Pour aider l’Afrique à toucher ses dividendes démographiques, les institutions financières et les banques de développement doivent investir dans la transformation qui s’annonce. Cela signifie non seulement aider le secteur privé – le moteur de la création d’emplois – mais aussi changer nos propres façons d’agir.
L’investissement dans l’avenir de l’Afrique est un engagement gagnant-gagnant, dans tous les domaines du développement économique, pour une raison simple : les principaux défis du continent sont en réalité des problèmes mondiaux, qui nous affecteront tous. La pandémie de Covid-19, comme un avertissement de ce qui nous attend à l’âge du changement climatique, l’a abondamment montré. Pour que l’Europe évite les pires effets du réchauffement climatique, elle doit collaborer, partout, avec les autres pays, pour les aider à bâtir leur développement durable et leur résilience climatique.
Quoique l’Afrique soit dotée d’immenses richesses naturelles, elle souffre, en raison de multiples facteurs historiques et politiques, de taux de pauvreté élevés. Sur les dix pays du monde affichant les taux de pauvreté les plus importants, neuf se situent en Afrique subsaharienne, et l’on estime que les conséquences de la pandémie vont ramener 32 millions de personnes supplémentaires dans l’extrême pauvreté.
Pourtant, les perspectives du continent évoluent. Ses secteurs minier et pétrolier ne drainent plus aujourd’hui qu’une minorité des flux de capitaux à long terme, car les investisseurs donnent désormais la priorité aux télécommunications, à la distribution et aux services. En Afrique subsaharienne, 90 000 usagers, en moyenne, se connectent chaque jour pour la première fois à Internet. L’Afrique devient, vite, le premier centre mondial des activités bancaires en ligne, et cette évolution étendra l’accès de ses économies aux marchés mondiaux, bâtira la résilience, renforcera la transparence et créera des emplois.
Dans le rapport de développement 2021 de la Banque européenne d’investissement, qui donne le détail de nos 5 milliards d’euros (5,9 milliards de dollars) de prêts en Afrique l’an dernier, nous proposons une série de contributions d’experts, qui soulignent les complexités auxquelles fait face aujourd’hui le financement du développement. Les questions qui se posent vont désormais de l’évaluation du risque climatique à l’extension des programmes de sauvetage des forêts de Côte d’Ivoire, abattues à un rythme effréné pour faire place à la production de cacao.
Parallèlement au rapport de développement, nous publions aussi un Partenariat avec l’Afrique, qui examine plus profondément les grands principes de stratégie et d’action qui président aux initiatives de développement. Question déterminante de ce siècle, pour le monde entier, le changement climatique ajoute aux difficultés spécifiques de l’Afrique, notamment parce qu’il augmentera le nombre de personnes déplacées et fragilisera plus encore les États et les sociétés. Si l’Afrique ne contribue que pour moins de 4 % aux émissions de gaz à effet de serre, elle s’apprête pourtant à subir de plein fouet le choc d’une planète qui se réchauffe.
Néanmoins, étant donné son niveau relativement faible d’industrialisation (que traduit sa faible contribution au réchauffement mondial), l’Afrique a une chance unique de basculer directement dans un avenir plus respectueux de l’environnement. Pour y parvenir, les dirigeants africains doivent soutenir l’innovation et adopter les meilleures technologies disponibles. Les biens de base, comme l’eau, l’énergie renouvelable et une mobilité propre, doivent être mis à disposition de toutes et de tous.
La BEI est active en Afrique depuis 1965. Avec 59 milliards d’euros investis dans 52 pays africains, elle dessine un modèle dont les autres institutions financières internationales peuvent apprendre. L’an dernier, 71 % de nos financements pour l’Afrique subsaharienne étaient alloués aux États fragiles et aux économies les moins développées, où nous avons cherché à soutenir les évolutions positives déjà en cours, au nombre desquelles, une croissance économique rapide, une plus grande stabilité et une meilleure intégration politiques, une hausse des investissements étrangers et des opportunités d’entreprendre plus nombreuses et de meilleure qualité. À la base de ce travail, il y a la volonté d’écouter les dirigeants africains et de coopérer avec des innovateurs ambitieux et engagés. Cela nous permet de répondre directement aux besoins locaux, tout en œuvrant dans le sens de la politique de l’UE.
