«Le nombre de malades qui ont besoin d’oxygène augmente plus rapidement que les lits»
Figure de la riposte contre le Covid-19, Pr Moussa Seydi, chef du Service des maladies infectieuses de Fann, sort du silence. Dans cet entretien, il parle de la deuxième vague, de la réouverture des Cte, du vaccin contre le Covid-19 et de ses rapports avec le chef de l’Etat. Sans protocole, il dit tout.
Une nouvelle souche du Covid-19 a été découverte. Quelles sont les informations dont vous disposez à l’heure actuelle ?
La nouvelle souche qui a été découverte semble se transmettre beaucoup plus rapidement, mais il n’a pas encore été prouvé au moment où je vous parle d’une virulence supérieure à celle des souches déjà circulantes. N’empêche que cela peut avoir une incidence en matière de santé publique. Ça veut dire que si le virus se retrouve dans un pays, très rapidement on peut se retrouver devant un nombre plus important de cas dans un laps de temps. Plus on aura des cas graves plus on aura des décès. Donc on peut retenir que c’est une souche qui se transmet plus facilement, mais il ne semble pas plus virulent. Mais du moment où il se transmet plus rapidement, cela peut avoir des implications importantes.
Qu’est-ce qui peut expliquer les cas de décès élevés constatés ces derniers temps ?
Oui, le nombre de décès a augmenté. D’abord pour moi, c’est parce qu’il y a une proportionnalité entre le nombre de cas graves et le nombre de décès. J’avais l’habitude de dire que même si le nombre de cas détectés reste stable ou diminue alors que le nombre de décès augmente, ça veut dire que le nombre de cas réels en fait a augmenté. Les cas qu’on déclare, ce sont ceux diagnostiqués. Vous savez qu’avec le temps il y a beaucoup de personnes qui ne se font pas dépister alors qu’elles doivent le faire. Elles préfèrent rester avec leurs signes, prendre des traitements jusqu’à ce que tout disparaisse sans venir à l’hôpital. Mais si le cas devient sévère, le patient est obligé de venir à l’hôpital. Donc on ne peut pas cacher les cas graves. Ou quand le cas est grave, on vient forcément à l’hôpital. Quand il y a décès aussi, les gens sont forcément informés. Donc le nombre de cas déclarés correspond au nombre de cas dépistés, mais ça ne reflète pas forcément la réalité au niveau du Sénégal ou de Dakar etc. parce qu’il y en a beaucoup qui ne se font pas dépister. C’est pour cela qu’il ne faut pas se rassurer parce qu’il y a le nombre de cas qui baisse. Ce n’est rassurant que s’il y a une baisse du nombre de cas graves et une baisse du nombre de décès. Mais si le nombre de cas graves augmente, le nombre de décès augmente. Vous voyez que le nombre de cas de manière générale reste assez stable depuis quelques jours, ça ce n’est pas rassurant. C’est important que la population le sache, qu’elle ne voit pas des chiffres bruts, mais voir ce qu’il y a derrière ces chiffres-là.
Donc pour vous on doit changer la stratégie consistant à ne dépister que les personnes ayant développé des symptômes ?
Vous savez, les stratégies tiennent en compte beaucoup de choses. Vous posez là une question extrêmement complexe. Elle semble simple et évidente, mais elle est extrêmement complexe. Dans tous les pays du monde, il est impossible de dépister tout le monde, il y a juste quelques exceptions. Si on prend l’exemple de la Chine, ils ont pu dépister Wuhan en entier. Mais ce sont des cas exceptionnels parce que tout simplement ça coûte extrêmement cher. Ça nécessite beaucoup de personnels et ce n’est pas sûr que ce soit toujours efficient. Si vous voulez connaître le nombre de cas réels ici au Sénégal, vous avez deux méthodes : soit vous faites ce qu’on appelle une étude de prévalence. Et à partir d’elle, vous dites qu’il y a par exemple 20% de la population qui sont infectés. Ça vous donne une idée du nombre de personnes infectées ou vous dépistez tout le monde comme on l’a fait à Wuhan. La méthode la plus fiable pour dépister tout le monde, c’est impossible de l’utiliser. Ce que ça peut coûter en ressources humaines et financières ne peut pas se justifier au Sénégal. Ce seraient des centaines de milliards qu’il vaut mieux utiliser pour construire des hôpitaux pour que les patients soient mieux pris en charge. C’est pour cela qu’il faut une stratégie de dépistage concertée, et elle peut être revue en fonction de la situation. Au début, c’était de contenir très rapidement la maladie, donc il fallait dépister presque systématiquement tous les cas contacts, dépister le maximum de personnes. Il n’y avait pas de transmission communautaire. Maintenant qu’il y a une transmission communautaire, le virus se trouve presque partout. Vous êtes obligés de voir comment restreindre vos critères de dépistage. C’est en tenant compte de l’évolution de la pandémie, des moyens disponibles qu’on peut prendre une décision efficiente. Il ne faut pas prendre une décision qui crée plus de dégâts que d’avantages. Donc ce qu’on gagne d’un côté, on peut le perdre de l’autre. On ne peut pas mettre toutes les ressources du Sénégal pour faire le dépistage. Le choix du Sénégal, c’est un choix correct, acceptable et normal. On ne dépiste plus tout le monde. On dépiste les contacts et même chez les contacts, ce n’est pas forcément tout le monde qui est dépisté. On dépiste les sujets âgés, les sujets qui ont une comorbidité etc. Pour les autres contacts, on peut juste leur demander de s’auto-isoler pendant une certaine période. Dans certains pays, c’est 7 jours, dans d’autres, c’est 10 jours, 14 jours, mais on sait qu’au maximum l’auto-isolement ne doit pas dépasser 10 jours. Donc c’est la stratégie qui a été adoptée et elle est acceptable et tout à fait normale.
