance affirme que les PDG méfiants en sont venus à considérer les risques à long terme comme « n'en valant tout simplement pas la peine. » Voici une liste des nombreuses incertitudes auxquelles ils sont confrontés : inquiétudes au sujet de la réglementation excessive, trop lourdes impositions sur les sociétés, niveaux élevés d'endettement, élaboration erratique des politiques, réaction politique contre la mondialisation et doute quant au fait que les dépenses de consommation à l'extérieur (ou même à l'intérieur) des États-Unis vont durer.
Une opinion moins pessimiste estime qu'après 2008, il est devenu inévitable que l'économie mondiale se détache du moteur de consommation américain et s'adapte à l'essor des économies de consommation émergentes, notamment chinoise. Si cela se produit, nous pourrons tous vivre heureux jusqu'à la fin des temps.
J'ai tendance à pencher du côté des moins pessimistes. Comme je l'ai signalé en mars, l'économie de la Chine s'en est étonnamment bien sortie au premier trimestre 2017, tout comme cela semble être le cas au deuxième trimestre. En fait, les derniers chiffres mensuels de la Chine montrent des signes d'accélération économique, en particulier dans la consommation. Et il a été évident au premier trimestre que les consommateurs chinois sont de plus en plus un important moteur de croissance économique.
Confrontés aux chiffres, les pessimistes répondent en insistant sur le fait que les récentes performances économiques fortes de la Chine ne sont que temporaires : un produit d'un stimulus encore moins viable. Et même si la croissance dure en définitive, affirment-ils, les autorités chinoises n'autorisent pas les entreprises occidentales (voire même les entreprises chinoises, si l'on en croit les ultra-pessimistes), à en bénéficier. Mais si les pessimistes s'avèrent avoir raison au sujet de la Chine, il est étrange que les investissements des entreprises restent timides même pendant les périodes où le moteur de la croissance mondiale se trouve ailleurs, par exemple aux États-Unis ou en Europe (en Allemagne en particulier).
Durant mon mandat de Directeur du gouvernement britannique de la Commission sur la résistance aux antimicrobiens, j'ai été chargé de développer une meilleure compréhension de l'industrie pharmaceutique et j'ai appris qu'il y a quelque chose à dire en faveur des forces micro-économiques - et en faveur du bon sens.
Pensez à l'avenir, qui a toujours été et sera toujours incertain. Pourtant les plus gros flops économiques ont eu lieu lorsque les entreprises n'étaient pas assez incertaines : quand elles étaient sûres que l'avenir serait radieux. Une surabondance de certitude pourrait expliquer la bulle Internet de 2000-2001, entre autres.
Mais si grâce à l'augmentation de la disponibilité de tant d'informations (y compris de différents points de vue et opinions), nous savons maintenant que l'avenir est toujours incertain, le comportement des entreprises occidentales (et de nombreuses entreprises dans les pays émergents) est éminemment logique, surtout étant donné le fonctionnement actuel du système financier. Pourquoi les dirigeants d'entreprises iraient-ils investir dans un monde incertain, plutôt que payer des dividendes à des investisseurs exigeants (mais en général peu enclins à prendre des risques), ou racheter une partie de leurs propres actions (ce qui améliore le taux de capitalisation des bénéfices et, mieux encore, augmente leur propre rémunération) ?
En fin de compte, les PDG et les investisseurs les plus agressifs sont tous satisfaits de cette approche. Malheureusement, on ne peut pas en dire autant des employés de leurs sociétés, anciens et actuels, qui ne bénéficient pas d'avantages sociaux sur leur salaire ni sur leur retraite (qui ont en fait été érodés par la faiblesse des rendements obligataires dans l'ensemble des pays occidentaux).
Il est grand temps que nos gouvernements élus modifient les règles du jeu. Tout d'abord, cela implique une mise à jour du code de l'impôt pour rendre bien moins attrayante l'émission de titres de créance, surtout quand les bénéfices sont utilisés pour racheter des actions. Au minimum, il devrait être plus difficile de racheter des actions que d'émettre de véritables paiements de dividendes. De cette façon, au moins tous les actionnaires, pas seulement les cadres supérieurs initiés, en bénéficieront.
En outre, ces mêmes cadres ne devraient pas être rémunérés sur la base des objectifs à court terme du ratio cours/bénéfice. Davantage d'investisseurs devraient exiger une modification des incitations afin qu'elles reflètent de véritables mesures du rendement à long terme.
À son crédit, le Fonds souverain norvégien s'est dernièrement montré favorable à de tels changements. D'autres grands investisseurs institutionnels et décideurs devraient suivre cet exemple, pour donner un coup de pouce au monde de l'entreprise. Si nous modifions les incitations fiscales, nous pourrons enfin voir les investissements des entreprises faire leur grand retour.
Jim O’Neill, ancien président de Goldman Sachs Asset Management, ancien Secrétaire commercial du Trésor du Royaume-Uni, professeur honoraire d'économie à l'Université de Manchester et ancien directeur de la Commission du gouvernement britannique sur la résistance aux antimicrobiens.
Pour soutenir la croissance économique à long terme, les investissements des entreprises vont devoir augmenter. Malheureusement cela est plus facile à dire qu'à faire. Dans les pays occidentaux en particulier, les investissements en capital fixe dans le secteur non résidentiel ont été précisément le facteur manquant dans les précédents cycles d'accélération de courte durée.