Au cours des deux derniers mois, nous avons organisé des discussions stratégiques avec les présidents du Sénégal, du Ghana et de la Tunisie, tout comme avec la commissaire de l’Union africaine Josefa Sacko. La BEI a également joué un rôle actif lors du récent sommet africain accueilli à Paris par le président français, Emmanuel Macron, et dans le Forum UE-Afrique sur l’investissement vert, au mois avril. À l’occasion de ces deux réunions, les dirigeants des deux continents ont souligné la nécessité d’un partenariat renforcé.
De nombreux dirigeants africains ont réagi à la pandémie de Covid-19 avec une détermination impressionnante. En agissant de concert, l’Afrique et l’Europe peuvent affronter la crise sanitaire et économique actuelle tout en définissant des priorités d’investissement communes en vue d’une reprise durable et inclusive.
Nous avons quant à nous, à la BEI, amélioré significativement notre fonctionnement en Afrique au cours de ces dernières années. En conformité avec les discussions qui se sont tenues entre responsables politiques européens concernant l’amélioration de l’architecture financière de l’aide européenne au développement, nous nous sommes attachés à repenser nos contributions, afin de maximiser leur impact au service des objectifs tant européens qu’africains.
En améliorant la façon dont nous contribuons au financement du développement en étroite coopération avec la Commission européenne et le Service européen pour l’action extérieure, nous pouvons répondre aux besoins croissants de liens commerciaux et économiques encore plus étroits entre l’Europe et l’Afrique. En cet âge de changement climatique et de pandémies mondiales, nos deux continents navigueront de conserve ou couleront ensemble.
Traduit de l’anglais par François Boisivon
Werner Hoyer est président de la Banque européenne d’investissement.
© Project Syndicate 1995–2021
L’investissement dans l’avenir de l’Afrique est un engagement gagnant-gagnant, dans tous les domaines du développement économique, pour une raison simple : les principaux défis du continent sont en réalité des problèmes mondiaux, qui nous affecteront tous. La pandémie de Covid-19, comme un avertissement de ce qui nous attend à l’âge du changement climatique, l’a abondamment montré. Pour que l’Europe évite les pires effets du réchauffement climatique, elle doit collaborer, partout, avec les autres pays, pour les aider à bâtir leur développement durable et leur résilience climatique.
Quoique l’Afrique soit dotée d’immenses richesses naturelles, elle souffre, en raison de multiples facteurs historiques et politiques, de taux de pauvreté élevés. Sur les dix pays du monde affichant les taux de pauvreté les plus importants, neuf se situent en Afrique subsaharienne, et l’on estime que les conséquences de la pandémie vont ramener 32 millions de personnes supplémentaires dans l’extrême pauvreté.
Pourtant, les perspectives du continent évoluent. Ses secteurs minier et pétrolier ne drainent plus aujourd’hui qu’une minorité des flux de capitaux à long terme, car les investisseurs donnent désormais la priorité aux télécommunications, à la distribution et aux services. En Afrique subsaharienne, 90 000 usagers, en moyenne, se connectent chaque jour pour la première fois à Internet. L’Afrique devient, vite, le premier centre mondial des activités bancaires en ligne, et cette évolution étendra l’accès de ses économies aux marchés mondiaux, bâtira la résilience, renforcera la transparence et créera des emplois.
Dans le rapport de développement 2021 de la Banque européenne d’investissement, qui donne le détail de nos 5 milliards d’euros (5,9 milliards de dollars) de prêts en Afrique l’an dernier, nous proposons une série de contributions d’experts, qui soulignent les complexités auxquelles fait face aujourd’hui le financement du développement. Les questions qui se posent vont désormais de l’évaluation du risque climatique à l’extension des programmes de sauvetage des forêts de Côte d’Ivoire, abattues à un rythme effréné pour faire place à la production de cacao.