Est-ce que notre stratégie est toujours adaptée pour lutter efficacement contre cette deuxième vague ?
La stratégie est adaptée. Ce n’est pas un problème de stratégie. On est obligé de la revoir en fonction des nouvelles donnes, mais c’est plus facile de combattre cette recrudescence que la première phase.
Comment ?
Parce que durant la première phase, on avait 12 lits ici à Fann, une seule équipe qui prenait en charge, l’équipe des maladies infectieuses, zéro lit de réanimation. Maintenant qu’on a presque 39 Cte qui peuvent être ouverts, des centaines de personnes formées dans la prise en charge de cette affection, qu’on peut mettre à disposition rapidement une cinquantaine de lits de réanimation, qu’on a certains produits disponibles comme l’hydroxychloroquine, l’azithromycine, la dexaméthasone, beaucoup d’autres produits que la Pna (Ndlr : Pharmacie nationale d’approvisionnement) nous donne, il n’y a pas photo. On ne peut pas comparer notre situation de départ à celle actuelle. Parmi les problèmes que nous avons, parce qu’il y a des problèmes, notre réactivité a été un peu lente dans l’ouverture de nouveaux centres de traitement et dans le recrutement de personnels suffisants pour prendre en charge les malades. Autrement dit, le nombre de malades qui ont besoin d’oxygène augmente plus rapidement que le nombre de lits disposant d’arrivée d’oxygène. C’est peut être ça notre difficulté à l’heure actuelle. Mais tout ce qui a été acquis dans le combat durant la première phase peut être utilisé dans cette phase-là. Peut-être nous sommes un peu lents dans notre réaction par rapport à la mise à disposition des centres de traitement des épidémies, au recrutement du personnel qui doit faire marcher ces centres de traitement, mais surtout de réanimation. Pour vous donner l’exemple de l’hôpital Fann, nous n’avons que deux lits disponibles parce qu’il n’y a pas suffisamment de personnels pour utiliser tous les lits au niveau des centres de réanimation. Il suffisait aujourd’hui qu’on recrute le personnel qu’il faut pour que ces centres de réanimation fonctionnent à plein régime. Donc c’est là où nous avons quelques soucis, mais c’est en train d’être corrigé. Nous avons fait une réunion hier (Ndlr : lundi) au ministère de la Santé et le ministre (Ndlr : Abdoulaye Diouf Sarr) a donné des instructions pour que tous les centres de traitement des épidémies, toutes les réanimations qui prenaient en charge les malades puissent être rouverts. C’est ça que j’ai compris du message qu’il a lancé. Nous espérons que dans les jours à venir ces difficultés vont s’éteindre.
Donc le Sénégal a les moyens de combattre cette deuxième vague ? Il n’y a pas un problème de ressources humaines ?
Absolument ! Il y a une lenteur dans la remobilisation de ces ressources humaines, mais on n’a pas de problème de ressources humaines. Il suffit aujourd’hui de rappeler ces personnes, de leur faire signer des contrats pour qu’elles puissent travailler et faire fonctionner tous ces centres qui étaient ouverts dans la première phase. On n’a pas de problème de ressources humaines au sens strict du terme, mais on n’a pas contractualisé à nouveau ces ressources humaines. Ça va se faire, mais il y a eu un peu de retard par rapport à cela.
Sur les 39 Cte disponibles au Sénégal, peut-on avoir une idée du nombre de ceux qui sont dans le même cas que Fann, c’est-à-dire qui ont des lits opérationnels, mais faute de personnel, on ne peut pas les ouvrir ?
Non, je ne peux pas Cte par Cte vous donner des détails. Je ne parle pas des centres de traitement qui reçoivent deux ou trois malades et qui n’ont pas besoin de ces personnels-là, mais ceux qui reçoivent un nombre très important de malades. Il y a une lenteur par rapport au recrutement du personnel. Comme je l’ai dit, le ministre a donné les instructions. C’est ça que j’ai compris de ce qu’il a dit à ce que le personnel soit recruté et que ces centres ouvrent. Mais c’est un problème qui est là, handicapant et qu’il faut prendre au sérieux. Donc ça c’est une difficulté qu’il faut dire, ça c’est la vérité. On a tous les jours des patients. Même aujourd’hui (hier), on a eu à faire beaucoup de gymnastique pour pouvoir caser des malades graves dans une réanimation ou dans un centre de traitement avec oxygène. Donc c’est là où je dis qu’on a les moyens de contenir cette vague. Tout est disponible pour le faire, mais il faut une remobilisation. Et celle-ci est lente par rapport à l’évolution du nombre de cas. Ça c’est un constat indéniable et indiscutable.
Sur cette lenteur, est-ce qu’il y a des morts par exemple qu’on aurait pu éviter s’il y avait le personnel ?
Si ces centres étaient ouverts, je pense que oui (il se répète) parce que ça peut apporter un retard de prise en charge. Quand vous avez un malade qui s’aggrave à domicile, vous mettez une heure, deux heures, trois heures, quatre heures de temps pour trouver un lit libre, alors que vous ne le prenez pas en charge, vous réduisez ses risques de survie. Je ne peux pas dire si ça a concerné un, deux malades, mais c’est absolument évident. Quand un malade a besoin d’être pris en charge, il s’agit d’un cas grave. Tout retard de prise en charge peut jouer sur le pronostic vital. C’est une évidence.