Personne ne peut dire avec certitude pourquoi les investissements non résidentiels n'ont pas réussi leur relance au cours des dernières années. Mais je soupçonne que sur cette question, la croyance populaire se trompe.
L'argumentation de cette croyance affirme que les PDG méfiants en sont venus à considérer les risques à long terme comme « n'en valant tout simplement pas la peine. » Voici une liste des nombreuses incertitudes auxquelles ils sont confrontés : inquiétudes au sujet de la réglementation excessive, trop lourdes impositions sur les sociétés, niveaux élevés d'endettement, élaboration erratique des politiques, réaction politique contre la mondialisation et doute quant au fait que les dépenses de consommation à l'extérieur (ou même à l'intérieur) des États-Unis vont durer.
Une opinion moins pessimiste estime qu'après 2008, il est devenu inévitable que l'économie mondiale se détache du moteur de consommation américain et s'adapte à l'essor des économies de consommation émergentes, notamment chinoise. Si cela se produit, nous pourrons tous vivre heureux jusqu'à la fin des temps.
J'ai tendance à pencher du côté des moins pessimistes. Comme je l'ai signalé en mars, l'économie de la Chine s'en est étonnamment bien sortie au premier trimestre 2017, tout comme cela semble être le cas au deuxième trimestre. En fait, les derniers chiffres mensuels de la Chine montrent des signes d'accélération économique, en particulier dans la consommation. Et il a été évident au premier trimestre que les consommateurs chinois sont de plus en plus un important moteur de croissance économique.
Confrontés aux chiffres, les pessimistes répondent en insistant sur le fait que les récentes performances économiques fortes de la Chine ne sont que temporaires : un produit d'un stimulus encore moins viable. Et même si la croissance dure en définitive, affirment-ils, les autorités chinoises n'autorisent pas les entreprises occidentales (voire même les entreprises chinoises, si l'on en croit les ultra-pessimistes), à en bénéficier. Mais si les pessimistes s'avèrent avoir raison au sujet de la Chine, il est étrange que les investissements des entreprises restent timides même pendant les périodes où le moteur de la croissance mondiale se trouve ailleurs, par exemple aux États-Unis ou en Europe (en Allemagne en particulier).
Durant mon mandat de Directeur du gouvernement britannique de la Commission sur la résistance aux antimicrobiens, j'ai été chargé de développer une meilleure compréhension de l'industrie pharmaceutique et j'ai appris qu'il y a quelque chose à dire en faveur des forces micro-économiques - et en faveur du bon sens.
Pensez à l'avenir, qui a toujours été et sera toujours incertain. Pourtant les plus gros flops économiques ont eu lieu lorsque les entreprises n'étaient pas assez incertaines : quand elles étaient sûres que l'avenir serait radieux. Une surabondance de certitude pourrait expliquer la bulle Internet de 2000-2001, entre autres.
Mais si grâce à l'augmentation de la disponibilité de tant d'informations (y compris de différents points de vue et opinions), nous savons maintenant que l'avenir est toujours incertain, le comportement des entreprises occidentales (et de nombreuses entreprises dans les pays émergents) est éminemment logique, surtout étant donné le fonctionnement actuel du système financier. Pourquoi les dirigeants d'entreprises iraient-ils investir dans un monde incertain, plutôt que payer des dividendes à des investisseurs exigeants (mais en général peu enclins à prendre des risques), ou racheter une partie de leurs propres actions (ce qui améliore le taux de capitalisation des bénéfices et, mieux encore, augmente leur propre rémunération) ?
En fin de compte, les PDG et les investisseurs les plus agressifs sont tous satisfaits de cette approche. Malheureusement, on ne peut pas en dire autant des employés de leurs sociétés, anciens et actuels, qui ne bénéficient pas d'avantages sociaux sur leur salaire ni sur leur retraite (qui ont en fait été érodés par la faiblesse des rendements obligataires dans l'ensemble des pays occidentaux).
Il est grand temps que nos gouvernements élus modifient les règles du jeu. Tout d'abord, cela implique une mise à jour du code de l'impôt pour rendre bien moins attrayante l'émission de titres de créance, surtout quand les bénéfices sont utilisés pour racheter des actions. Au minimum, il devrait être plus difficile de racheter des actions que d'émettre de véritables paiements de dividendes. De cette façon, au moins tous les actionnaires, pas seulement les cadres supérieurs initiés, en bénéficieront.
En outre, ces mêmes cadres ne devraient pas être rémunérés sur la base des objectifs à court terme du ratio cours/bénéfice. Davantage d'investisseurs devraient exiger une modification des incitations afin qu'elles reflètent de véritables mesures du rendement à long terme.
À son crédit, le Fonds souverain norvégien s'est dernièrement montré favorable à de tels changements. D'autres grands investisseurs institutionnels et décideurs devraient suivre cet exemple, pour donner un coup de pouce au monde de l'entreprise. Si nous modifions les incitations fiscales, nous pourrons enfin voir les investissements des entreprises faire leur grand retour.
Jim O’Neill, ancien président de Goldman Sachs Asset Management, ancien Secrétaire commercial du Trésor du Royaume-Uni, professeur honoraire d'économie à l'Université de Manchester et ancien directeur de la Commission du gouvernement britannique sur la résistance aux antimicrobiens.