Parallèlement au rapport de développement, nous publions aussi un Partenariat avec l’Afrique, qui examine plus profondément les grands principes de stratégie et d’action qui président aux initiatives de développement. Question déterminante de ce siècle, pour le monde entier, le changement climatique ajoute aux difficultés spécifiques de l’Afrique, notamment parce qu’il augmentera le nombre de personnes déplacées et fragilisera plus encore les États et les sociétés. Si l’Afrique ne contribue que pour moins de 4 % aux émissions de gaz à effet de serre, elle s’apprête pourtant à subir de plein fouet le choc d’une planète qui se réchauffe.
Néanmoins, étant donné son niveau relativement faible d’industrialisation (que traduit sa faible contribution au réchauffement mondial), l’Afrique a une chance unique de basculer directement dans un avenir plus respectueux de l’environnement. Pour y parvenir, les dirigeants africains doivent soutenir l’innovation et adopter les meilleures technologies disponibles. Les biens de base, comme l’eau, l’énergie renouvelable et une mobilité propre, doivent être mis à disposition de toutes et de tous.
La BEI est active en Afrique depuis 1965. Avec 59 milliards d’euros investis dans 52 pays africains, elle dessine un modèle dont les autres institutions financières internationales peuvent apprendre. L’an dernier, 71 % de nos financements pour l’Afrique subsaharienne étaient alloués aux États fragiles et aux économies les moins développées, où nous avons cherché à soutenir les évolutions positives déjà en cours, au nombre desquelles, une croissance économique rapide, une plus grande stabilité et une meilleure intégration politiques, une hausse des investissements étrangers et des opportunités d’entreprendre plus nombreuses et de meilleure qualité. À la base de ce travail, il y a la volonté d’écouter les dirigeants africains et de coopérer avec des innovateurs ambitieux et engagés. Cela nous permet de répondre directement aux besoins locaux, tout en œuvrant dans le sens de la politique de l’UE.
Au cours des deux derniers mois, nous avons organisé des discussions stratégiques avec les présidents du Sénégal, du Ghana et de la Tunisie, tout comme avec la commissaire de l’Union africaine Josefa Sacko. La BEI a également joué un rôle actif lors du récent sommet africain accueilli à Paris par le président français, Emmanuel Macron, et dans le Forum UE-Afrique sur l’investissement vert, au mois avril. À l’occasion de ces deux réunions, les dirigeants des deux continents ont souligné la nécessité d’un partenariat renforcé.
De nombreux dirigeants africains ont réagi à la pandémie de Covid-19 avec une détermination impressionnante. En agissant de concert, l’Afrique et l’Europe peuvent affronter la crise sanitaire et économique actuelle tout en définissant des priorités d’investissement communes en vue d’une reprise durable et inclusive.
Nous avons quant à nous, à la BEI, amélioré significativement notre fonctionnement en Afrique au cours de ces dernières années. En conformité avec les discussions qui se sont tenues entre responsables politiques européens concernant l’amélioration de l’architecture financière de l’aide européenne au développement, nous nous sommes attachés à repenser nos contributions, afin de maximiser leur impact au service des objectifs tant européens qu’africains.
En améliorant la façon dont nous contribuons au financement du développement en étroite coopération avec la Commission européenne et le Service européen pour l’action extérieure, nous pouvons répondre aux besoins croissants de liens commerciaux et économiques encore plus étroits entre l’Europe et l’Afrique. En cet âge de changement climatique et de pandémies mondiales, nos deux continents navigueront de conserve ou couleront ensemble.
Traduit de l’anglais par François Boisivon
Werner Hoyer est président de la Banque européenne d’investissement.
© Project Syndicate 1995–2021