On a constaté sur l’axe nord, c’est-à-dire Saint Louis-Matam, une augmentation du nombre des cas. Qu’est-ce qui peut expliquer cette virulence sur cette zone ?
Il n’est pas prouvé que le virus qui circule actuellement soit plus virulent que celui qui circulait avant durant la première phase. Ce n’est pas quelque chose qui est prouvé. A ma connaissance, personne n’a dit que ce virus-là est plus virulent que celui qui circulait avant. Mais les personnes les plus habilitées à vous informer sur cela, c’est l’Institut Pasteur de Dakar qui a fait le génotypage sur plus de 400 virus. Ils ont fait un séquençage de plus de 400 souches de virus si vous voulez, mais ce ne sont pas des souches qu’on peut dire d’emblée différentes. On prend 400 souches, on fait le séquençage et on voit est-ce que ces virus se ressemblent ou pas ou est-ce qu’il y a de différences ou pas. En faisant cela, je n’ai pas compris dans les résultats qu’ils ont donnés qu’il y avait une différence majeure entre les différentes souches de virus qui circulent au Sénégal.
Dans plusieurs pays, on a commencé à administrer le vaccin anti Covid-19. Le Sénégal doit-il encore attendre ?
Même aux Etats-Unis où sont produits les vaccins, ils ont des difficultés pour que les prioritaires puissent bénéficier du vaccin et vous voulez que le Sénégal en bénéficie déjà. Le premier vaccin a été autorisé ça ne fait pas longtemps. Pfizer, Moderna a été autorisé ça ne fait pas 4 jours. Il n’y a même pas suffisamment de productions pour les Etats-Unis. Et après les Etats-Unis, il y a l’Union européenne, beaucoup d’autres pays qui sont sur la liste et qui attendent d’être fournis. Donc ce n’est pas dans deux, trois mois que le vaccin sera disponible au Sénégal parce qu’il y a des logiques qui sont là et il faut compter avec elles. Maintenant le Sénégal fait partie de ce qu’on appelle l’initiative Covax de l’Organisation mondiale de la santé. A travers elle, le Sénégal pourra obtenir le vaccin moins cher. Donc il va falloir que l’Oms les homologue. Après homologation, dans le cadre de cette initiative, le Sénégal pourra acquérir les vaccins. Le Sénégal n’a pas les moyens d’entrer en compétition avec les Usa, l’Union européenne pour se payer un vaccin à 100 milliards de dollars. Ce n’est pas possible. Imaginez, les antirétroviraux sont gratuits ici. On le paye à un prix très symbolique, mais en Occident les assurances le payent extrêmement cher. On ne peut pas payer les mêmes prix que les autres parce que le vaccin peut aller jusqu’à 30 dollars, soit 20 mille Cfa. L’initiative est là et le vaccin est indispensable quand une épidémie dure pour en finir.
Que pensez-vous de l’efficacité du vaccin Pfizer ?
Les gens doutent de l’efficacité du vaccin. Ils disent que le vaccin est dangereux. Ils disent beaucoup de choses par rapport à ce vaccin. La plupart des choses dites sur le vaccin Arn messager sont absolument fausses. Il y a des choses inconnues et fausses. C’est important que la population soit informée, ne serait-ce que sommairement de la façon dont on détermine l’efficacité d’un vaccin. Prenons l’exemple sur le vaccin Pfizer qui est déjà commercialisé ! il y a une publication avec des données précises sur ce vaccin que n’importe quel scientifique peut voir. L’étude a été faite sur plus de 40 mille patients. Il y a eu 2 bras. Sur l’un des groupes, on a administré le vaccin. Dans l’autre, on a administré le placebo. Ce qui ressemble au vaccin, mais qui ne l’est pas. Après avoir donné 2 doses de vaccin avec un intervalle de 21 jours, ils ont évalué le nombre de personnes atteintes de Covid-19 dans le bras vacciné et dans celui non vacciné. Dans le bras vacciné, il y a eu 8 cas de Covid-19. Dans le bras non vacciné, il y a 162 cas de Covid-19. Quand on fait les calculs, on voit qu’il y a une efficacité de 95%. L’efficacité est évidente, mais elle est à 2 mois. On me dira qu’on ignore s’il sera efficace pendant des années. On ne le saura pas maintenant, il faut attendre des années. Le vaccin contre la fièvre jaune, on disait qu’il fallait le faire chaque 10 ans, mais on s’est rendu compte qu’il a une efficacité de 30 ans. Maintenant on sait qu’il protège toute la vie. Le vaccin pour la rougeole, on donnait une seule dose, mais c’est avec le temps qu’on a su qu’il fallait donner 2 doses. Régulièrement, on va réactualiser les choses en fonction de ce que l’on verra dans le temps.
Et sur la tolérance ?
On a vu des effets secondaires. Ils sont plus nombreux dans le groupe vacciné, mais ils sont mineurs. Par contre pour les effets secondaires graves, on les a observés dans les mêmes proportions dans le groupe vacciné et dans celui non vacciné. Mais il a été établi, et il y a des méthodes pour le faire, qu’il y a eu 4 événements indésirables graves qu’on peut lier au vaccin. Je ne dis pas irréversible. Quelqu’un a été blessé au niveau du bras lors de la vaccination : Il y a une personne qui a une lymphadénopathie. Ce qu’on appelle des ganglions. Et tout cela peut s’expliquer. Il y a une personne qui a des troubles du rythme cardiaque, une personne a eu une paresthésie. Ce sont les effets secondaires qu’il faut considérer comme sévères, mais qui ne sont pas irréversibles. D’ailleurs, la lymphadénopathie a disparu au bout de 10 jours. Donc c’est lié. On peut avoir des effets secondaires qui apparaissent durant la vaccination sans que cela ne soit lié au vaccin, mais ça peut être lié au vaccin. Là, les spécialistes ont vu que c’est lié au vaccin. Par rapport au décès, il n’y a pas eu beaucoup de différence. Il y a eu 2 décès chez ceux qui ont eu le vaccin et 4 chez ceux qui ont eu le placébo. Tous ces décès ne sont ni liés au vaccin ni au placébo. Le groupe vacciné, ces décès le sont par maladies cardiovasculaires. Chez ceux qui ont pris le placébo, de l’eau saline, il y a 2 décès liés aux maladies cardiovasculaires et les 2 autres on ne connaît pas les causes. Donc il n’y a aucun décès relié à la prise du vaccin. C’est des données publiées. Ça veut dire qu’avec le recul, c’est un vaccin bien tolérant. Maintenant vous utilisez 20 ou 40 mille personnes, vous n’aurez pas les mêmes résultats quand c’est un million ou un milliard de personnes. Peut-être qu’avec le temps, la tolérance va se confirmer ou non. On a 4 cas graves sur 40 mille personnes. Peut-être qu’on aura beaucoup plus de cas graves sur un milliard de personnes. Dans ce cas, on peut décider d’arrêter le vaccin. Pour l’instant les résultats sont encourageants et justifient largement que ce vaccin puisse être utilisé sur le plan purement scientifique.
Maintenant sur le plan logistique, c’est un vaccin qui se conserve au frigo juste 5 jours. En dehors de ça, il faut le mettre entre moins 60 et moins 80 degré. Ça nécessite une logistique assez complexe. Tout cela, pour dire que nous sommes scientifiques, nous avons lu l’article scientifique et on a raison d’avoir confiance. Maintenant la confiance c’est quelque chose qui ne peut pas ne pas manquer, car si je vous prescris un médicament, vous ne savez pas si ça contient le principe actif. Vous avez confiance en moi, vous achetez à la pharmacie. Il y a toujours une dose de confiance. Quand on regarde ceux qui ont fait la recherche, qui sont capables de la faire, le design de l’étude est correct, l’article est bien rédigé, il y a une cohérence : On accepte que c’est quelque chose qui marche jusqu’à preuve du contraire. De toute façon, il ne faut pas obliger les gens à prendre le vaccin. Ceux qui veulent le prendre peuvent le faire, et ceux qui ne veulent pas on ne peut pas les y contraindre. Il y a plein de choses qui se disent, mais qui ne sont pas du tout vraies concernant l’efficacité et la tolérance de ces vaccins à Arn. On vous dira que ce sont des vaccins nouveaux qui vont entrer dans le génome, modifier l’aspect génétique, mais c’est archi-faux. Cet Arn n’entre pas dans le noyau de la cellule. Oui il y a des inconnus. (…)
Avant de donner ces résultats, ils ont inclus le maximum de personnes possibles. C’est un vaccin efficace, bien toléré et il doit être utilisé (…) Il ne faut raconter des histoires du genre il y a du Vih dedans. C’est vrai que ce sont des multinationales qui cherchent de l’argent, tout ce que vous voulez, mais il ne faut pas raconter des choses dont on n’est pas sûr.
Durant cette crise, avez-vous senti le soutien du président de la République à l’endroit des personnels de santé ?
Moi, je ne suis pas un politique. Je dis les choses telles qu’elles. Le soutien du chef de l’Etat a été excellent à tous les niveaux. Premièrement, par rapport à la pandémie, il a pris des décisions fortes dès le début. Ce sont ces décisions qui nous ont permis véritablement de mieux nous préparer à l’arrivée massive des cas. Et ça c’est important. S’il n’avait pas pris ces décisions qui pouvaient être problématiques, on n’en serait pas là aujourd’hui.
Deuxièmement, il nous a dit qu’il nous donnerait tous les moyens dont on a besoin sans limite. L’essentiel, c’est qu’on fasse notre travail comme il se doit, et les moyens il les a donnés. En tout cas, durant la première phase, tout ce dont j’avais besoin pour bien travailler, je l’ai eu. Et progressivement, ça été étendu, parce qu’en faisant le tour, je me suis rendu compte qu’il y avait des zones qui étaient plus mal loties que moi, mais évidemment on ne peut pas tout faire le même jour au même moment. Donc il a donné les moyens et le ministère a essayé de régler le problème au fur et à mesure même si jusqu’à présent il y a un déséquilibre. Tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Troisième élément fondamental, c’est lui qui m’a appelé pour me dire que je veux vous aider à construire un grand service des maladies infectieuses, le plus grand possible et le plus moderne possible, et je vous donnerai les financements dont vous avez besoin sans limite de montant. Nous avons fait nos estimations et nous lui avons dit ce dont nous avons besoin pour construire le service et il nous a accordé cet argent. Ça ce sont des faits concrets qui font que nous devons le remercier vivement. Nous sommes des scientifiques, on ne prononce pas des mots qui n’ont pas de justification, de contenus. Et il a toujours respecté notre liberté et notre indépendance. Vous ne l’avez pas vu se mêler des traitements, il faut donner tel médicament et pas tel médicament. (…) Est-ce que vous avez une fois vu le président de la République faire quelque chose qui met mal à l’aise les praticiens ? Je ne rate pas une occasion de le remercier pour ce qu’il a fait. Maintenant la balle est dans notre camp pour essayer de juguler cette deuxième vague avec l’aide du ministère de la Santé.
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Figure de la riposte contre le Covid-19, Pr Moussa Seydi, chef du Service des maladies infectieuses de Fann, sort du silence. Dans cet entretien, il parle de la deuxième vague, de la réouverture des Cte, du vaccin contre le Covid-19 et de ses rapports avec le chef de l’Etat. Sans protocole, il dit tout.
Une nouvelle souche du Covid-19 a été découverte. Quelles sont les informations dont vous disposez à l’heure actuelle ?
La nouvelle souche qui a été découverte semble se transmettre beaucoup plus rapidement, mais il n’a pas encore été prouvé au moment où je vous parle d’une virulence supérieure à celle des souches déjà circulantes. N’empêche que cela peut avoir une incidence en matière de santé publique. Ça veut dire que si le virus se retrouve dans un pays, très rapidement on peut se retrouver devant un nombre plus important de cas dans un laps de temps. Plus on aura des cas graves plus on aura des décès. Donc on peut retenir que c’est une souche qui se transmet plus facilement, mais il ne semble pas plus virulent. Mais du moment où il se transmet plus rapidement, cela peut avoir des implications importantes.
Qu’est-ce qui peut expliquer les cas de décès élevés constatés ces derniers temps ?
Oui, le nombre de décès a augmenté. D’abord pour moi, c’est parce qu’il y a une proportionnalité entre le nombre de cas graves et le nombre de décès. J’avais l’habitude de dire que même si le nombre de cas détectés reste stable ou diminue alors que le nombre de décès augmente, ça veut dire que le nombre de cas réels en fait a augmenté. Les cas qu’on déclare, ce sont ceux diagnostiqués. Vous savez qu’avec le temps il y a beaucoup de personnes qui ne se font pas dépister alors qu’elles doivent le faire. Elles préfèrent rester avec leurs signes, prendre des traitements jusqu’à ce que tout disparaisse sans venir à l’hôpital. Mais si le cas devient sévère, le patient est obligé de venir à l’hôpital. Donc on ne peut pas cacher les cas graves. Ou quand le cas est grave, on vient forcément à l’hôpital. Quand il y a décès aussi, les gens sont forcément informés. Donc le nombre de cas déclarés correspond au nombre de cas dépistés, mais ça ne reflète pas forcément la réalité au niveau du Sénégal ou de Dakar etc. parce qu’il y en a beaucoup qui ne se font pas dépister. C’est pour cela qu’il ne faut pas se rassurer parce qu’il y a le nombre de cas qui baisse. Ce n’est rassurant que s’il y a une baisse du nombre de cas graves et une baisse du nombre de décès. Mais si le nombre de cas graves augmente, le nombre de décès augmente. Vous voyez que le nombre de cas de manière générale reste assez stable depuis quelques jours, ça ce n’est pas rassurant. C’est important que la population le sache, qu’elle ne voit pas des chiffres bruts, mais voir ce qu’il y a derrière ces chiffres-là.
Donc pour vous on doit changer la stratégie consistant à ne dépister que les personnes ayant développé des symptômes ?
Vous savez, les stratégies tiennent en compte beaucoup de choses. Vous posez là une question extrêmement complexe. Elle semble simple et évidente, mais elle est extrêmement complexe. Dans tous les pays du monde, il est impossible de dépister tout le monde, il y a juste quelques exceptions. Si on prend l’exemple de la Chine, ils ont pu dépister Wuhan en entier. Mais ce sont des cas exceptionnels parce que tout simplement ça coûte extrêmement cher. Ça nécessite beaucoup de personnels et ce n’est pas sûr que ce soit toujours efficient. Si vous voulez connaître le nombre de cas réels ici au Sénégal, vous avez deux méthodes : soit vous faites ce qu’on appelle une étude de prévalence. Et à partir d’elle, vous dites qu’il y a par exemple 20% de la population qui sont infectés. Ça vous donne une idée du nombre de personnes infectées ou vous dépistez tout le monde comme on l’a fait à Wuhan. La méthode la plus fiable pour dépister tout le monde, c’est impossible de l’utiliser. Ce que ça peut coûter en ressources humaines et financières ne peut pas se justifier au Sénégal. Ce seraient des centaines de milliards qu’il vaut mieux utiliser pour construire des hôpitaux pour que les patients soient mieux pris en charge. C’est pour cela qu’il faut une stratégie de dépistage concertée, et elle peut être revue en fonction de la situation. Au début, c’était de contenir très rapidement la maladie, donc il fallait dépister presque systématiquement tous les cas contacts, dépister le maximum de personnes. Il n’y avait pas de transmission communautaire. Maintenant qu’il y a une transmission communautaire, le virus se trouve presque partout. Vous êtes obligés de voir comment restreindre vos critères de dépistage. C’est en tenant compte de l’évolution de la pandémie, des moyens disponibles qu’on peut prendre une décision efficiente. Il ne faut pas prendre une décision qui crée plus de dégâts que d’avantages. Donc ce qu’on gagne d’un côté, on peut le perdre de l’autre. On ne peut pas mettre toutes les ressources du Sénégal pour faire le dépistage. Le choix du Sénégal, c’est un choix correct, acceptable et normal. On ne dépiste plus tout le monde. On dépiste les contacts et même chez les contacts, ce n’est pas forcément tout le monde qui est dépisté. On dépiste les sujets âgés, les sujets qui ont une comorbidité etc. Pour les autres contacts, on peut juste leur demander de s’auto-isoler pendant une certaine période. Dans certains pays, c’est 7 jours, dans d’autres, c’est 10 jours, 14 jours, mais on sait qu’au maximum l’auto-isolement ne doit pas dépasser 10 jours. Donc c’est la stratégie qui a été adoptée et elle est acceptable et tout à fait normale.
Est-ce que notre stratégie est toujours adaptée pour lutter efficacement contre cette deuxième vague ?
La stratégie est adaptée. Ce n’est pas un problème de stratégie. On est obligé de la revoir en fonction des nouvelles donnes, mais c’est plus facile de combattre cette recrudescence que la première phase.
Comment ?
Parce que durant la première phase, on avait 12 lits ici à Fann, une seule équipe qui prenait en charge, l’équipe des maladies infectieuses, zéro lit de réanimation. Maintenant qu’on a presque 39 Cte qui peuvent être ouverts, des centaines de personnes formées dans la prise en charge de cette affection, qu’on peut mettre à disposition rapidement une cinquantaine de lits de réanimation, qu’on a certains produits disponibles comme l’hydroxychloroquine, l’azithromycine, la dexaméthasone, beaucoup d’autres produits que la Pna (Ndlr : Pharmacie nationale d’approvisionnement) nous donne, il n’y a pas photo. On ne peut pas comparer notre situation de départ à celle actuelle. Parmi les problèmes que nous avons, parce qu’il y a des problèmes, notre réactivité a été un peu lente dans l’ouverture de nouveaux centres de traitement et dans le recrutement de personnels suffisants pour prendre en charge les malades. Autrement dit, le nombre de malades qui ont besoin d’oxygène augmente plus rapidement que le nombre de lits disposant d’arrivée d’oxygène. C’est peut être ça notre difficulté à l’heure actuelle. Mais tout ce qui a été acquis dans le combat durant la première phase peut être utilisé dans cette phase-là. Peut-être nous sommes un peu lents dans notre réaction par rapport à la mise à disposition des centres de traitement des épidémies, au recrutement du personnel qui doit faire marcher ces centres de traitement, mais surtout de réanimation. Pour vous donner l’exemple de l’hôpital Fann, nous n’avons que deux lits disponibles parce qu’il n’y a pas suffisamment de personnels pour utiliser tous les lits au niveau des centres de réanimation. Il suffisait aujourd’hui qu’on recrute le personnel qu’il faut pour que ces centres de réanimation fonctionnent à plein régime. Donc c’est là où nous avons quelques soucis, mais c’est en train d’être corrigé. Nous avons fait une réunion hier (Ndlr : lundi) au ministère de la Santé et le ministre (Ndlr : Abdoulaye Diouf Sarr) a donné des instructions pour que tous les centres de traitement des épidémies, toutes les réanimations qui prenaient en charge les malades puissent être rouverts. C’est ça que j’ai compris du message qu’il a lancé. Nous espérons que dans les jours à venir ces difficultés vont s’éteindre.
Donc le Sénégal a les moyens de combattre cette deuxième vague ? Il n’y a pas un problème de ressources humaines ?
Absolument ! Il y a une lenteur dans la remobilisation de ces ressources humaines, mais on n’a pas de problème de ressources humaines. Il suffit aujourd’hui de rappeler ces personnes, de leur faire signer des contrats pour qu’elles puissent travailler et faire fonctionner tous ces centres qui étaient ouverts dans la première phase. On n’a pas de problème de ressources humaines au sens strict du terme, mais on n’a pas contractualisé à nouveau ces ressources humaines. Ça va se faire, mais il y a eu un peu de retard par rapport à cela.
Sur les 39 Cte disponibles au Sénégal, peut-on avoir une idée du nombre de ceux qui sont dans le même cas que Fann, c’est-à-dire qui ont des lits opérationnels, mais faute de personnel, on ne peut pas les ouvrir ?
Non, je ne peux pas Cte par Cte vous donner des détails. Je ne parle pas des centres de traitement qui reçoivent deux ou trois malades et qui n’ont pas besoin de ces personnels-là, mais ceux qui reçoivent un nombre très important de malades. Il y a une lenteur par rapport au recrutement du personnel. Comme je l’ai dit, le ministre a donné les instructions. C’est ça que j’ai compris de ce qu’il a dit à ce que le personnel soit recruté et que ces centres ouvrent. Mais c’est un problème qui est là, handicapant et qu’il faut prendre au sérieux. Donc ça c’est une difficulté qu’il faut dire, ça c’est la vérité. On a tous les jours des patients. Même aujourd’hui (hier), on a eu à faire beaucoup de gymnastique pour pouvoir caser des malades graves dans une réanimation ou dans un centre de traitement avec oxygène. Donc c’est là où je dis qu’on a les moyens de contenir cette vague. Tout est disponible pour le faire, mais il faut une remobilisation. Et celle-ci est lente par rapport à l’évolution du nombre de cas. Ça c’est un constat indéniable et indiscutable.
Sur cette lenteur, est-ce qu’il y a des morts par exemple qu’on aurait pu éviter s’il y avait le personnel ?
Si ces centres étaient ouverts, je pense que oui (il se répète) parce que ça peut apporter un retard de prise en charge. Quand vous avez un malade qui s’aggrave à domicile, vous mettez une heure, deux heures, trois heures, quatre heures de temps pour trouver un lit libre, alors que vous ne le prenez pas en charge, vous réduisez ses risques de survie. Je ne peux pas dire si ça a concerné un, deux malades, mais c’est absolument évident. Quand un malade a besoin d’être pris en charge, il s’agit d’un cas grave. Tout retard de prise en charge peut jouer sur le pronostic vital. C’est une évidence.
On a constaté sur l’axe nord, c’est-à-dire Saint Louis-Matam, une augmentation du nombre des cas. Qu’est-ce qui peut expliquer cette virulence sur cette zone ?
Il n’est pas prouvé que le virus qui circule actuellement soit plus virulent que celui qui circulait avant durant la première phase. Ce n’est pas quelque chose qui est prouvé. A ma connaissance, personne n’a dit que ce virus-là est plus virulent que celui qui circulait avant. Mais les personnes les plus habilitées à vous informer sur cela, c’est l’Institut Pasteur de Dakar qui a fait le génotypage sur plus de 400 virus. Ils ont fait un séquençage de plus de 400 souches de virus si vous voulez, mais ce ne sont pas des souches qu’on peut dire d’emblée différentes. On prend 400 souches, on fait le séquençage et on voit est-ce que ces virus se ressemblent ou pas ou est-ce qu’il y a de différences ou pas. En faisant cela, je n’ai pas compris dans les résultats qu’ils ont donnés qu’il y avait une différence majeure entre les différentes souches de virus qui circulent au Sénégal.
Dans plusieurs pays, on a commencé à administrer le vaccin anti Covid-19. Le Sénégal doit-il encore attendre ?
Même aux Etats-Unis où sont produits les vaccins, ils ont des difficultés pour que les prioritaires puissent bénéficier du vaccin et vous voulez que le Sénégal en bénéficie déjà. Le premier vaccin a été autorisé ça ne fait pas longtemps. Pfizer, Moderna a été autorisé ça ne fait pas 4 jours. Il n’y a même pas suffisamment de productions pour les Etats-Unis. Et après les Etats-Unis, il y a l’Union européenne, beaucoup d’autres pays qui sont sur la liste et qui attendent d’être fournis. Donc ce n’est pas dans deux, trois mois que le vaccin sera disponible au Sénégal parce qu’il y a des logiques qui sont là et il faut compter avec elles. Maintenant le Sénégal fait partie de ce qu’on appelle l’initiative Covax de l’Organisation mondiale de la santé. A travers elle, le Sénégal pourra obtenir le vaccin moins cher. Donc il va falloir que l’Oms les homologue. Après homologation, dans le cadre de cette initiative, le Sénégal pourra acquérir les vaccins. Le Sénégal n’a pas les moyens d’entrer en compétition avec les Usa, l’Union européenne pour se payer un vaccin à 100 milliards de dollars. Ce n’est pas possible. Imaginez, les antirétroviraux sont gratuits ici. On le paye à un prix très symbolique, mais en Occident les assurances le payent extrêmement cher. On ne peut pas payer les mêmes prix que les autres parce que le vaccin peut aller jusqu’à 30 dollars, soit 20 mille Cfa. L’initiative est là et le vaccin est indispensable quand une épidémie dure pour en finir.
Que pensez-vous de l’efficacité du vaccin Pfizer ?
Les gens doutent de l’efficacité du vaccin. Ils disent que le vaccin est dangereux. Ils disent beaucoup de choses par rapport à ce vaccin. La plupart des choses dites sur le vaccin Arn messager sont absolument fausses. Il y a des choses inconnues et fausses. C’est important que la population soit informée, ne serait-ce que sommairement de la façon dont on détermine l’efficacité d’un vaccin. Prenons l’exemple sur le vaccin Pfizer qui est déjà commercialisé ! il y a une publication avec des données précises sur ce vaccin que n’importe quel scientifique peut voir. L’étude a été faite sur plus de 40 mille patients. Il y a eu 2 bras. Sur l’un des groupes, on a administré le vaccin. Dans l’autre, on a administré le placebo. Ce qui ressemble au vaccin, mais qui ne l’est pas. Après avoir donné 2 doses de vaccin avec un intervalle de 21 jours, ils ont évalué le nombre de personnes atteintes de Covid-19 dans le bras vacciné et dans celui non vacciné. Dans le bras vacciné, il y a eu 8 cas de Covid-19. Dans le bras non vacciné, il y a 162 cas de Covid-19. Quand on fait les calculs, on voit qu’il y a une efficacité de 95%. L’efficacité est évidente, mais elle est à 2 mois. On me dira qu’on ignore s’il sera efficace pendant des années. On ne le saura pas maintenant, il faut attendre des années. Le vaccin contre la fièvre jaune, on disait qu’il fallait le faire chaque 10 ans, mais on s’est rendu compte qu’il a une efficacité de 30 ans. Maintenant on sait qu’il protège toute la vie. Le vaccin pour la rougeole, on donnait une seule dose, mais c’est avec le temps qu’on a su qu’il fallait donner 2 doses. Régulièrement, on va réactualiser les choses en fonction de ce que l’on verra dans le temps.
Et sur la tolérance ?
On a vu des effets secondaires. Ils sont plus nombreux dans le groupe vacciné, mais ils sont mineurs. Par contre pour les effets secondaires graves, on les a observés dans les mêmes proportions dans le groupe vacciné et dans celui non vacciné. Mais il a été établi, et il y a des méthodes pour le faire, qu’il y a eu 4 événements indésirables graves qu’on peut lier au vaccin. Je ne dis pas irréversible. Quelqu’un a été blessé au niveau du bras lors de la vaccination : Il y a une personne qui a une lymphadénopathie. Ce qu’on appelle des ganglions. Et tout cela peut s’expliquer. Il y a une personne qui a des troubles du rythme cardiaque, une personne a eu une paresthésie. Ce sont les effets secondaires qu’il faut considérer comme sévères, mais qui ne sont pas irréversibles. D’ailleurs, la lymphadénopathie a disparu au bout de 10 jours. Donc c’est lié. On peut avoir des effets secondaires qui apparaissent durant la vaccination sans que cela ne soit lié au vaccin, mais ça peut être lié au vaccin. Là, les spécialistes ont vu que c’est lié au vaccin. Par rapport au décès, il n’y a pas eu beaucoup de différence. Il y a eu 2 décès chez ceux qui ont eu le vaccin et 4 chez ceux qui ont eu le placébo. Tous ces décès ne sont ni liés au vaccin ni au placébo. Le groupe vacciné, ces décès le sont par maladies cardiovasculaires. Chez ceux qui ont pris le placébo, de l’eau saline, il y a 2 décès liés aux maladies cardiovasculaires et les 2 autres on ne connaît pas les causes. Donc il n’y a aucun décès relié à la prise du vaccin. C’est des données publiées. Ça veut dire qu’avec le recul, c’est un vaccin bien tolérant. Maintenant vous utilisez 20 ou 40 mille personnes, vous n’aurez pas les mêmes résultats quand c’est un million ou un milliard de personnes. Peut-être qu’avec le temps, la tolérance va se confirmer ou non. On a 4 cas graves sur 40 mille personnes. Peut-être qu’on aura beaucoup plus de cas graves sur un milliard de personnes. Dans ce cas, on peut décider d’arrêter le vaccin. Pour l’instant les résultats sont encourageants et justifient largement que ce vaccin puisse être utilisé sur le plan purement scientifique.
Maintenant sur le plan logistique, c’est un vaccin qui se conserve au frigo juste 5 jours. En dehors de ça, il faut le mettre entre moins 60 et moins 80 degré. Ça nécessite une logistique assez complexe. Tout cela, pour dire que nous sommes scientifiques, nous avons lu l’article scientifique et on a raison d’avoir confiance. Maintenant la confiance c’est quelque chose qui ne peut pas ne pas manquer, car si je vous prescris un médicament, vous ne savez pas si ça contient le principe actif. Vous avez confiance en moi, vous achetez à la pharmacie. Il y a toujours une dose de confiance. Quand on regarde ceux qui ont fait la recherche, qui sont capables de la faire, le design de l’étude est correct, l’article est bien rédigé, il y a une cohérence : On accepte que c’est quelque chose qui marche jusqu’à preuve du contraire. De toute façon, il ne faut pas obliger les gens à prendre le vaccin. Ceux qui veulent le prendre peuvent le faire, et ceux qui ne veulent pas on ne peut pas les y contraindre. Il y a plein de choses qui se disent, mais qui ne sont pas du tout vraies concernant l’efficacité et la tolérance de ces vaccins à Arn. On vous dira que ce sont des vaccins nouveaux qui vont entrer dans le génome, modifier l’aspect génétique, mais c’est archi-faux. Cet Arn n’entre pas dans le noyau de la cellule. Oui il y a des inconnus. (…)
Avant de donner ces résultats, ils ont inclus le maximum de personnes possibles. C’est un vaccin efficace, bien toléré et il doit être utilisé (…) Il ne faut raconter des histoires du genre il y a du Vih dedans. C’est vrai que ce sont des multinationales qui cherchent de l’argent, tout ce que vous voulez, mais il ne faut pas raconter des choses dont on n’est pas sûr.
Durant cette crise, avez-vous senti le soutien du président de la République à l’endroit des personnels de santé ?
Moi, je ne suis pas un politique. Je dis les choses telles qu’elles. Le soutien du chef de l’Etat a été excellent à tous les niveaux. Premièrement, par rapport à la pandémie, il a pris des décisions fortes dès le début. Ce sont ces décisions qui nous ont permis véritablement de mieux nous préparer à l’arrivée massive des cas. Et ça c’est important. S’il n’avait pas pris ces décisions qui pouvaient être problématiques, on n’en serait pas là aujourd’hui.
Deuxièmement, il nous a dit qu’il nous donnerait tous les moyens dont on a besoin sans limite. L’essentiel, c’est qu’on fasse notre travail comme il se doit, et les moyens il les a donnés. En tout cas, durant la première phase, tout ce dont j’avais besoin pour bien travailler, je l’ai eu. Et progressivement, ça été étendu, parce qu’en faisant le tour, je me suis rendu compte qu’il y avait des zones qui étaient plus mal loties que moi, mais évidemment on ne peut pas tout faire le même jour au même moment. Donc il a donné les moyens et le ministère a essayé de régler le problème au fur et à mesure même si jusqu’à présent il y a un déséquilibre. Tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Troisième élément fondamental, c’est lui qui m’a appelé pour me dire que je veux vous aider à construire un grand service des maladies infectieuses, le plus grand possible et le plus moderne possible, et je vous donnerai les financements dont vous avez besoin sans limite de montant. Nous avons fait nos estimations et nous lui avons dit ce dont nous avons besoin pour construire le service et il nous a accordé cet argent. Ça ce sont des faits concrets qui font que nous devons le remercier vivement. Nous sommes des scientifiques, on ne prononce pas des mots qui n’ont pas de justification, de contenus. Et il a toujours respecté notre liberté et notre indépendance. Vous ne l’avez pas vu se mêler des traitements, il faut donner tel médicament et pas tel médicament. (…) Est-ce que vous avez une fois vu le président de la République faire quelque chose qui met mal à l’aise les praticiens ? Je ne rate pas une occasion de le remercier pour ce qu’il a fait. Maintenant la balle est dans notre camp pour essayer de juguler cette deuxième vague avec l’aide du ministère de la Santé.
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